Pourquoi la majorité des fumeurs n'ont-ils pas de cancer des poumons ?
Bien que le tabac soit responsable de la grande majorité des cancers du poumon, certains gros fumeurs semblent épargnés par la maladie. Selon une étude parue dans Nature Genetics, ces derniers développeraient un "système de prévention" qui les protégeraient des cellules malignes. Explications.
En France, le tabagisme continue de tuer. Près de 75 000 décès et 46 363 cas de cancers du poumons sont recensés chaque année (estimés en 2018). Pourtant, les accros à la nicotine ne semblent pas développer davantage de mutations génétiques que les autres selon une étude publiée dans la revue Nature Genetics.
Une nouvelle technique de séquençage
D’après une équipe de scientifiques de l’Albert Einsten College of Medicine, certains gros fumeurs sembleraient "protégés" de la maladie grâce à un mécanisme de défense étonnant.
Pour parvenir à cette conclusion, les chercheurs ont mis au point une nouvelle technique de séquençage : la SCMDA. Elle permet de séquencer l'intégralité du génome d'une cellule isolée sans que le séquençage lui-même n'induise des mutations.
33 personnes âgées de 11 à 86 ans, ayant plus ou moins fumé dans le passé (de zéro cigarette à 116 paquets-années), ont participé aux recherches. Les participants ont été divisés en deux groupes : d’un côté, les 14 non-fumeurs âgés de 11 à 86 ans et de l’autre, les 19 fumeurs âgés de 44 à 81 ans.
L’objectif ? "Comparer le paysage mutationnel" des cellules basales bronchiques, autrement dit des cellules présentes dans les poumons.
Ces dernières ont la particularité "de survivre pendant des années, voire des décennies, et donc peuvent accumuler des mutations avec l'âge et le tabac", indique l’étude. Des cellules plus à risque de devenir cancéreuses par la suite.
Un nombre de mutations peu élevé
Pourtant, contre toute logique, les fumeurs n’accumuleraient pas plus de mutations que les non- fumeurs. "Les mutations ont suivi l'augmentation linéaire du risque de cancer jusqu'à environ 23 paquets-années, après quoi aucune augmentation supplémentaire de la fréquence des mutations n'a été observée", précise l’étude.
Ainsi, "les plus gros fumeurs n'avaient pas le nombre de mutations le plus élevé. Nos données suggèrent que ces individus ont peut-être survécu si longtemps, malgré leur tabagisme important, car ils ont réussi à empêcher l'accumulation de mutations supplémentaires", confie le Dr Spivack.
Réparer l’ADN des fumeurs
Ces résultats offrent de nouvelles perspectives aux chercheurs sur l'efficacité des mécanismes de réparation de l’ADN. Un test permettant d’identifier les fumeurs à risque de cancers pulmonaires pourrait ainsi voir le jour. "Cela peut s’avérer être une étape importante vers la prévention et la détection précoce du risque de cancer du poumon", conclut l’étude.