Hépatite C : les autorités européennes réévaluent les antiviraux d'action directe
Le Comité de pharmacovigilance de l’Agence Européenne du médicament annonce qu’elle lance une réévaluation des antiviraux d’action directe suite à des rapports de réactivations d’hépatite B ou des récidives de carcinome hépatocellulaire chez des patients traités par ces médicaments récents. Plus efficaces et mieux tolérés, ces médicaments très onéreux ont bouleversé la prise en charge de l'hépatite C.
Les antiviraux d’action directe (AAD) ont bouleversé la prise en charge des patients atteints d’hépatite C chronique active. Bien plus efficaces, mieux tolérés et administrés sans nécessité d’interféron, ces médicaments antiviraux d’action directe (AAD) permettent une guérison virologique dans au moins 90 % des cas après un traitement beaucoup plus court que les traitements classiques associés à l’interféron. Par ailleurs, l’agence européenne du médicament (EMA) précise dans un communiqué que l’interféron est actif à la fois contre le virus de l’hépatite B (VHB) et celui de l’hépatite C (VHC), et que les deux virus peuvent être présents chez un même patient.
Une réévaluation de tous les AAD
L’EMA précise qu’une réévaluation de tous les AAD est en cours depuis la mi-mars et qu’elle a été déclenchée suite à des rapports indiquant des cas de réactivation d’hépatite B chez des patients co-infectés par le VHB et le VHC ayant reçu un traitement contre l’hépatite C par des AAD. Le Comité pour l’évaluation des risques en matière de pharmacovigilance (PRAC) va donc lancer une procédure de pharmacovigilance renforcée pour déterminer la fréquence de ces réactivations du VHB et éventuellement proposer des mesures pour optimiser le traitement de l’hépatite C.
Un autre motif ayant déclenché cette procédure de réévaluation a été la publication d’une étude dans le revue Journal of Hepatology1 dont les résultats montrent que chez les patients ayant eu un carcinome hépatocellulaire (cancer primaire du foie fréquent chez les patients atteints d’hépatite chronique active C avancée), la récidive de ce cancer est plus fréquente pour les patients ayant été traités avec des AAD. Par ailleurs, lors du Congrès annuel international sur les maladies du foie (EASL) qui s’est tenu à Barcelone, Espagne du 13 au 17 avril 2016, une équipe italienne de l’Université de Bologne a présenté les résultats d’une étude montrant également une augmentation de récidive du cancer du foie chez des patients traités par AAD2. Dans cette étude, 7,6 % des patients n’ayant pas d’antécédent de cancer du foie ont développé la maladie après traitement par ADD alors que dans le groupe ayant des antécédents de ce même cancer, 29 % ont eu une récidive après traitement par AAD.
L’EMA fait savoir que la réévaluation concernant ce point inclura une évaluation du risque de survenue de cancer du foie par ces médicaments AAD.
Dr Jesus Cardenas
Sources :
Agence Européenne du médicament. EMA reviews direct-acting antivirals for hepatitis C. Communique du 15 avril 2016.
1. Reig, M., Mariño, Z., Perelló, C., Iñarrairaegui, M., Ribeiro, A., Lens, S., Díaz, A., Vilana, R., Darnell, A., Varela, M., Sangro, B., Calleja, J.L., Forns, X., Bruix, J., Unexpected early tumor recurrence in patients with hepatitis C virus -related hepatocellular carcinoma undergoing interferon-free therapy: a note of caution, Journal of Hepatology (2016).
2. Poster présenté lors du congrès de l’EASL. Abstract: LBP506, Development of Hepatocellular Carcinoma in HCV Cirrhotic Patients Treated With Direct Acting Antivirals.