Laurent Petrynka : "Le sport sauvera l'humanité" face à une espérance de vie en baisse

AFP/Relaxnews Agence de Presse

Président de la Fédération Internationale du sport scolaire et membre de la commission d'éducation olympique du CIO, Laurent Petrynka a toujours mis un point d'honneur à ce que le sport fasse partie intégrante de sa vie. Dans son livre "Le Sport sauvera l'humanité !", il s'engage à étendre cet objectif à celles des autres, en particulier des jeunes. Entretien.

Face à la sédentarité croissante, en quoi le monde aujourd’hui est-il plongé dans une urgence sanitaire ?

J’ai toujours été témoin de ce besoin et des demandes à propos du sport, y compris à l’école. Mais, depuis peu il y a eu un déclic. Les chiffres parus dans l’étude "inverser les courbes" du cardiologue François Carré me sidèrent…Pour la première fois de l’histoire de l’humanité, on constate que l'espérance de vie diminue, alors qu'elle a toujours été en progrès. Les jeunes ont perdu 40% de leurs capacités cardio-vasculaires en seulement 25 ans. Nous sommes dans une situation dramatique à cause de cette inversion de la courbe de l’espérance de vie. Il y a donc un caractère d'urgence, notamment sportive, qui vient du fait qu’il n'est pas du tout pris en compte, du moins pas assez sérieusement. Dans la pyramide des besoins, on devrait mettre la vie et la sécurité en première position. Certes, il y a d’autres éléments importants, comme la culture, l'épanouissement, l’économie, les loisirs etc. Mais, les plus essentiels restent la santé et la sécurité pour ne pas mourir. A l’heure actuelle, l’absence de sport attaque la durée de vie et c'est très grave !

En quoi le sport se présente-t-il comme la seule solution, ou du moins la plus efficace, pour inverser cette courbe de l’espérance de vie en baisse ? 

Le sport est quasiment le seul moyen de lutter contre cette urgence car il permet un certain équilibre sur tous ces aspects de santé. Certes, il est possible de vivre sans le sport, avec une bonne hygiène de vie et une bonne alimentation, mais il n'y a nul autre que le sport pour résoudre ce problème sanitaire. D’abord, il permet de se faire des amis, de comprendre les autres, et de rentrer dans des aspects de relations plus sereines mais aussi, et surtout, de rentrer dans des aspects de santé plus saine. 

L’aspect social rentre également dans l’équation. En quoi cela est-il un problème majeur ?

Il y a forcément un aspect social qui est entremêlé à la sédentarité. Même si ça ne touche pas que les classes les plus socialement défavorisées, c’est tout de même sur elles que les concentrations sont. L’accès aux clubs de sport reste assez cher dans certains endroits. La possibilité d’emmener les enfants en clubs est une difficulté. Pour les parents, cela demande de l’argent et du temps, hors des horaires de travail. Il y a donc un aspect social très important tout aussi inquiétant, notamment sur l’accès et, tout simplement, la chance que l’on donne aux enfants de pratiquer du sport.

Pourtant, la nouvelle génération semble s’intéresser au sport, et plus largement au domaine du bien-être. Sur les réseaux sociaux, les contenus liés à ces sujets abondent. Comment expliquer ce paradoxe ?

Il y a une augmentation d’inscriptions et de licences dans les clubs à l'issue d’un grand événement sportif. Que ce soit la Coupe du Monde ou les Jeux Olympiques, il reste un lien entre ce qu’on voit sur les écrans ou dans les grandes compétitions internationales et la pratique des jeunes à l’échelle mondiale. Mais, du côté digital, il y a une responsabilité à avoir sur le contenu proposé. Il faut que la mise en scène soit accompagnée de messages forts. La transformation ne peut se mettre en place que par le faire. Il y a aussi une responsabilité au niveau collectif, des gouvernements, des associations et des fédérations de ne pas aller faire une hyper-digitalisation.

Nous, Fédération Internationale, nous prenons avec beaucoup de prudence, parfois avec opposition, tous les aspects de l’e-sport. Quand on voit Mbappe ou Platini jouer au football, on a envie de faire comme eux. Alors qu’un gamer, qui fait des millions de vues, va donner envie aux jeunes de jouer aux jeux vidéo. Le e-sport ne me semble donc pas être la solution pour mettre les jeunes en activité. Et, même si le fitness a vu une augmentation ces dernières années, c’est un domaine difficile d’accès pour les jeunes. Bien que certaines salles de musculation proposent des tarifs plus abordables et s’implantent maintenant en banlieues, elles restent inaccessibles pour les enfants et pour les adolescents.

** Laurent Petrynka, "Le sport sauvera l'humanité !", Débats publics, 2024, 18€.

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