Point de déclenchement : qu’est-ce qu’un trigger point ?
Mis en lumière au milieu du 20è siècle par la médecin rhumatologue du président américain John F Kennedy, les trigger points sont des nœuds musculaires qui se forment dans la fibre musculaire et occasionnent des douleurs ou irradiations nerveuses. Encore relativement peu connus en France, ils font partis de la pratique kinésithérapique classique dans les pays anglo-saxons, ainsi qu’en Suisse et en Espagne. A quoi sont-ils dus ? Comment les prendre en charge ? Quelle prévention ? Les réponses de Benjamin Bolla, kinésithérapeute formé aux trigger points.
Qu’est-ce qu’un trigger point ?
Aussi connus sous le nom de "points gâchette" ou "point de déclenchement", les trigger points sont des points de tension musculaire douloureux qui figureraient parmi les causes les plus fréquentes de douleurs chronique du système locomoteur.
"Ce sont des zones millimétriques de contracture situées dans la fibre musculaire. On parle de point gâchette myofascial, car les fascias sont les enveloppes des muscles" explique Benjamin Bolla. Ces trigger points peuvent être localisés sur n’importe quel muscle du corps, mais on les retrouve principalement au niveau des trapèzes, des muscles de l’épaule, des mollets et des fessiers.
On distingue différents types de trigger points, en fonction de leur nature et de leur étiologie.
- Les trigger points actifs : les trigger points actifs sont spontanément douloureux et sont liés à un dysfonctionnement ou à une lésion musculaire. Ils peuvent entraver certains mouvements et les douleurs qu’ils occasionnent suffisent à susciter une consultation ;
- Les trigger points latents : à la différence des trigger points actifs, les latents ne sont pas douloureux par défaut, mais peuvent déclencher des douleurs à la palpation. Ils déclenchent une perte de mobilité, d’amplitude articulaire et/ou de force dans le muscle concerné. Ces trigger points latents peuvent évoluer en trigger points actifs à la suite d’un exercice important, d’un étirement trop intense ou d’un traumatisme ;
- Les trigger points primaires : ces trigger points primaire sont directement liés à une blessure musculaire : lésion au niveau du muscle, surcharge par effort ou ischémie ;
- Les trigger points secondaires : "les trigger points secondaires sont quant à eux liés à un problème articulaire - comme une entorse au genou par exemple - qui se répercute sur les muscles alentours" explique le kinésithérapeute. Ils peuvent aussi être la conséquence d’une atteinte du nerf ou d’une racine nerveuse.
A quoi sont dus les trigger points ?
Bien que les trigger points ne soient pas exclusivement l’apanage des sportifs, ces derniers restent la population la plus concernée.
Les points gâchettes concernent toutes les problématiques musculaires, des différents stades de lésions aux contractures.
"Ils peuvent par exemple être liés à un effort trop important, comme la surcharge d’un muscle qui n’est pas adapté à supporter une certaine contrainte, ou à une sur-stimulation du muscle" décrit Benjamin Bolla. Ils peuvent aussi être la conséquence de mouvements répétitifs ou de séances de sport trop intenses. Ils peuvent aussi être liés à un mécanisme ischémique : "c’est ce qu’il se produit lorsqu’un muscle n’est plus suffisamment vascularisé, à cause d’une position étirée prolongée, d’un pantalon trop serré, d’une bretelle de soutien gorge mal réglée…" détaille le kinésithérapeute. La mauvaise circulation sanguine provoque une irrigation insuffisante du muscle, et donc d’un apport trop faible en oxygène.
"Les personnes trop crispées ou qui adoptent des postures assises prolongées, peuvent être sujettes aux trigger points" Ou certaines postures qui mettent en position d’étirement prolongé de certains muscles.
De fait, une grande sédentarité, ou une mauvaise installation en télétravail, peuvent générer l’apparition de points gâchette.
Qui consulter si les trigger points sont douloureux ?
"Il faut savoir que la plupart du temps, ces trigger points passent spontanément et ne nécessitent pas de consultation ni de prise en charge particulière" rassure Benjamin Bolla. Néanmoins, si les symptômes persistent et entravent le quotidien, une consultation s’impose. Les problèmes musculaires, dont font partis les points gâchettes, sont en premier lieu du recours du kinésithérapeute. "Cependant, certains ostéopathes ou chiropracteurs, sont formés aux problématiques myofasciales et à la prise en charge des trigger points" indique le kinésithérapeute.
Comment poser le diagnostic des trigger points ?
Les trigger points ne sont pas visibles aux examens d’imagerie médicale. Leur diagnostic est donc uniquement palpatoire, après anamnèse et interrogatoire du patient. Il faut être sûr qu’il s’agit bien d’une problématique musculaire et que les douleurs ne sont pas liées une pathologie sous jacente, d’où l’importance d’un examen clinique complet. Puis le praticien essaye de reproduire les symptômes du patient afin d’identifier et de localiser le trigger point.
"A la palpation, c’est en premier lieu un cordon musculaire, qui ressemble à une corde de guitare, qui est repéré par le praticien, puis dans un second temps le point musculaire en lui même qui est très petit et demande une grande précision à la palpation" indique Benjamin Bolla.
Les symptômes des trigger points
Le premier symptôme des points gachette est la douleur, qui n’est pas nécessairement localisée au niveau du point en question, mais qui peut être différée, en fonction de sa nature primaire ou secondaire. À la palpation, lorsqu’ils sont stimulés, les points gachette occasionnent une douleur qui peut ressembler à une brûlure.
"Les points gâchettes peuvent aussi provoquer une inhibition musculaire - à savoir une difficulté à contracter le muscle et une faiblesse musculaire - ainsi qu’à une limitation dans l’amplitude des mouvements" décrit le kinésithérapeute.
Enfin, les trigger points localisés au niveau du cou ou de la mâchoire, peuvent provoquer des maux de tête ou des cervicalgies.
Les traitements des trigger points
Les techniques manuelles
Le massage punctiforme, très utilisé pour améliorer les cicatrices hypertrophiques, qui consiste à exercer une pression localisée sur le point à l’aide de deux doigts. Le massage profond de la zone douloureuse fonctionne également bien, en améliorant sa vascularisation.
Le dry needling
Le dry needling est une technique qui utilise des aiguilles d’acupuncture à usage unique, pour piquer au niveau de ces points gâchettes afin de les soulager. "La piqure déclenche une secousse localisée et une cascade de réaction au niveau du muscle et du système nerveux : en réapprovisionnant la fibre en oxygène, en diminuant l’inflammation et en réactivant la vascularisation" détaille le spécialiste.
Les auto-étirements et auto-massages
Il est également important d’apprendre le patient à soulager lui-même les douleurs liées aux points gâchettes. "Ils peuvent utiliser des accessoires comme les balles ou les rouleaux de massage en mousse, qu’ils font rouler sous le point douloureux" décrit Benjamin Bolla. Ces auto-massages doivent être combinés à des exercices actifs, pour permettre au muscle de se renforcer.
Quelle prévention des trigger points ?
La survenue de trigger points, tout comme celle de lésions musculaires ou de troubles musculo-squelettique, peut être limitée par la mise en place de certaines mesures préventives simples.
- Eviter au maximum la sédentarité, et ne pas rester assis toute la journée sans bouger. En cas de travail assis à un bureau, il est essentiel de faire des pauses régulières pour se lever et marcher ;
- En cas de pratique sportive : attention aux excès d’intensité et/ou de fréquence des entraînements. Il faut veiller à adapter sa pratique à ses conditions physiques pour ne pas sur-solliciter les muscles et articulations.
- Suffisamment s’échauffer, afin de préparer son corps à l’effort en augmentant progressivement la température corporelle. "Un muscle plus souple à moins de risque d’être blessé" rappelle notre expert. - Bien s’hydrater, avant et au cours de l’effort.