Le neuromarketing fait-il vendre des journaux ?
Peut-on se servir des neurosciences pour concevoir des publicités plus vendeuses ? Peut-on choisir une couverture de magazine en fonction des résultats neurologiques qu'elle va susciter ?... C'est en tout cas ce que le neuromarketing promet aux annonceurs et c'est ce qu'a voulu expérimenter le magazine hebdomadaire scientifique New Scientist, qui a confié à la société Neurofocus la mission d'identifier la couverture du 7 août qui exerce le plus grand attrait sur le subconscient.
S'appuyant sur un éventail de capteurs électroencéphalographiques (EEG) haute densité pour mesurer l'activité des ondes cérébrales de personnes soumises à un test, NeuroFocus mesure et analyse les réactions à différents stimuli, principalement des publicités quand on voit les principaux clients de la société...
S'appuyant sur un éventail de capteurs électroencéphalographiques (EEG) haute densité pour mesurer l'activité des ondes cérébrales de personnes soumises à un test, NeuroFocus a mesuré et analysé leurs réactions à différentes couvertures du numéro de New Scientist du 7 août.
En surveillant l'activité électrique de tout le cerveau des sujets à mesure qu'ils découvraient chaque couverture et en utilisant une technique de suivi du regard destinée à identifier les parties spécifiques de la couverture examinées, NeuroFocus a pu mesurer la réaction immédiate de leur subconscient aux couvertures évaluée par l'intermédiaire de sept paramètres neurologiques : l'attention, l'engagement émotionnel, la fixation mnémonique, l'efficacité globale, l'intention d'achat, la nouveauté et la compréhension.
En évaluant l'impact d'un élément tel qu'une couverture de magazine à travers chacun de ces paramètres neurologiques, NeuroFocus revendique la possibilité d'aider l'éditeur à choisir la couverture qui est la plus susceptible d'attirer l'attention et d'intéresser des acheteurs potentiels au niveau du subconscient. Applicable à des cibles et dans des domaines très variés comme les marques, les produits, les emballages, le marketing en magasin et la publicité, cette technologie vise à discerner l'ampleur des réactions qu'ils provoquent dans le cerveau. Graham Lawton, rédacteur en chef adjoint de New Scientist, a déclaré :“Comme la plupart des magazines en kiosque nous avons besoin de créer des couvertures qui captent l'attention du public et suscitent son intérêt. Cette expérience nous a montré que sur le plan neurologique une couverture se démarquait très largement des deux autres. Il sera intéressant de voir dans quelle mesure le recours aux neurosciences peut permettre d'accroître les ventes en kiosque“.
Les trois couvertures testées (cf. ci-dessus) ont été très bien accueillies, mais, en termes d'efficacité neurologique globale, la couverture choisie a enregistré des résultats nettement supérieurs générés par des niveaux d'engagement émotionnel exceptionnellement élevés. Un niveau d'engagement émotionnel élevé favorise la fixation mnémonique et l'intention d'achat. On ne sait pas si cela a réussi à augmenter les tirages de la revue...
Au-delà de l'aspect scientifique indéniablement intéressant, le neuromarketing soulève cependant plusieurs controverses éthiques. Sa thèse est d'augmenter la vente de produits en jugeant la réceptivité du consommateur à des stimuli précis, en faisant l'impasse sur sa capacité de jugement. Est-ce que la recherche en neurosciences doit s'orienter vers de tels domaines pour le compte de sociétés privées qui cherchent à vendre un produit (ou même demain un candidat politique ? La société américaine MindSign Neuromarketing ayant déjà pris l'initiative de juger la réactivité via IRM à des discours du président Obama) ? Entre éthique scientifique et fièvre consumériste, de quel côté penchez-vous ? venez-vous exprimer sur nos forums.
Mise à jour 7 septembre : L'opération semble avoir été couronnée de succès, les ventes ayant largement dépassé les prévisions : “Nous avons travaillé avec NeuroFocus pour sélectionner un type de couverture attrayant pour le New Scientist, en faisant appel à leur technologie du neuromarketing“, a expliqué Graham Lawton, rédacteur en chef adjoint. “Cette édition du magazine a réalisé de fortes ventes en kiosques au Royaume-Uni, faisant d'elle la deuxième meilleure vente de l'année, ce qui est très inhabituel pour un mois d'août généralement calme. Cela représente une augmentation de 12 % par rapport à la même édition de l'année dernière, et bien supérieure à ce à quoi nous nous attendions pour une édition en cette période de l'année ; nous pouvons donc affirmer en toute certitude que l'expérience a été un succès.“
Luc Blanchot
PS : C'est la première couverture qui a finalement été retenue...
Source : Communiqué de Neurofocus et New Scientist - 6 août 2010
Photo et vidéos : New Scientist