Puberté précoce : un produit chimique dans les soins du quotidien pointé du doigt par des chercheurs

Magali Régnier Journaliste

Depuis plusieurs décennies, l’âge de la puberté chez les jeunes filles diminue à un rythme alarmant, sans que les scientifiques ne se l’expliquent. Mais de nouvelles recherches suggèrent qu’un composé présent dans une grande variété de produits (cosmétiques, détergents, savons...) pourrait envoyer un signal à une zone du cerveau qui déclencherait prématurément le début de la puberté.

Des pubertés de plus en plus précoces

La puberté dite très précoce (avant 8 ans pour les filles et 9 ans pour les garçons), peut avoir des effets sur la santé qui perdurent à l’âge adulte, notamment des risques plus élevés de cancer du sein, de diabète et de maladies cardiovasculaires. Elle peut également entraîner une taille plus petite chez les filles comme chez les garçons.

En mai dernier, déjà, une étude de la Harvard TH Chan School of Public Health a révélé que 15,5 % de filles avaient leurs règles avant 11 ans et 1,4 % d’entre elles avaient leurs premières règles avant 9 ans. Des facteurs génétiques ne peuvent pas à eux seuls expliquer cette évolution. Ni le surpoids de plus en plus fréquent, comme évoqué un temps. Des chercheurs de la National Institute of Environmental Health Sciences ont donc déduit qu’une partie du problème pourrait provenir de l’environnement.

L'ambrette, un produit courant dans les cosmétiques

Après avoir passé au peigne fin près de 10 000 composés dans une bibliothèque de produits pharmaceutiques, de produits chimiques environnementaux et de compléments alimentaires autorisés, les chercheurs ont ainsi découvert plusieurs composés susceptibles d'influencer la survenue de la puberté. Mais les enfants étaient plus susceptibles d'être exposés à un seul d'entre eux : le musc ambrette, selon le rapport publié dans Endocrinology.

Ce musc ambrette ou ambrette, une forme synthétique du parfum largement utilisée dans les parfums bon marché et les produits d'hygiène, pourrait ainsi se fixer sur un récepteur lié à la puberté dans l'hypothalamus. Selon les scientifiques, il entraînerait la libération de GnRH, une hormone impliquée dans la maturation des organes sexuels et la production d'œstrogène, de testostérone et de progestérone.

Les chercheurs ont alors testé l’impact de l’ambrette sur les cellules hypothalamiques humaines et sur les larves de poisson zèbre. Ils ont découvert que dans les larves de poisson et dans les cellules humaines, le composé déclenchait la production de GnRH.

Eviter les produits de soin parfumés

Pour le Dr Natalie Shaw, auteur et endocrinologue pédiatrique à l'Institut national des sciences de la santé environnementale de Durham, en Caroline du Nord, cette nouvelle étude n’est qu’un point de départ. De prochaines études menées sur les mammifères devraient voir le jour rapidement.

Les réglementations canadiennes et européennes limitent l’utilisation du musc ambrette en raison de sa toxicité potentielle, tout comme la France qui a listé le composé parmi les substances qui ne peuvent entrer dans la composition des produits cosmétiques. Pourtant, il serait toujours disponible sur le marché dans certains produits de soins personnels.

En attendant de pouvoir confirmer cette découverte, la pédiatre suggère aux parents de vérifier les listes d'ingrédients de tous les cosmétiques, parfums et produits ménagers que leurs enfants pourraient utiliser. La précaution la plus évidente serait aussi de se passer autant que possible de parfums pour enfants, de gels douche et de savons parfumés.

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