Aujourd'hui, près de 800 000 Français sont atteints de la maladie d'Alzheimer. Face à ce fléau, la recherche travaille depuis des années à la mise au point d'un vaccin. Après plusieurs essais infructueux, l'espoir renaît aujourd'hui avec une nouvelle étude.
Avec le vieillissement de la population, la maladie d'Alzheimer devrait continuer sa progression. Et pour lutter contre cette pathologie qui entraîne la destruction des neurones et le développement d'une démence inaugurée par des troubles de la mémoire, la recherche peine à trouver des traitements curatifs. Elle travaille aussi depuis plusieurs années à la mise au point d'un vaccin.
Maladie d'Alzheimer : l'espoir d'un vaccin
Même si la maladie d'Alzheimer est en partie mystérieuse, plusieurs mécanismes ont été mis à jour. Comme nous le rappelait le Dr François Sellal : "D'un point de vue biochimique, il y a deux anomalies. Tout d'abord, la production en quantité anormalement importante d'une protéine appelée la protéine A bêta. Ensuite, l'accumulation dans les cellules nerveuses d'une protéine Tau phosphorylée qui aboutit à la mort neuronale. La première impulsion de la maladie c'est cette hyperproduction de protéine A bêta. D'où l'idée d'empêcher sa formation, ou de la détruire". Très tôt, la piste vaccinale a été envisagée pour amener le patient à fabriquer des anticorps qui vont détruire ces protéines.
Mais en 2002, l'essai AN1792 conduit par Elan Pharmaceuticals teste sur 372 patients l'efficacité de l'injection intramusculaire de peptide A béta (Ab) synthétique, susceptible d'induire une réponse immunitaire adéquate 1. Mais cette étude a dû être arrêtée en urgence après l'apparition de 19 cas de méningo-encéphalites. Ces effets secondaires n'ont pas mis fin à la piste vaccinale mais ont remis en cause la fabrication du vaccin et la (trop ?) rapide transposition des études de l'animal à l'homme 2 dans ce domaine. Tirant les leçons de ces échecs 3, le laboratoire Affiris AG propose aujourd'hui une nouvelle piste thérapeutique.
Un candidat vaccin testé en phase II
Les études confirment que l'immunothérapie active vis-à-vis des protéines A bêta a démontré la possibilité de retarder l'évolution de la maladie chez l'animal et chez l'homme 3. Afin d'éviter les déboires des essais passés, le laboratoire Affiris a développé une technique originale : la mise au point d'une imitation d'une partie de la protéine A bêta capable d'induire une réponse immunitaire (mimotope). Bien que permettant la production d'anticorps spécifiquement dirigés contre la protéine A bêta, ces mimotopes ne présentent aucune similitude de séquence avec une quelconque partie de cette protéine. Le principal avantage de cette méthode est de pouvoir induire une réponse immunitaire vis-à-vis de la protéine A bêta, qui normalement n'en suscite pas car elle n'est pas identifiée comme un intrus par l'organisme. Autre avantage : la réponse immunitaire initiée n'a aucun effet sur les protéines APP, des précurseurs non pathologiques des protéines A bêta non pathologiques 4.
Ce vaccin a été testé l'année précédente dans le cadre d'une étude de Phase I qui a permis de s'assurer de sa sécurité et de sa tolérance 5. La prochaine étape est de juger de son efficacité. Le PDG et co-fondateur d'Affinis, le Dr. Walter Schmidt déclare : "L'année dernière, la formulation d'AD02 a atteint les principaux critères d'évaluation en termes de sécurité et de tolérance. La décision de passer en phase II est motivée par les résultats actuellement encore confidentiels de l'analyse intermédiaire des critères d'évaluation secondaires de la phase I" 6. Le vaccin AD02 contre la maladie d'Alzheimer va ainsi être testé dans une étude clinique multicentrique de phase II en Autriche et dans 5 autres pays européens en Allemagne, en France, en République tchèque, en Slovaquie et en Croatie sur un total de 420 patients.
L'immunothérapie contre les protéines A bêta est la stratégie qui semble aujourd'hui la plus prometteuse pour prévenir ou ralentir la progression de la maladie d'Alzheimer. Elle est suivie par de nombreuses équipes de chercheurs. Cependant, elle nécessite de pouvoir traiter les patients avant ou dès les premier stades de la maladie, voire les patients à risque n'ayant pas encore développé la maladie. Cette identification précoce est une voie de recherche en plein essor. Durant les 10 dernières années, la découverte de biomarqueurs de la maladie d'Alzheimer et l'imagerie médicale ont largement progressé, au point d'identifier demain les personnes qui pourraient bénéficier d'un vaccin efficace.