Qu'est-ce que le surmoi ?

Publié le  , mis à jour le 
en collaboration avec Sophie Marret-Maleval (Psychanalyste)

Créé par Freud, le concept du surmoi constitue, avec le ça et le Moi, l’un des éléments fondamentaux de la psyché. Quel est son rôle ? En quoi est-il différent et complémentaire du ça et du Moi ? Explications.

Comment définir le surmoi ? Qu'est-ce que le surmoi ?

C’est au début du 20ème siècle que le psychanalyste autrichien Sigmund Freud introduit le concept de surmoi. Il l’emploie pour la première fois en 1923 dans un article intitulé « Le Moi et le ça ». Selon lui, la psyché humaine est composée de trois instances : le ça, le Moi et le surmoi (en allemand Uber-ich). Le surmoi est la partie de notre psyché qui représente l’ensemble des règles de la société, les valeurs morales qu’une personne intériorise au cours de son développement par le biais de l’éducation parentale et de son environnement. Il est l'héritier de l'autorité parentale. A l’instar d’un juge, le surmoi contrôle ainsi les pulsions du ça, les pensées, les émotions, les actes en fonction de ce qui lui semble autorisé ou non. Freud le décrit ainsi : "Le surmoi peut être considéré comme le représentant de toutes les restrictions morales, le défenseur des aspirations vers l’idéal – en un mot, il est aussi ce que nous appelons la conscience morale" (Freud, « Le Moi et le ça », 1923). D’autres psychanalystes, à l’instar de Jacques Lacan ou de Mélanie Klein, ont complété et nuancé le concept de surmoi. Ainsi, par exemple, pour le psychanalyste français Jacques Lacan, le surmoi ne se cantonne pas à l’intériorisation des interdits parentaux, il s’agit aussi d’une petite "voix" qui représente la loi intérieure et l’ordre symbolique qui domine la personne et l’empêche de jouir de tous ses désirs.

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Quelle est la fonction principale du surmoi en psychanalyse ?

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En psychanalyse, on attribue diverses fonctions au surmoi. Parmi ces fonctions, on trouve :

- L’intériorisation des normes sociales : Le surmoi enregistre les règles transmises par les parents, par la société, par l’école, par la loi… Ces normes déterminent ce qui est perçu comme bien ou mal, ce qui est accepté ou non. "Pour créer du lien social, l’Homme doit réprimer une partie de ses pulsions. A partir de cette nécessité, il s’appuie sur les lois morales, pour faire civilisation. Le surmoi a donc au départ une fonction civilisatrice", explique Sophie Marret-Maleval, psychanalyste, professeur au département de psychanalyse de l’université Paris 8. Le surmoi aide alors à vivre en société.

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- La régulation des pulsions : Le surmoi agit comme un filtre, une barrière qui empêcherait les pulsions du ça, jugées inadaptées, de s’exprimer. Il régule les désirs (violence, vol, sexe…) et ne permet qu’à une partie d’entre eux de prendre vie en fonction des normes sociales qu’il a intériorisées.

- Le développement de la culpabilité : Lorsqu’une personne enfreint malgré tout les règles intériorisées par le surmoi, elle ressent de la culpabilité. Cette émotion désagréable renforce le pouvoir du surmoi et amènera davantage la personne à se restreindre la prochaine fois qu’une situation similaire se présentera à elle. La culpabilité inconsciente générée par le surmoi encourage à se conformer aux attentes morales et participe à réguler le comportement.

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- La formation d’un idéal du Moi : Le surmoi contribue à gommer les désirs négatifs et à amener l’individu vers davantage de qualités morales et une représentation idéale de lui-même.

Définition : Quelle est la différence entre le Moi et le surmoi ? Quel est le conflit sous-jacent entre ces topiques freudiennes ?

Le Moi ("ego" en anglais) est la partie de la psyché qui gère la réalité. Bien qu’ayant des aspects inconscients, il est plutôt placé dans la partie consciente de la psyché. Le Moi tente de jouer les médiateurs et d’établir un équilibre entre les pulsions, les désirs primitifs et inconscients du ça et les normes et les règles défendues par le surmoi. Le Moi tient compte du principe de réalité, des conséquences des actes et paroles et décide de la meilleure manière d’agir pour essayer de satisfaire les envies du ça de manière socialement acceptable. Si le Moi fonctionne sur le principe de réalité et s’adapte en fonction des situations rencontrées, le surmoi, lui, s’appuie sur le principe de moralité. Il est plus inflexible puisque ses jugements moraux sont immuables et visent à atteindre un idéal de perfection. Le Moi et le surmoi sont dépendants l’un de l’autre et interagissent. Freud écrit d’ailleurs : "Quand le moi a fait au surmoi le sacrifice d’un renoncement pulsionnel, il en attend comme récompense d’être davantage aimé de lui. La conscience de mériter cet amour, il la ressent comme une fierté".

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Définition : Qu'est-ce que le ça en psychanalyse ?

Le ça est situé dans l’inconscient. Il correspond au siège des pulsions (principalement les instincts de vie et de mort), à la partie primitive et instinctive de la personnalité. Il recherche le plaisir, la satisfaction immédiate de ses désirs (libido, agressivité...) sans considérer la réalité ni les normes sociales. Le ça stimule les choix, les motivations et représente une énergie, une force motrice car il exerce une pression pour réaliser au plus vite ses désirs. Les pulsions du ça peuvent entrer en conflit avec le surmoi et le Moi qui le confrontent respectivement à leurs exigences de moralité et de réalité.

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Quand apparaît le surmoi dans l'appareil psychique ?

Selon Freud, la formation du surmoi a lieu vers l’âge de 5 ans au moment de la résolution du complexe d’Oedipe. Ainsi, le petit garçon aime sa mère et s’identifie à son père qui est son modèle. Il réalise ensuite que son père constitue un rival dans cet amour. C’est ainsi que se forme le complexe d’Oedipe. L’enfant apprend alors à renoncer à la possibilité d’accéder aux objets de son désir et c’est ce qui donne lieu à la création du surmoi. "Pour Freud, c’est le père qui instaure la loi primordiale de l’interdit de l’inceste", rappelle Sophie Marret-Maleval.

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Cette notion de formation du surmoi a été remise en question par d’autres psychanalystes. Mélanie Klein se détache ainsi de cette idée et envisage une dimension précoce du surmoi, dès la naissance de l’enfant. "Pendant la grossesse, ainsi que l’illustre Lacan, le bébé jouissait du placenta, il était nourri par cette enveloppe dans le corps de sa mère. En naissant, l’enfant perd irrémédiablement la jouissance de cette enveloppe ce qui donne lieu à un manque. Cette perte est corrélée au fait de devenir sujet du langage, entre perte de jouissance et accès au langage se situent les prémices du surmoi", ajoute Sophie Marret-Maleval. Mélanie Klein constate ainsi "un surmoi très précoce et sauvage" avec des manifestations de tensions internes entre les désirs agressifs du tout-petit et les contraintes morales. Elle écrit ainsi : "Le surmoi précoce n’est pas seulement le résultat des influences parentales, mais également de la projection des pulsions agressives de l’enfant sur les figures parentales" (Klein, « Envy and Gratitude », 1957).

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Quand le surmoi est-il trop fort ?

Parfois, il arrive que le surmoi s’exprime trop fortement et devienne sévère et cruel. C’est souvent le cas suite à une éducation ou un environnement extrêmement strict et critique qui valorise la perfection ou bien à des expériences traumatisantes vécues pendant la jeunesse. La personne peut alors ressentir une culpabilité disproportionnée par rapport à ses actions ou pensées. Elle peut aussi s’imposer des standards, des règles, particulièrement élevés qui la conduisent à ne pas tolérer l’imperfection ni l’échec, à être peu compatissante envers elle-même. La personne peut alors adopter un comportement punitif envers elle, se priver de récompense, se dévaloriser… "On peut refouler les pulsions mais elles ne demandent qu’à ressurgir sous d’autres formes. La pulsion de mort quand elle déborde le Moi peut donner lieu à la mélancolie. La personne s’accable, s’accuse excessivement et s’auto-détruit", explique Sophie Marret-Maleval. Ce manque de tolérance face à l’imperfection peut entraîner des difficultés relationnelles, une peur de laisser sa spontanéité s’exprimer… Un surmoi trop exacerbé peut aussi favoriser une anxiété chronique, des épisodes dépressifs, des troubles obsessionnels-compulsifs (TOC) et altérer la qualité de vie.

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Comment diminuer son surmoi ?

Il existe plusieurs manières de lutter contre un surmoi trop présent. Cela peut passer par une thérapie comportementale et cognitive (TCC) qui va repérer les pensées négatives véhiculées par le surmoi rigide et va aider la personne à modifier ses pensées et réactions. La psychanalyse peut également aider à comprendre le mécanisme du surmoi trop fort en remontant aux origines inconscientes, à l’enfance et aux relations avec les figures d’autorité. La méditation de pleine conscience peut favoriser la prise de conscience et réduire la sévérité du surmoi.


Sources

Entretien avec Sophie Marret-Maleval, psychanalyste, professeur au département de psychanalyse de l’université Paris 8

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