• Actualités
  • Guérison inattendue du VIH : pourquoi ce cas unique bouleverse la recherche

    Publié le  , mis à jour le 
    Lecture 3 min.
    David Bême
    David Bême Rédacteur en chef

    Un patient guéri du VIH sans mutation CCR5, un tournant inattendu pour la science

    Dans une avancée médicale surprenante, un nouveau patient atteint du VIH semble être en rémission durable après une greffe de moelle osseuse. Ce cas, survenu en Suisse, ébranle la communauté scientifique en raison de l’absence d’une mutation génétique normalement associée aux guérisons du VIH.

    L’histoire de cet homme, âgé de 53 ans, marque un tournant potentiel dans la lutte contre cette maladie. Mais comment expliquer un tel phénomène, et surtout, quelles pistes thérapeutiques cela ouvre-t-il ?

    La suite après cette publicité

    7 cas de guérison dans le monde

    Dans le monde, 7 personnes (deux patients de Berlin, de Londres, de Düsseldorf, de New York, de City of Hope et de Genève) sont considérées comme probablement guéries ou en rémission durable de l’infection par le VIH après avoir reçu une greffe de moelle pour le traitement d’un cancer du sang.

    Mais le dernier patient, Romuald, est le seul à avoir connu une telle rémission du VIH suite à une greffe de moelle osseuse non porteuse de la mutation CCR5 delta 32. Cette mutation génétique rare est connue pour rendre les cellules CD4 naturellement résistantes au VIH.

    La suite après cette publicité

    Un cas de guérison rare et fascinant

    En 2018, cet homme, infecté par le VIH depuis les années 1990, a subi une greffe de moelle osseuse dans le cadre du traitement d’une leucémie agressive. Ce type de greffe, associée à des patients atteints de leucémie ou de lymphome, a parfois conduit à des guérisons du VIH dans des cas très spécifiques. En général, cela est possible lorsque le donneur de moelle possède une mutation rare dans le gène CCR5, rendant ses cellules immunitaires résistantes au virus. Or, dans ce cas précis, le patient ne présentait pas cette mutation protectrice.

    Après l’arrêt de son traitement antirétroviral en novembre 2021, les tests effectués sur lui ont confirmé l’absence de charge virale détectable, même après 20 mois sans traitement. Selon les chercheurs de l’Institut Pasteur, responsables de l'étude, ce cas constitue "la première rémission durable documentée sans la mutation CCR5", ce qui défie les théories classiques sur la guérison du VIH.

    La suite après cette publicité

    Une nouvelle piste vers la guérison du VIH

    Alors que le cas de cet homme suit celui des patients surnommés "le patient de Berlin" ou "le patient de Londres", tous guéris grâce à des greffes de moelle, cette nouvelle rémission s’avère différente. En effet, l'absence de mutation génétique protectrice dans ce cas intrigue profondément les experts. Comme l'explique le Dr Asier Sáez-Cirión de l’Institut Pasteur, cela nous ouvre de nouvelles pistes quant aux mécanismes du contrôle du VIH par le système immunitaire.

    La greffe de moelle osseuse a, semble-t-il, entraîné un profond remaniement de son système immunitaire, permettant à l'organisme de contrôler le virus de manière autonome. Le défi est désormais de comprendre comment cet équilibre s'est installé. Les scientifiques soulignent que le virus pourrait encore être présent dans le corps, mais qu'il serait incapable de se répliquer.

    La suite après cette publicité

    Un espoir pour de nouveaux traitements

    Si la greffe de moelle osseuse reste un traitement lourd et risqué, ces résultats pourraient orienter les recherches vers de nouvelles approches pour traiter le VIH sans greffe, en ciblant directement la réponse immunitaire.

    Toutefois, il est important de rappeler que cette méthode ne peut pas être généralisée à tous les patients atteints du VIH. Le nombre de patients en rémission après une greffe de moelle reste extrêmement réduit. Une greffe de moelle osseuse reste très lourde et risquée, inenvisageable pour la majorité des porteurs du virus. À ce jour, seulement sept cas de guérison potentielle du VIH ont été recensés, et tous concernaient des patients ayant subi des greffes pour traiter un cancer.

    La suite après cette publicité

    Le mystère de la rémission sans mutation

    Le fait que ce patient suisse ait atteint une rémission durable sans la mutation CCR5 jette un regard neuf sur la manière dont le VIH peut être contrôlé ou même éradiqué. Pour les chercheurs, cela suggère que d’autres facteurs, encore inconnus, sont en jeu. Cela relance également l’idée que le corps humain pourrait, dans des circonstances particulières, parvenir à contrôler le virus sans l’aide des mutations habituellement étudiées. En attendant d’avoir une explication prouvée, les chercheurs avancent des hypothèses :

    • La présence de cellules de l’immunité innée à fort potentiel anti VIH pourrait contrer l’éventuel rebond du virus à partir des quelques cellules infectées qui pourraient rester dans l’organisme ;
    • D’autre part, le traitement immunomodulateur que reçoit ce patient pour contrôler les réactions greffon contre hôte, expérimentées à répétition depuis la greffe, pourrait contribuer à éviter la réactivation virale ;
    • Finalement, ces réactions greffon contre hôte pourraient avoir mené à une élimination tellement efficace du réservoir viral que la mutation CCR5 delta 32 n’est plus nécessaire car plus aucun virus capable de se multiplier ne resterait dans l’organisme. Ces hypothèses ouvrent d’importantes pistes de recherche visant la rémission de l’infection par le VIH.

    Les chercheurs espèrent que ce cas mènera à des avancées dans la compréhension des mécanismes de l’immunité contre le VIH. Mais il faudra encore beaucoup de recherches pour déterminer si ces nouvelles pistes peuvent conduire à des traitements plus accessibles et moins invasifs pour les millions de personnes vivant avec le virus à travers le monde.


    Sources
    • Sáez-Cirión, A., Mamez, AC., Avettand-Fenoel, V. et al. Sustained HIV remission after allogeneic hematopoietic stem cell transplantation with wild-type CCR5 donor cells. Nat Med (2024). https://doi.org/10.1038/s41591-024-03277-z
    Partager sur :

    Newsletter Bien Vieillir

    Recevez nos dernières actualités pour rester en forme

    Doctissimo, met en oeuvre des traitements de données personnelles, y compris des informations renseignées dans le formulaire ci-dessus, pour vous adresser les newsletters auxquelles vous vous êtes abonnés et, sous réserve de vos choix en matière de cookies, rapprocher ces données avec d’autres données vous concernant à des fins de segmentation client sur la base de laquelle sont personnalisées nos contenus et publicités. Davantage d’informations vous seront fournies à ce sujet dans l’email qui vous sera adressé pour confirmer votre inscription.

    Merci de votre confiance

    Découvrez toutes nos autres newsletters.

    Découvrir