L'homéopathie, objet de controverses
Curieuse discipline que l'homéopathie, reconnue de fait par les instances officielles, mais vilipendée par la médecine traditionnelle. Echappant par nature à toute démonstration scientifique, elle ne peut être que l'objet de controverses.
L'homéopathie est un cas à part dans la pharmacopée française. Elle n'est pas enseignée dans le cursus commun des études médicales, elle n'est pas validée par des études scientifiques, elle est considérée comme inefficace par la plupart des médecins et n'a pas droit de cité dans les grandes revues scientifiques. Pourtant, des médicaments homéopathiques sont agréés par l'Agence nationale de sécurité du médicament. L'ANSM a prévu pour ces produits une procédure spéciale d'autorisation de mise sur le marché (AMM) : alors que pour tout médicament un dossier complet doit être constitué, avec des études évaluant leurs effets secondaires et leur efficacité, les médicaments homéopathiques sont dispensés d'apporter la preuve de leur effet thérapeutique. Malgré cette absence de preuve, la plupart sont remboursés par la Sécurité sociale. Quant aux médecins homéopathes, ils doivent informer le Conseil de l'ordre des médecins de leur orientation. Aucun diplôme n'est requis, l'homéopathie n'est pas considérée comme une spécialité, mais comme un mode d'exercice particulier.
Homéopathie : l'impossible preuve d'une réelle efficacité ?
Que penser de cette voie thérapeutique si éloignée de la médecine classique ? D'abord il faut bien reconnaître que l'homéopathie échappe, par définition, à toute évaluation rigoureuse. Comme il n'existe pas de traitement homéopathique standard, il est impossible de réaliser des essais comparatifs "en double aveugle" (des études dans lesquelles ni les médecins ni malades ne savent s'ils reçoivent le médicament ou le placebo).
Le fait que l'homéopathie s'adresse à des symptômes chroniques, parfois mal définis et presque toujours très subjectifs, plutôt qu'à des maladies aiguës bien identifiées complique l'étude des effets thérapeutiques. L'amélioration ressentie ne dépendrait-elle pas de l'évolution naturelle de la maladie (ainsi, les infections ORL de la petite enfance s'espacent-elles spontanément lorsque l'enfant grandit), d'un diagnostic imprécis (la plupart des "grippes" sont en fait des rhumes qui guérissent rapidement) ou au simple, mais puissant, effet placebo ?
On peut s'étonner ensuite d'un langage (les miasmes, la psore, le tuberculinisme…) et de raisonnements (drainage des toxines, dynamisation des préparations…) qui font penser davantage au vocabulaire des médecins mis en scène par Molière qu'à la médecine moderne.
Mais le principal grief formulé par les tenants de la médecine classique réside dans le principe même des hautes dilutions : aux degrés de dilution appliqués pour produire les médicaments homéopathiques, il ne reste plus dans la solution une seule molécule de la substance de base. Comment cette substance pourrait-elle agir ? Les homéopathes invoquent souvent des effets physiques, encore mystérieux.
Le mécanisme de la mémoire de l'eau, qui garderait "l'empreinte moléculaire" des substances qui y ont transité, n'a jamais été confirmé depuis l'article retentissant de Jacques Benveniste. Au-delà de la polémique, on voit mal l'influence que pourrait avoir cette empreinte par rapport aux multiples substances qu'on avale chaque jour, à doses infinitésimales ou non, ne serait-ce qu'en consommant l'eau du robinet.
Homéopathie : la part du rêve ?
Quels sont les arguments en faveur de l'homéopathie ? Le premier, souvent invoqué pour toutes les médecines dites "douces", est que "si ça ne fait pas de bien, cela ne fait pas de mal", ce qui est indéniable, à condition toutefois que l'homéopathie ne vienne qu'en complément et ne prive pas un malade d'un autre traitement efficace.
Le deuxième est que de nombreuses personnes trouvent finalement satisfaction dans cette approche thérapeutique. Pourquoi les détourner de ces traitements, même si leur mode d'action n'est pas clair ? De nombreux patients en état d'insatisfaction ou de mal-être trouvent à la consultation d'homéopathie une oreille attentive, une écoute que les généralistes n'ont souvent pas le temps de leur accorder.
Enfin, exercée par des médecins, l'homéopathie satisfait néanmoins cette part d'ésotérisme, cette attente du miracle, ce rêve de changement qu'on cache tous au fond de soi. En ce sens elle peut éviter à certains de se fourvoyer dans des pratiques plus dangereuses. Tous ces arguments ne valent cependant qu'à une seule condition : que l'homéopathe pose un diagnostic précis et n'hésite pas à prescrire des traitements traditionnels lorsque ceux-ci s'imposent, ou sache orienter le patient vers un confrère mieux à même de le prendre à charge, le cas échéant.
Les preuves scientifiques de l'efficacité de l'homéopathie manquent aujourd'hui pour démontrer un effet supérieur à un placebo. En cas de symptôme inquiétant ou persistant, il est nécessaire de consulter votre médecin. Bien que dénuée d'effets secondaires, l'homéopathie ne doit en aucun cas se substituer à une prise en charge allopathique sans avis médical.