Je manque de temps pour mon enfant
Travailler et être parent : un défi quotidien. Un enfant demande beaucoup d'attention et on se reproche souvent de ne pas lui en offrir assez. Mais quels sont ses besoins réels ? Comment compenser les heures d'absence de la maison ?
"J'essaie d'être le plus présent possible. Mais quand je pars le matin et que mon bébé de 13 mois dort encore, ou que je dois travailler à la maison le week-end, je culpabilise". Comme de nombreux parents, Fabian a l'impression de manquer de temps pour son fils. Difficile de ne pas pouvoir répondre à toutes ses demandes. Difficile de ne pas assister à toutes les étapes de son développement.
En toile de fond, figure une peur pour l'avenir : "Je crains de ne pas construire une vraie relation avec lui". Mais qu'en est-il des besoins réels de l'enfant ? Le Dr Agnès Pargade, pédopsychiatre, se veut rassurante. "Aujourd’hui, pour être des parents parfaits, on a l’impression qu’il faut lui consacrer tout notre temps… C’est faux". En se gardant du temps pour d'autres activités, on met toutes les chances de son côté pour se sentir bien. Et ainsi instiller du bonheur, de la joie dans la maison : rires, déguisements, jeux, etc. Le bien-être est communicatif.
Privilégier des moments forts
Plutôt que de culpabiliser outre mesure, la spécialiste conseille de soigner les moments partagés qui doivent rythmer la journée. "Je trouve que le petit-déjeuner est un temps important pour toute la famille. On se demande comment on a dormi, on se détaille ce que l’on va faire aujourd’hui… On est frais, disponible. Quitte à avancer son réveil d’un quart d’heure".
En début de soirée, le bain est aussi un moment de détente. "Le parent peut boire un thé en même temps". Quant au dîner, parfois compliqué à cause de rivalité dans la fratrie, de la télé allumée… on prévoit au moins une fois dans la semaine d’en faire un moment de plaisir, autour d’un bon plat qui fait l’unanimité et en évoquant les projets de la famille, un bilan des jours écoulés, etc.
Suit pour les plus jeunes un moment de lecture, en alternance entre les deux parents. "Une vingtaine de minutes, pas plus. L’enfant doit aussi savoir qu’il n’est pas le centre du monde et que les parents consacrent le reste de la soirée à leur couple… ou à eux-mêmes".
Enfin, les vacances sont une occasion à saisir pour resserrer les liens. À condition de se déconnecter et de tout faire pour que ces moments soient réussis. Se libérer du temps dans son agenda pour sa famille ne suffit pas : il faut adopter le bon état d'esprit.
Gérer les priorités
Pas forcément évident, quand on dispose d'une liste de corvées à faire plus longue que le bras. Mino, mère de trois enfants, a connu les journées surchargées, avec deux heures de transport par jour pour se rendre au travail. Pour redonner sens à sa vie, elle s'est intéressée au minimalisme :
- Première étape : le désencombrement drastique de son intérieur : "J'ai réalisé que c'était la solution pour moi. J'avais moins de choses à m'occuper. En diminuant le nombre d'objets, le temps de ménage est plus court. On a beaucoup d'automatisme dans nos vies et on ne prend pas assez de recul pour voir si on a vraiment besoin de tout cela" ;
- Deuxième étape : mais le minimalisme ne s'arrête pas au matériel. Mino recommande de s'atteler à mieux se connaître et de déterminer son essentiel. "Par exemple, on prend du temps pour des relations qui ne nous apportent rien. Tout en disant aux enfants "Attends, je suis occupée". Ce n'est pas normal. La gestion du temps, c'est une gestion des priorités !". En passant au peigne fin son agenda, on supprime aussi des activités, devenues habituelles, qui ne nous correspondent plus.
Etre "suffisamment bon"
"Les parents ne doivent pas s'obliger à voir tous les matchs de leur petit footballeur, mais juste un match important, confirme le Dr Agnès Pargade. Surtout, il faut être présent lorsqu'il va mal (maladie, rupture sentimentale, difficultés scolaires... Et puis, il faut se dire qu'on fait ce qu'on peut !". Elle rappelle le concept de "mère suffisamment bonne" du psychanalyste Donald Winnicott. Les enfants n'ont pas besoin de parents idéaux pour bien se construire.
Fabian, le jeune papa fatigué, le reconnaît : "On a l'impression de ne jamais en faire assez". La priorité ? Faire des choix de vie éclairés, sans s'épuiser, qui respectent les priorités de chaque membre de la famille. L'équilibre commun doit se construire sans culpabilité ni remord.