Adénome de la prostate : les atouts du laser à haute énergie
Lorsqu'un homme de plus de 50 ans a des difficultés à uriner, l'adénome de la prostate peut être en cause. Il nécessitera une chirurgie si le traitement médicamenteux ne suffit pas. Pour améliorer le confort des patients et offrir cette chirurgie à des patients fragiles, de nouvelles techniques apparaissent. La plus prometteuse est le laser de vaporisation à haute énergie. Le Pr. Gilles Karsenty nous en dit plus sur ses avantages.
Souvent confondu avec le cancer de la prostate, l'adénome est une tumeur bénigne située au niveau de la glande prostatique. En grossissant, cette tumeur peut obstruer le canal de l'urètre et entraîner des symptômes urinaires gênants voire des complications : rétention aiguë d'urine, dilatation des uretères risquant de provoquer une insuffisance rénale... Une opération est nécessaire si possible avant les complications.
Adénome de la prostate, des troubles gênants
Augmentant en fréquence avec l'âge, l'adénome de la prostate (ou hypertrophie bénigne de la prostate) est la première cause des troubles urinaires masculins. Aujourd'hui, sa prise en charge dépend de la gêne occasionnée. Elle peut se limiter à une simple surveillance ou nécessiter la prise de médicaments (extraits de certaines plantes, alpha-bloquants, inhibiteurs de la 5 a-réductase...).
Lorsque la vessie ne se vide plus totalement (résidu post-mictionnel), en cas de rétention aiguë d'urine (vessie complètement bloquée) ou quand les médicaments sont inefficaces, la chirurgie est proposée. En France, la chirurgie de l'adénome est la deuxième chirurgie fonctionnelle la plus fréquente après la pose de prothèse de hanche (65 000 interventions/an).
Plus de confort et des indications élargies grâce au laser
Au-delà de l'opération classique (par résection transurétrale ou incision), de nouvelles approches permettent de soulager les patients en offrant de moins en moins d'effets secondaires. Récemment introduits en France, deux types de lasers offrent aux patients un confort inédit. Les services de chirurgie urologique de l'AP-HM (Hôpital de la Conception et Hôpital Nord) se sont dotés d'un laser à haute énergie pour traiter l'adénome de la prostate, quelle que soit la taille de la prostate.
"Cet appareil agit par photo-vaporisation avec l'émission d'un rayonnement de haute énergie qui pénètre dans les tissus et vaporise les cellules avec un pouvoir de coagulation très élevé. Résultat : on limite le saignement alors que la chirurgie classique en occasionne normalement beaucoup 1. La sonde urinaire peut être retirée dès le lendemain de l'intervention, ce qui permet un meilleur confort du patient, une diminution de la durée d'hospitalisation qui passe de 6 à 2-3 jours et une baisse du risque infectieux lié à la sonde urinaire" précise le Pr. Gilles Karsenty du service de chirurgie urologique de l'hôpital de la Conception.
Plus de confort pour le patient mais également des indications plus larges. "Les patients opéré ont un âge moyen de 70 ans, ils sont de plus en plus souvent traités par antiagrégant ou anticoagulant (moins de 40 % n'ont pas de comorbidité). Ces médicaments favorisent les saignements et peuvent rendre la chirurgie classique difficile et dangereuse (l'arrêt des traitements n'est pas toujours possible et dans ce cas, la chirurgie classique entraîne alors plus de risque d'infections 2)". Avec le laser de vaporisation Green Light à haute énergie (180 watts), les patients fragiles (antécédents cardiaques, grand âge etc..) peuvent être opérés avec une sécurité accrue. Leurs traitements, en particulier anticoagulant, peuvent être maintenus ou interrompus pour une très courte durée.
Vers de nouvelles recommandations officielles de prise de charge ?
L'avantage principal est une réduction de la morbidité liée aux gestes opératoires chez une population fragile et âgée, parfois sous traitement. A quels patients réserver cette technique ? "Qui peut le plus, peut le moins. Tous les patients peuvent théoriquement bénéficier de cette technique. On compte aujourd'hui une cinquantaine d'appareils de ce type en France. Mais au niveau de l'AP-HM, nous avons la chance de disposer de deux appareils : le premier (Green Light 120 watts) acquis dès 2009 grâce au soutien de la commission de l'innovation de l'APHM et du Conseil général 13 et le second de dernière génération (Green Light 180 watts XPS) mis à disposition par le fabricant qui permet de traiter de plus gros volume d'adénome. Aujourd'hui grâce à l'investissement des deux équipes d'urologie de l'hôpital de la Conception dirigée par le Pr. Coulange et le Pr. Le Chevallier et de l'hôpital dirigée par le Pr. Rossi, le bassin de population marseillais peut bénéficier de cette prise en charge dans les deux hôpitaux car ces machines sont transportables. A ce jour, plus de 120 patients ont déjà pu être opérés par ces techniques" précise le Pr. Karsenty.
La diffusion de ces nouvelles techniques a été limitée par l'absence de cotation de cet acte, donc de tarification et de remboursement par l'Assurance maladie qui dans l'attente de données scientifiques issues d'études Françaises a limité l'usage à quelques centres universitaires. Faute de remboursement, peu d'urologues (dont 70% exercent dans un cadre libéral) ont investi dans ces appareils...
"Aujourd'hui précise le Pr Karsenty nous pouvons nous appuyer sur une grande étude comparative multicentrique française 2 et sur d'autre études internationales dont certaines avec plus de 10 ans de recul 3. Au vu des résultats chez les patients sous antiagrégant et anticoagulant la vaporisation laser de prostate pourrait devenir la technique recommandée de traitement de l'adénome dans cette population fragile 4. Ces données convergentes de la littérature scientifique médicale devraient également permettre la définition d'un acte ouvrant la voie à la tarification qui rendra possible la diffusion de la technique à tous les secteurs d'activité d'urologie (hospitalier universitaire ou non et libéral)".