Cholestérol : le traitement des personnes à risque
Qu'on se le dise : il n'y a pas de taux de cholestérol standard ! Pour les personnes ayant un risque cardiovasculaire important, les valeurs du cholestérol habituellement considérées comme normales sont encore trop élevées. Zoom sur la conduite à tenir et les traitements.
Qu'entend-on par des patients avec un risque cardiovasculaire élevé ?
Les recommandations de prises en charge des dyslipidémies ont été revues par la Haute Autorité de Santé1 en 2017. Elles précisent les objectifs en taux de cholestérol à atteindre, ainsi que les meilleurs moyens pour le faire baisser. L'obectif dépend du risque cardiovasculaire de chaque patient, ainsi il n'y a pas de valeur "normale" du cholestérol. On sait que plus le cholestérol-LDL, c'est-à-dire le "mauvais" cholestérol, qui se dépose sur les parois artérielles, est bas et plus le risque cardiovasculaire est faible. Mais on ignore quelle est la valeur optimale pour qu'il y ait un bénéfice global sur la santé.
L'indication d'un traitement est donc calculée individuellement, selon les facteurs de risque cardiovasculaire de chacun. Ce risque est évalué selon le Systematic Coronary Risk Estimation (SCORE) qui évalue ce risque à 10 ans. Ces tables SCORE sont issues de la recommandation sur la prévention cardiovasculaire disponible sur le site de l'European Society of Cardiology. Le SCORE peut donc être évalué via des tables d’évaluation du risque ou une version électronique interactive et application "Recommandations de poche". Attention, cet outil d'évaluation du risque n’est pas adapté pour les patients hypertendus sévères, diabétiques, insuffisants rénaux chroniques ou atteints d’hypercholestérolémie familiale. Le SCORE permet ainsi de définir : un risque faible (SCORE<1%), un risque modéré (1 % ≤ SCORE < 5 %), un risque élevé (5 % ≤ SCORE < 10 %) ou un risque très élevé (SCORE ≥ 10 %).
En cas de maladie cardiovasculaire documentée (antécédent d'infarctus, d'avc, de thrombose...), le risque cardiovasculaire est d’emblée considéré très élevé et la stratégie de prise en charge est alors de la prévention secondaire.
La prise en charge dépend du risque de chaque patient
Les spécialistes distinguent quatre niveaux de risque cardiovasculaire (RCV) avec pour chacun des objectifs de taux de mauvais cholestérol à atteindre et des prises en charge différentes :
Niveau de risque cardiovasculaire |
Objectif de |
Intervention de première intention* |
Intervention de deuxième intention |
|
Faible |
SCORE < 1 % |
< 1,9 g/L |
Modification du mode de vie |
Modification du mode de vie |
Modéré |
1 % ≤ SCORE < 5 % |
< 1,3 g/L |
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Diabète de type 1 ou 2 < 40 ans sans facteur de RCV ni atteinte d’organe cible |
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Élevé |
5 % ≤ SCORE < 10 % |
< 1,0 g/L |
Modification du mode de vie |
Modification du mode de vie |
Diabète de type 1 ou 2 : |
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Patient ayant une insuffisance rénale chronique modérée |
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TA ≥ 180/110 mmHg |
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Très élevé |
SCORE ≥ 10 % |
< 0,70 g/L |
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Diabète de type 1 ou Diabète de type 2 ≥ 40 ans avec au moins un facteur de RCV ou atteinte d’organe cible |
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Patient ayant une insuffisance rénale chronique sévère |
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Maladie cardio-vasculaire documentée (prévention secondaire) Avec antécédents d'accidents vasculaires liés à l'athérome, qu'il s'agisse d'accidents cardiaques, d' accidents vasculaires cérébraux ou d'artérite des membres inférieurs |
Cholestérol : le traitement des personnes à haut risque
Si l'on fait partie de ces catégories à risque élevé, un traitement s'impose donc dès que le cholestérol-LDL est supérieur à 1g/l, et ce traitement doit associer d'emblée médicaments et régime.
Le traitement médicamenteux
Le recours aux médicaments doit être le plus rapide possible. Il doit faire appel à une statine (dont font partie le Tahor ®, le Crestor ® ou encore le Zocor ®) sauf dans certains cas particuliers, notamment si les triglycérides sont élevées et le cholestérol HDL bas. Mais la prescription doit tenir compte du risque d'effets secondaires, en particulier musculaire (quelques cas exceptionnels de rhabdomyolyses ou destruction des muscles ont été signalés avec les fortes doses de statines), ce qui implique une surveillance et une adaptation en fonction de la tolérance de chacun. Si l'objectif reste, a priori, de baisser le cholestérol-LDL en dessous de 1 g/l, il doit être modulé de manière individuelle.
Le régime alimentaire anti-cholestérol
Une modification des habitudes alimentaires est également nécessaire, mais elle doit être réaliste. Il ne s'agit pas d'avoir un régime restrictif, mais de modifier sa manière de cuisiner et de manger, notamment en diminuant sa consommation de graisses saturées (beurre et produits laitiers entiers, oeuf, viande grasse), au profit des graisses mono et polyinsaturées, d'origine végétales. Il est important d'augmenter sa consommation d'oméga 3 en consommant davantage de poisson et en cuisinant avec de l'huile d'olive ou de colza, sans oublier de manger des fruits et légumes, riches en fibres et en vitamines. L'alcool n'est pas interdit, à condition de ne pas dépasser deux verres par jour chez la femme et trois chez l'homme.
Du sport pour améliorer sa santé
Maigrir est important, en cas de surcharge pondérale, mais perdre quelques kilos et, surtout, ne pas regrossir ensuite, suffit à améliorer son profil lipidique et réduire son risque cardiovasculaire. Les spécialistes insistent également sur les effets bénéfiques de l'exercice, qui diminue les facteurs de risque, et recommandent 30 minutes de marche rapide quotidienne. La correction des autres facteurs de risque, en particulier diabète, tabagisme et hypertension, est bien sûr indispensable.
Les nouvelles recommandations fixent donc des objectifs plus stricts et élargissent ainsi le nombre de patients requérant une baisse du LDL-c en dessous de 1 g/l. Elles sont fondées sur des études récentes, qui ont également l'intérêt de démontrer que le traitement des dyslipidémies diminue non seulement le risque d'accident cardiaque, mais aussi celui d'accident vasculaire cérébral, et que ses bénéfices s'étendent à des groupes auparavant peu étudiés, comme les femmes ménopausées et les personnes âgées de 70 à 80 ans.
Cholestérol et patients à risque : que faire si la première prise en charge ne permet pas d'atteindre les objectifs ?
Lorsque le traitement de première intention des patients à haut risque ne permet pas d'atteindre les objectifs en termes de taux de mauvais cholestérol (LDL-Cholestérol), la Haute Autorité de Santé recommande d'intensifier le traitement hypolipémiant, ce qui veut dire revoir la dose ou changer de traitement, car toutes les statines ne se valent pas.
Si le recours aux médicament est justifié, la pravastatine ou la simvastatine sont a priori à privilégier, ces hypocholestérolémiants sont les mieux évalués en termes de morts et d'accidents cardiovasculaires (avec une préférence pour la pravastatine chez les patients à risque d'interactions médicamenteuses). Si l'objectif n'est pas atteint à une dose de 40 mg, la Haute Autorité de Santé juge que L’atorvastatine 10 mg et la rosuvastatine 5 mg sont des alternatives de la simvastatine 40 mg lorsque la baisse de LDL-c souhaitée est modérée (entre 30% et 40%). Pour une baisse du LDL-c souhaitée de plus de 40%, seules la rosuvastatine et l’atorvastatine sont respectivement à privilégier.
Contrairement à la HAS, les experts de la revue Prescrire jugent que si la LDLcholestérolémie reste élevée sous pravastatine ou simvastatine à la dose quotidienne de 40 mg, mieux vaut renoncer à la baisser davantage, que d'utiliser l'atorvastatine à forte dose qui expose à un surcroît de risque2.
Dans tous les cas, il est recommandé d’avoir une discussion avec ces patients sur les risques et les bénéfices du traitement par statine afin qu’ils puissent prendre une décision au sujet de la prise de ces médicaments sur le long terme.