Troubles de l'érection : quels sont les effets secondaires des médicaments ?
Les médicaments inducteurs de l'érection, apparus sur le marché en 1998, sont désormais largement utilisés dans le monde entier. Les doutes initiaux sur leur tolérance ont depuis fait place à une grande confiance du corps médical, en raison des nombreuses études observationnelles effectuées.
Les effets secondaires sont-ils fréquents ? Quels sont-ils ? Sont-ils dangereux ? Entraînent-ils l'arrêt du traitement ? Comment les minimiser au mieux ? Les réponses des scientifiques.
De nombreuses études rassurantes sur la tolérance de ces médicaments
Depuis une vingtaine d'années, les médecins disposent de médicaments efficaces contre les troubles de l'érection. Il s'agit du sildénafil (Viagra ®), du tadalafil (Cialis ®) et du vardénafil (Levitra ®). Ce sont tous trois des inhibiteurs de la phosphodiestérase PDE5, enzyme qui normalement dégrade les substances émises en cas d'excitation et qui permettent l'érection (voir notre animation : "Le mécanisme de l'érection en images").
Cette mise sur le marché a été précédée de nombreuses études, d'abord sur l'animal puis sur l'homme. Depuis leur commercialisation, de nouvelles études ont été réalisées, afin d'étudier l'impact de ces médicaments dans différentes circonstances : hommes plus ou moins âgés, origine de la dysfonction érectile, antécédents cardiovasculaires, etc.
Alors qu'initialement les patients et les médecins étaient réticents à utiliser ces produits, ces différents travaux scientifiques ont permis de vérifier la bonne tolérance de ces médicaments, à condition d'en respecter les contre-indications. Cela explique que leur prescription soit désormais rentrée dans les mœurs médicales, ce qui a révolutionné la prise en charge de la dysfonction érectile.
Des effets secondaires modérés n'entraînant pas l'arrêt du traitement
Malgré ce changement de paradigme, les notices des différents médicaments prescrits par le médecin en cas de troubles de l'érection peuvent cependant encore rendre dubitatifs les utilisateurs. En effet, elles comportent une longue liste d'effets indésirables. Mais c'est le cas également de la plupart des médicaments, les fabricants se devant de répertorier tous les effets indésirables possibles, mêmes ceux qui sont minimes, rarissimes ou déclenchés uniquement en présence de circonstances très particulières.
En pratique, les effets secondaires de ces traitements sont donc le plus souvent "légers à modérés et transitoires" 1, selon le Dr Alexander Tsertsvadze et ses collègues de l'Université d'Ottawa, qui ont récemment analysé 222 études, dont 161 études rigoureuses portant sur l'un ou l'autre de ces trois produits (ou comparant les trois).
D'ailleurs, l'éventuelle survenue d'effets secondaires ne provoque en général pas l'arrêt du traitement : seulement 0,5 à 3,8 % (selon les études) des utilisateurs ont stoppé la prise d'un de ces trois médicaments en raison d'effets secondaires 1 !
Des effets indésirables vasculaires, digestifs ou musculo-squelettiques
Les effets secondaires les plus fréquents sont les maux de tête (10 à 14 % des utilisateurs en fonction du produit), la rougeur du visage (4 à 11 %) et la survenue de douleurs au niveau de l'estomac (4 à 7 %). Peuvent également survenir des douleurs musculaires, un mal de dos, des troubles de la vision ou encore une sensation de nez bouché1.
L'analyse de ces 161 études estime le risque d'incident cardiaque "sérieux", si redouté à la fin des années 90, à 0,5 % avec le sildénafil, soit légèrement supérieur au risque sous placebo (0,1 %). Par contre avec le vardénafil (0,2 %) et le tadalafil (0,3 %), le risque est similaire à celui du placebo (0,1 à 0,2 %)1.
D'une manière générale, le risque d'"effets indésirables sérieux", cardiovasculaires ou autres, sous vardénafil, tadalafil ou sildénafil, est d'1 % en moyenne, chiffre similaire avec la prise d'un placebo 1.
Attention en cas de problème cardiovasculaire grave ou récent
Même si le risque d'effet secondaire "sérieux" est léger, il faut en tenir compte, en particulier chez les personnes aux lourds antécédents cardiaques. Raison pour laquelle ces trois médicaments sont contre-indiqués en cas :
- D'infarctus du myocarde récent (moins de 3 mois) ;
- D'accident vasculaire cérébral de moins de 6 mois ;
- D'angine de poitrine instable ;
- D'insuffisance cardiaque sévère ;
- De troubles du rythme ;
- Ou d'hypertension artérielle non contrôlés 2.
En cas d'antécédents cardiovasculaires notables, c'est donc le médecin traitant qui peut juger de la pertinence de ce traitement. En pratique, la prise de tels médicaments est possible en cas de troubles cardiaques "modérés ou intermédiaires" 3.
Les autres contre-indications sont la prise concomitante de dérivés nitrés (risque d'hypotension) et l'hypersensibilité (allergie) à la molécule (rare) 2.
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L'importance d'une bonne utilisation
Autre facteur pouvant majorer le risque de survenue d'effets indésirables, la mauvaise utilisation : prendre une dose double ou triple de celle prescrite, l'associer à la prise d'autres produits non déclarés au médecin, etc.
Attention aux surdoses
En janvier 2019, un homme a perdu la vue après une surconsommation de sildénafil, le composé actif du viagra. Cet homme du Massachusetts a bu une bouteille entière de sildénafil liquide (il ne s’agit pas du Viagra ® qui n’est pas vendu sous forme liquide). Le cinquantenaire a ainsi consommé 750 milligrammes de sildénafil, soit près de 10 fois la dose recommandée.
L’homme s’est plaint de photophobie (intolérance à la lumière), une difficulté à voir la nuit et des tâches sur son champ de vision avec la forme d’un "doughnut". Les symptômes de photophobie et d’une baisse de la vision nocturne se sont améliorés mais pas les taches. Deux mois plus tard, il finira par consulter un ophtalmologiste. Les tests ont montré une atteinte des cellules de la rétine. Pour ce type de problème, il n’existe pas de traitement. Le patient n’est pas revenu à la clinique et on ne sait donc pas si sa vision s’est finalement améliorée.
Agissant sur une enzyme appelée phosphodiestérase 5 (PDE5), le médicament agit sur la régulation du flux sanguin vers le pénis. Mais ce même composé actif inhibe également une autre enzyme : la phosphodiestérase de type 6 (PDE6), que l'on trouve dans les cellules rétiniennes. A trop fortes doses, cette inhibition peut entraîner la formation d’une molécule toxique pour les cellules rétiniennes.
Par ailleurs les boîtes mails sont depuis quelques années inondées de spams proposant des médicaments inducteurs de l'érection à des prix défiant toute concurrence. Or il s'agit souvent de faux ne contenant pas de principe actif ou mal dosés, parfois dangereux, coupés avec d'autres substances responsables d'effets indésirables (voir notre article : "Cialis ®, Viagra ® : méfiez-vous des contrefaçons !"). D'ailleurs en France, l'achat et la vente de médicaments sur Internet ou par correspondance sont illégaux et strictement interdits.
En conclusion, les médicaments inducteurs de l'érection sont utilisés depuis plus de 20 ans dans le monde entier sans effet secondaire majeur répertorié. Les effets indésirables constatés par une partie des utilisateurs sont en général mineurs et transitoires, n'empêchant pas, dans plus de 95 % des cas, la poursuite du traitement. Il est par contre important de consulter son médecin traitant pour une prescription adaptée aux troubles, et d'acheter le médicament prescrit en pharmacie.