Procrastination : et si tout se jouait dans le cerveau ?
On le sait bien : les procrastinateurs ont tendance à toujours tout remettre au lendemain…Mais pourquoi adoptent-ils ce comportement ? Une équipe de chercheurs de l’Inserm, du CNRS, de Sorbonne Université et de l’AP-HP au sein de l’Institut du Cerveau à Paris s’est penché sur la question afin de mieux comprendre son origine, dans le cerveau. Leurs résultats sont publiés dans la revue Nature Communications.
Vous avez tendance à procrastiner sans savoir pourquoi ? Des chercheurs français ont peut-être compris d’où vient ce mécanisme étrange, qui pousse certains individus à toujours remettre ce qu’ils doivent faire au lendemain.
Des volontaires étudiés par IRM
Pour comprendre cette attitude, somme toute inconfortable et parfois culpabilisante, les scientifiques français ont étudié une cohorte de 51 personnes, qui ont été soumis à différents tests pendant que leur activité cérébrale était enregistrée par une IRM.
Chacun des volontaires devait par exemple attribuer de manière subjective une valeur à des récompenses, comme des fleurs ou un gâteau, mais aussi à des efforts, comme retenir un chiffre ou faire une série de pompes.
Une région cérébrale identifiée
Par la suite, les volontaires ont dû choisir entre deux options : obtenir une petite récompense rapidement ou une grande récompense plus tard, et faire un petit effort tout de suite ou réaliser un effort plus important plus tard.
Pour évaluer la procrastination des volontaires, deux types de tests leur ont été proposés : dans le premier, les participants devaient décider soit de produire un effort le jour même pour obtenir immédiatement la récompense associée, soit de produire un effort le lendemain et de patienter jusque-là pour obtenir la récompense.
Pour le second type de test, à leur retour chez eux, les participants devaient remplir plusieurs formulaires assez fastidieux et les renvoyer sous un mois maximum pour être indemnisés de leur participation à l’étude.
Le cortex cingulaire antérieur impliqué
En étudiant les images IRM, les chercheurs se sont rendus compte que la région du cortex cingulaire antérieur était impliquée.
"Les données d’imagerie ont révélé l’activation au moment de la prise de décision d’une région cérébrale appelée cortex cingulaire antérieur. Cette région a pour rôle d’effectuer un calcul coût-bénéfice en intégrant les coûts (efforts) et les bénéfices (récompenses) associés à chaque option" écrivent les scientifiques. Avec ces données et les réponses aux tests, ils ont pu établir un profil motivationnel pour chaque participant.
Modèle mathématique crée par les chercheurs
Tous ces éléments ont permis aux chercheurs de déterminer un modèle mathématique évaluant la prise de décisions.
"Notre modèle prend en compte les coûts et les bénéfices d’une décision, mais intègre également les échéances auxquelles ils surviennent" explique Raphaël Le Bouc, l’un des auteurs de ce travail. Ainsi, plus l’échéance est lointaine, moins l’effort paraît coûteux et moins la récompense semble gratifiante. "La procrastination pourrait être spécifiquement liée à l’impact du délai sur l’évaluation des tâches exigeant un effort. Plus précisément, elle peut s’expliquer par la tendance de notre cerveau à décompter plus vite les coûts que les récompenses" concluent les chercheurs.