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  • Pacemakers, prothèses, cabines de bronzage, Botox... : "une priorité, la sécurité"

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     Dr Jean-Philippe Rivière
    Dr Jean-Philippe Rivière Directeur médical de Doctissimo

    Prothèses PIP défectueuses

    Le scandale des prothèses mammaires PIP défectueuses, et donc dangereuses, a fait prendre conscience aux autorités de santé du danger constitué par l’insuffisance du contrôle et du suivi des dispositifs médicaux implantables et, par la même occasion, des interventions à visée esthétique. Afin d’améliorer la situation, une mission d'information du Sénat, présidée par Mme Chantal Jouanno, a procédé à de multiples analyses, auditions et déplacements pour améliorer cette situation. Leur rapport et recommandations ont été rendus publics le 12 juillet 2012.

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    Des autorisations données sans contrôles suffisants

    Les dispositifs médicaux implantables, comme les prothèses mammaires, de hanche, les pacemakers ou les stents, “se situent toujours dans l'ombre du médicament, bien qu'il s'agisse d'un domaine fondamentalement différent“. En effet, Mr Bernard Cazeau, sénateur socialiste et rapporteur de cette mission d’information, a rappelé qu’il n’existe pas de placebo pour ces produits. Donc l’autorisation de mise sur le marché, qui est une certification européenne n’est pas liée à une amélioration par rapport au placebo.

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    De plus, la certification du dispositif médical implantable repose sur la documentation fournie par le constructeur ou l’examen d’un échantillon du produit, au choix du fabriquant. Enfin, le fabriquant choisit lui-même l’organisme qui va le certifier, donc peut s’adresser à un organisme moins regardant que d’autres…

    Ce qui explique que, par exemple,  des prothèses PIP défectueuses ait pu être autorisées sur la foi d’une documentation insuffisante, élaborée uniquement par le fabriquant et donc sans aucune évaluation clinique ni contrôle qualité-sécurité d’un organisme extérieur...

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    Des signaux d’alerte non perçus ou négligés

    L’affaire PIP, qualifiée de “véritable scandale sanitaire“ par Bernard Cazeau, est l’illustration des carences du système actuel. Alors que les signaux d’alerte étaient nombreux et concordants dans différents pays (rupture prématurée, fuite de silicone non conforme…), pourquoi a-t-il fallu attendre si longtemps pour interdire les prothèses PIP et procéder à leur retrait préventif ? Pourquoi n’a-t-on pas régulièrement contrôlé ces prothèses, et à l’improviste, sans prévenir le fabriquant plusieurs jours avant ? Pourquoi les chirurgiens n’ont-ils pas pu signaler, sur un fichier centralisé ou un site internet dédié aux dispositifs médicaux et esthétiques, les anomalies qu’ils constataient ? Pourquoi le grand public n’a-t-il pas été informé de ces risques ?

    Cela rappelle la réponse tardive des autorités de santé avec l’affaire Mediator ®, médicament retiré du marché en 1998 en Suisse (risques cardiaques) et seulement en novembre 2009 en France, alors que l’alerte avait été lancée à Marseille dès 1999…

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    Dans le cadre de la mission d’information, les sénateurs* ont notamment visité les laboratoires Sebbin, spécialisés dans la fabrication d’implants, pour comprendre les exigences, nécessités et leviers d’amélioration de cette activité.

    Les interventions esthétiques insuffisamment sécurisées

    Chantal Jouanno, sénateur UMP, a rappelé en préambule de la présentation des propositions de la mission d’information qu’“historiquement, tous les peuples ont modifié leurs corps“ (perçage des oreilles, narines, tatouages, scarifications, etc.). L’appétence actuelle pour les cabines à UV, les techniques de rajeunissement facial ou de corrections chirurgicales du visage ou du corps ne sont donc pas surprenantes, il ne “s’agit pas d’une dérive de la civilisation actuelle“.

    Mais force est de constater qu’aujourd’hui, les interventions à visée esthétique se développent de plus en plus. Si, du côté des chirurgiens, les actes sont codifiés, surveillés et ne posent pas de problème majeur, il en va tout autrement de la médecine esthétique, qui consiste le plus souvent à injecter des produits anti-rides (botox, acide hyaluronique, fillers ...) ou à utiliser des lasers (épilation). Or ces produits peuvent être risqués et il n’y a actuellement pas de formation diplômante dédiée, ni de formation médicale continue sur ce sujet. Alors que les produits, machines et techniques évoluent en permanence…

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    Quant aux cabines UV, qui “donnent bonne mine mais ne font pas bronzer ni ne préparent au bronzage naturel“, souligne Mr Cazeau, elles pullulent désormais dans notre pays, exposant les plus jeunes et les plus assidus à une augmentation drastique du risque de cancer de la peau (mélanome notamment).

    Les propositions de la mission d’information sur les dispositifs

    La mission d’information souligne qu’il faudrait insister auprès de l’Europe pour durcir les conditions d’autorisation des dispositifs. Il faudrait également créer un suivi précis pour détecter une anomalie au moment où elle se produit, et non des années après…En Suède, des registres obligatoires permettent par exemple de suivre précisément le devenir des dispositifs implantés. 

    Une résolution visant à améliorer la sécurité de certains dispositifs médicaux, dont les implants mammaires, a déjà été voté par le Parlement européen en juin dernier et pourrait déboucher sur un meilleur contrôle au niveau des 27 pays membres de l'Union.

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    Une amélioration européenne paraît capitale alors que les progrès technologiques font envisager dans un avenir proche d’une multiplication des implants, nano-dispositifs médicaux implantables ou injectables, accessoires santé robotisés, etc. En France, il faudrait appliquer ces améliorations et, si besoin, les anticiper, les compléter, etc.

    Les propositions de la mission sénatoriale se regroupent autour de trois lignes directrices :

    - Faciliter la déclaration d'incidents ou d'événements indésirables graves ;

    - Etablir des registres de patients pour chaque spécialité ou acte clairement identifié, en impliquant les sociétés savantes, le conseil de l’Ordre des médecins et l’Etat ;

    - Donner au public l'accès à une information claire et exhaustive afin de restaurer la confiance.

    Les propositions de la mission d’information sur les interventions esthétiques

    La mission d’information propose de supprimer les cabines de bronzage à UVA en France (hors UV thérapeutiques, pour le psoriasis, l’eczéma sévère…), comme cela a déjà été fait au Brésil et dans un état d’Australie.  

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    Une proposition radicale qui montre la perception du danger par les sénateurs et experts audités, mais qui risque de déplaire au plus grand nombre, qui va se sentir privé d’une liberté supplémentaire (après celle de fumer dans les lieux fermés par exemple).

    Quant à la médecine esthétique, la mission recommande en particulier de :

    - Clarifier les compétences et les formations de tous les professionnels du secteur ;

    - Instituer un véritable parcours de soins esthétiques de nature à rappeler aux consommateurs la prudence qui s'impose en la matière, voire interdire les pratiques les plus dangereuses.

    Et demain ?

    En conclusion de leur rapport, les sénateurs déclarent qu’“il n’existe pas de fatalité à voir se répéter les scandales sanitaires ; il importe seulement de remettre la sécurité au premier rang des priorités de l’action publique dans ce domaine“.

    Pour cela, les réglementations doivent évoluer, les formations des professionnels aussi, ainsi que les lois, françaises et européennes. Ce rapport offre de nombreuses pistes pragmatiques qui, si elles sont adoptées, devraient rapidement améliorer le suivi, la transparence et la prévention d’incidents. Seront-elles étudiées et mises en œuvre, en l’état ou amendées, par le nouveau gouvernement ?

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    Jean-Philippe Rivière

    Source :  “Santé, beauté, une priorité : la sécurité“. Rapport d'information de M. Bernard CAZEAU, fait au nom de la MCI portant sur les dispositifs médicaux implantables n° 653 tome I (2011-2012) - 10 juillet 2012, accessible en ligne

    * Composition de la mission d’information :

    Mme Chantal Jouanno, présidente ;

    M. Bernard Cazeau, rapporteur ; Mme Aline Archimbaud, M. Gilbert Barbier, Mmes Laurence Cohen, Catherine Deroche, Catherine Génisson, Nathalie Goulet, vice-présidents ;

    M. Philippe Bas, Mmes Marie-Thérèse Bruguière, Françoise Cartron, Caroline Cayeux, MM. Alain Fauconnier, Michel Fontaine, Mme Christiane Kammermann, MM. Ronan Kerdraon, Jacky Le Menn, Jean Louis Masson, Alain Milon, Jean-Jacques Mirassou, Alain Néri, Mmes Isabelle Pasquet, Gisèle Printz, MM. Gérard Roche, René-Paul Savary, René Teulade et Mme Catherine Troendle

    Photos

    - Prothèse mammaire PIP défectueuse, retirée de la poitrine d'une patiente à Nice, janvier 2012, © BEBERT BRUNO/SIPA

    - Bernard Cazeau, photo provenant de son profil sur Senat.fr

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    - Chantal Jouanno, juillet 2012, © IBO/SIPA


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