Gonorrhée : les vaccins contre la méningite efficaces pour la prévenir ?
Infection sexuellement transmissible, la gonorrhée est de plus en plus résistante aux médicaments capables habituellement de la traiter. Les vaccins contre la méningite pourraient être une solution pour limiter cette pathologie et aider à s’en protéger, selon une récente étude. Pour le Dr Gérald Kierzek, il est important de rappeler les règles de prévention de cette IST, à savoir le port du préservatif.
Les cas d’infections sexuellement transmissibles (IST) et en particulier de gonorrhées, augmentent à travers le monde. En cause, la baisse de l’efficacité des traitements médicamenteux contre la bactérie responsable de la maladie et l’absence de vaccin homologué pour prévenir de cette infection. A travers le monde, en 2020, plus de 80 millions de nouveaux cas de gonorrhées ont ainsi été comptabilisés.
Une infection responsable de graves problèmes de santé
Causée par une bactérie baptisée Neisseria gonorrhoeae, la gonorrhée cause des douleurs et des écoulements purulents des parties intimes. Elle peut provoquer une infertilité chez la femme, mais aussi faciliter la contamination au VIH et se transmettre de la mère à l’enfant.
Les traitements contre cette bactérie étant moins efficaces, les scientifiques se posent la question du traitement et de la prévention de cette IST pour les années à venir, qui pourrait devenir incurable. Trois études montrent l’intérêt d’un vaccin contre la méningite.
Une certaine protection offerte par ces vaccins
D’après l’Organisation mondiale de la santé, les vaccins contre la méningite ont montré une protection partielle qui pourrait réduire considérablement les cas d'infection. Le vaccin 4CMenB en particulier, peut offrir une protection significative aux jeunes adultes et aux hommes ayant des rapports sexuels avec des hommes. C’est la population qui serait la plus à risque d'infection et ce vaccin "pourrait les protéger à 40 % contre les gonorrhées".
Trois études pour confirmer cette protection
Trois études sont rapportées comme ayant étudié ce vaccin et sa protection contre les gonorrhées.
40% de protection pour deux doses de vaccin
La première étude a été dirigée par le Dr Winston Abara, des Centers for Disease Control and Prevention (CDC) des États-Unis. Les chercheurs ont observé les dossiers de santé de jeunes âgés de 16 à 23 ans vivant à New-York et Philadelphie pour déterminer leur statut vaccinal au 4CMenB et les cas confirmés de gonorrhées et chlamydia. Leurs conclusions montrent qu’une vaccination complète au 4CMenB – recevant deux doses – offrait une protection de 40% contre la gonorrhée. Une dose de vaccin a, pour sa part, fourni une protection de 26 %. Selon le Dr Winston Abara, "les résultats suggèrent que les vaccins contre la méningite qui ne sont même que modérément efficaces pour protéger contre la gonorrhée pourraient avoir un impact majeur sur la prévention et le contrôle de la maladie". Les auteurs reconnaissent toutefois des limites, en raison du groupe choisi (âge jeune et population urbaine seulement) et de potentielles erreurs sur le statut vaccinal des volontaires.
33% de protection par le vaccin
La deuxième étude observationnelle a été dirigée par le professeur Helen Marshall, du Women's and Children's Hospital d'Adélaïde, en Australie. Les chercheurs ont évalué l’efficacité du 4CMenB contre la gonorrhée dans le cadre d’un programme de vaccination des nourrissons des enfants et des adolescents. Plus de 53 000 adolescents et jeunes adultes ont reçu le traitement vaccinal. Leurs conclusions notent que le "traitement à deux doses de 4CMenB est efficace à 33 % contre la gonorrhée chez les adolescents et les jeunes adultes". Les limites de ce travail sont mentionnées par les chercheurs, qui notent un faible nombre de cas de gonorhées en lien avec le petit nombre de cas dans ce groupe d’âge.
Plus de 110 000 cas évités
La troisième étude est une modélisation portant à la fois sur la rentabilité de l’utilisation d’un vaccin contre les gonorrhées et l’impact sur la santé de la population. Dirigée par le professeur Peter White de l’Imperial College London au Royaume-Uni, elle analyse les effets sanitaires et économiques de l’utilisation d’un vaccin pour prévenir ce type d’infections. Pour les scientifiques, la vaccination basée sur le risque d'infection pourrait prévenir 110 000 cas en Angleterre et économiser 8 millions de livres sterling sur 10 ans. Pour le professeur Peter White, "avec un vaccin spécifique à la gonorrhée susceptible de prendre des années à se développer, une question clé pour les décideurs est de savoir si le vaccin contre la méningite 4CMenB doit être utilisé contre l'infection à la gonorrhée. Notre analyse suggère que l'administration du vaccin aux personnes les plus exposées au risque d'infection est le moyen le plus rentable d'éviter un grand nombre de cas".
"Ne pas relâcher la prévention et le port du préservatif"
Trois études qui donnent matière à réfléchir en termes d’efficacité vaccinale et politique de santé publique et de prévention. Interrogé sur la question, le Dr Gérald Kierzek, médecin urgentiste et directeur médical de Doctissimo note aussi dans sa pratique professionnelle une recrudescence des infections sexuellement transmissibles. "Dans ces pathologies, les bactéries sont globalement plus résistantes et les traitements moins efficaces. C'est donc une bonne chose de s'intéresser aux vaccins qui permettront de limiter un tant soit peu les contaminations, mais ce développement ne doit pas se faire au détriment de la prévention, à savoir le port du préservatif, qui demeure la seule barrière efficace contre les IST".