Le surpoids et l’obésité à l’origine de 500 000 nouveaux cancers par an
Environ 3,6% des cancers diagnostiqués sur des adultes en 2012 seraient dus au surpoids ou à l’obésité. L’étude menée par des chercheurs du Centre international de recherche sur le cancer (Circ), à Lyon, s’est basée sur la répartition des indices de masse corporelle de la population mondiale en 2002 pour analyser l’apparition et la mortalité de 27 cancers en 2012.
L’étude publiée dans la revue “Lancet Oncology“, révèle qu’un demi-million de nouveaux cas de cancers chez les plus de 30 ans auraient un lien avec le surpoids ou l’obésité. Les chercheurs se sont appuyés sur une vaste base de données Globocan comportant l'incidence et la mortalité par cancer de 184 pays. Les chercheurs français sont partis des indices de masse corporelle (IMC) des participants en 2002 et l'ont lié à l’apparition de cancers... en 2012, soit 10 ans plus tard. La raison ? C’est que “le risque est souvent décalé dans le temps, et être trop gros aujourd’hui n’augmente pas le risque de se voir diagnostiquer un cancer aujourd’hui“, signale Catherine Hill, épidémiologiste à l’Institut Gustave-Roussy. L’obésité multiplie les risques de cancers de l'œsophage, du colon, du rectum, du foie, du pancréas, des reins, du sein postménopause, du corps de l'utérus et des ovaires.
Les femmes plus touchées que les hommes
Sans surprise, l’incidence de l’obésité sur l’apparition de cancers est plus significative dans les pays riches que dans les pays pauvres, le nombre d’obèses et de personnes en surpoids y étant plus important. Ainsi, c’est en Amérique du Nord et en Europe que 64% des cancers liés au surpoids ont été diagnostiqués. L’étude révèle que les femmes (5,4% des nouveaux cas de cancers) sont plus touchées que les hommes (1,9%), en raison du nombre élevé des cancers qui touchent exclusivement les femmes après la ménopause. Enfin, environ 118 000 cancers liés à un indice de masse corporelle (IMC) élevé auraient pu être évités si la population avait maintenu son poids de 1982.
Obésité et cancer : quel lien de cause à effet ?
Est considérée comme obèse, une personne dont l'IMC est supérieur à 30. Une personne en surpoids présente un IMC compris entre 25 et 30. Un rapport publié récemment par le McKinsey Global Institute prévient que si des actions ne sont pas menées par les gouvernements pour lutter contre l’obésité, celle-ci touchera 41% de la population mondiale en 2030. Des chiffres qui pourraient donc avoir une incidence sur l’évolution du nombre de cancers.
Mais reste à savoir quel est lien précis entre obésité et cancer. Pour le cancer du sein chez les femmes ménopausées, un lien a clairement été établi. Il faut savoir que les cellules adipeuses sont à l'origine de nombreuses substances, et notamment des hormones. Un excès de graisse va ainsi entraîner une surproduction hormonale aux effets délétères sur l'organisme. Une étude 1 a ainsi démontré que l'augmentation du risque de cancer du sein chez les femmes obèses était lié à la libération en excès d'oestrogènes par les cellules adipeuses. Ces mêmes chercheurs ont montré que les femmes obèses avaient près de 20 % de risque supplémentaire de développer un cancer du sein, par rapport à celles avec un IMC de 25 (limite du surpoids).
L’obésité retarderait le diagnostic
En revanche, pour d’autres cancers, le lien n’est pas toujours aussi clair, “notamment parce que le surpoids est souvent accompagné d'autres facteurs de risques comportementaux ou environnementaux“. Et Catherine Hill de conclure : “on ne sait pas si c'est le poids maximum atteint qui joue, ou le temps passé en étant obèse“.
Quant au diagnostic de cancer, l’étude explique que l’obésité pourrait le retarder et que les traitements ne seraient pas adaptés aux personnes en excès de poids, car testés sur des sujets de corpulence normale. L’obésité arrive en troisième position après le tabac (30% des décès par cancer) et l’alcool dans les facteurs favorisant l’apparition de cancers.
Annabelle Iglesias
Sources : Global burden of cancer attributable to high body-mass index in 2012: a population-based study, Melina Arnold and al, novembre 2014, The Lancet Oncology (accessible en ligne).
1 - Body mass index, serum sex hormones, and breast cancer risk in postmenopausal women, T.J. Key and al, J Natl Cancer Inst, août 2003 ; vol. 95 : p. 1218-26.