Fibrome. L'embolisation artérielle utérine, une technique sans bistouri
Touchant près de 70% des femmes de 45 ans, les fibromes utérins peuvent parfois devenir problématiques : douleurs pelviennes, règles abondantes… Pour les prendre en charge, la chirurgie est souvent nécessaire. Mais, une alternative existe : l'embolisation du fibrome utérin (EFU). On fait le point sur cette technique qui tend à remplacer l'hystérectomie aux États-Unis et au Canada.
Développée initialement pour traiter les hémorragies de la délivrance, l'embolisation artérielle permet de traiter les fibromes sans recourir à une chirurgie lourde.
Des microbilles dans un cathéter pour affamer les fibromes
Mise au point au début des années 1990 à l'hôpital Lariboisière de Paris par les équipes de gynécologie et de radiologie, l'embolisation consiste à injecter des microbilles synthétiques dans les artères de l'utérus. Cette opération se fait par l'intermédiaire d'un fin cathéter d'environ 1 millimètre de diamètre, introduit sous anesthésie locale.
En recevant le sang venant des artères utérines, le fibrome aspire également les billes (ou sphères d'embolisation de 500 à 1 000 microns de diamètre). Et, celles-ci vont venir boucher ses canaux d'approvisionnement et littéralement l'asphyxier. Le fibrome se nécrose alors et rétrécit.
Cette technique permet de bloquer la vascularisation de tous les fibromes aussi nombreux et petits soient-ils, évitant ainsi les risques de récidive.
Une technique pluridisciplinaire
L'embolisation artérielle nécessite une approche pluridisciplinaire du traitement en mettant à contribution radiologue et gynécologue.
Un radiologue vasculaire interventionnel peut réaliser cette intervention. Ce professionnel de santé est spécialement entraîné à la navigation dans les vaisseaux et aux traitements par voie radiologique. Une petite piqûre est pratiquée au niveau du pli de l'aine sous anesthésie locale et le cathéter est introduit.
Sous contrôle radiologique, il va naviguer jusqu'aux vaisseaux sanguins qui nourrissent le fibrome utérin. Les sphères d'embolisation sont alors libérées et s'accumulent jusqu'au blocage du flux sanguin.
Le radiologue surveille la progression de ces particules. En fonction du nombre de fibromes et de leurs positions, l'intervention dure entre 40 minutes et deux heures.
L'hospitalisation dure 1 à 3 jours et la convalescence n'excède pas une petite semaine.
Embolisation artérielle ou hystérectomie ?
L'embolisation peut être proposée à des femmes jeunes, qui souhaitent conserver leur utérus (notamment dans l'optique d'une grossesse). "Certaines femmes ne peuvent pas supporter l'idée d'avoir encore des tumeurs en elles et préfèreront une myomectomie (ablation des fibromes par chirurgie) voire une hystérectomie (ablation de l'utérus). Mais d'autres ne veulent pas perdre leur utérus, c'est pourquoi il faut intégrer l'embolisation dans l'information préopératoire" explique le Dr Larousserie, gynécologue obstétricien de l'Hôpital des 4 villes à Sèvres. Cette intervention peu invasive préserve l'état de l'utérus, contrairement à la myomectomie qui peut rendre l'utérus cicatriciel et donc impropre à une grossesse. De nombreuses femmes ayant des fibromes et subi une embolisation ont eu par la suite des enfants.
L'hystérectomie est à privilégier pour les femmes d'un âge plus proche de la ménopause et/ou qui ne souhaitent plus avoir d'enfants.
L'embolisation reste une alternative et non pas un remplacement de l'hystérectomie. L'indication médicale se fait au cas par cas, selon l'âge, le désir de grossesse, le nombre et la taille des fibromes...
Les bénéfices de l'embolisation artérielle
La plupart des études montrent que 78 à 94 % des femmes traitées par embolisation présentent une amélioration nette ou une guérison totale des hémorragies, des douleurs et autres symptômes.
Trois mois après l'intervention, on observe une nette réduction du volume du fibrome. Selon deux études américaines 1, 2, la normalisation des règles serait obtenue dans 85 % des cas, la réduction du volume de l'utérus est de 45 % en moyenne, le taux d'échecs est de 5 à 10 % alors que près de 90 % des patientes seraient satisfaites du résultat et recommanderaient l'embolisation à d'autres femmes.
Les résultats d'une étude menée en 2006 aux Pays Bas3 montrent que les femmes ayant subi une embolisation souffrent moins durant les 24 heures qui suivent l'opération, et reprennent plus rapidement une activité quotidienne normale, que celles qui ont subi une hystérectomie. La majorité des femmes reprennent leur activité au bout d'une semaine, contre deux à quatre semaines de convalescence pour une myomectomie et quatre à six semaines pour une hystérectomie.
Une autre étude, française cette fois5, a pour sa part montré une amélioration très importante du score de sexualité (incluant les aspects psychologiques comme le désir et fonctionnels comme la lubrification et l’orgasme) des femmes traitées par embolisation.
Embolisation artérielle : de rares complications
- Des douleurs pelviennes sont fréquentes après l'embolisation, elles peuvent être traitées par des anti-inflammatoires ou des antalgiques. Du fait des crampes parfois violentes, la patiente demeure généralement une ou deux nuits à l'hôpital où elle reçoit un traitement intraveineux contre la douleur.
- Plus rares, d'autres complications passagères peuvent intervenir : fièvre, nausées...
- Parmi les complications plus rares, on peut noter des cas d'aménorrhée (arrêt des règles, même si dans 80 % des cas les règles réapparaissent dès le cycle suivant l'opération), d'infection généralement enrayée par un antibiotique ou encore une nécrose de l'utérus qui entraîne alors l'hystérectomie que l'on cherchait à éviter.
L'embolisation reste une opération, et ne bénéficie donc pas d'un risque nul, mais le risque de mortalité lors de cette intervention reste 10 fois inférieur à celui lié à une l'hystérectomie.
Le risque de complications pour une embolisation est de 19 % tandis qu'il est de 26 % pour une hystérectomie4. Les décès survenus à la suite de complications d'une embolisation, sont dus soit à des septicémies survenant chez des femmes ayant des antécédents d'infections gynécologiques et qui ont tardé à consulter soit à des embolies. Pour éviter ces dernières, des anticoagulants peuvent être administrés à la femme les jours suivants l'intervention.