Cette opération chirurgicale augmenterait le risque de cancer
D’après les résultats d’une nouvelle étude américaine, retirer le thymus à des patients se faisant opérer du thorax serait néfaste pour leur santé. Les explications du Dr Ivan Pourmir, oncologue à l’hôpital européen Georges-Pompidou (Paris).
Le thymus est une glande situé sous le sternum, dans la partie haute du thorax, près des poumons. Cet organe a pour rôle de fabriquer certains globules blancs, les lymphocytes T (T pour thymus, justement), qui aident notre organisme à se défendre. Des scientifiques américains ont conduit une étude qui permet de mieux cerner son rôle
Un organe retiré dans le cadre d’opérations chirurgicales
Pour ce travail, les scientifiques ont étudié les données de santé de 1420 volontaires qui ont eu leur thymus retiré lors d’une opération, contre celles de 6021 volontaires, possédant toujours cet organe et considérés donc comme patients-témoins. Ils ont ensuite comparé le nombre de décès des participants, la survenue de cancers et de maladies auto-immunes dans les deux groupes.
Résultats 5 ans après le retrait du thymus (thymectomie), les chercheurs ont constaté :
- Un risque de mortalité accru pour ces patients avec 8 % de décès contre 2,8 % dans le groupe témoin ;
- Un risque accru de cancer avec 7,4 % de malades chez le groupe ayant eu la thymectomie contre 3,7 % dans le groupe témoin ;
- Un risque augmenté de maladies auto-immunes ;
- Une baisse de la production des lymphocytes T ;
- Un taux plus élevé de cytokines pro-inflammatoires dans le sang.
Un lien avec le système immunitaire ?
Dans un communiqué, l’un des auteurs, le Dr Kameron Kooshesh, médecin interniste au Massachussetts General Hospital, indique que "l'ampleur de la mortalité et du cancer chez les patients ayant subi une thymectomie fut la plus grande surprise pour moi. Les résultats nous ont suggéré que l'absence de thymus semble perturber les aspects fondamentaux de la fonction immunitaire". Les auteurs concluent donc que la thymectomie perturbe l’homéostasie immunitaire et peut entraîner des conséquences néfastes pour la santé. Ils recommandent de donner la priorité à la préservation du thymus autant que possible.
Dans un commentaire accompagnant l'étude, une spécialiste de la myasthénie auto-immune critique le manque de données de l'étude et estime que la thymectomie reste utile dans cette indication.
Interrogé, le Dr Ivan Pourmir, oncologue à l’hôpital européen Georges-Pompidou, à Paris, trouve les conclusions de cette étude intéressantes. Il note toutefois un facteur de confusion "concernant le choix des patients, car bien souvent, ceux ayant subi une thymectomie l’ont eu à cause d'une chirurgie de cancer, du poumon notamment. Ils sont donc aussi naturellement plus à risque de rechute de leur maladie et dans ce type d’études, avec un nombre important de volontaires, il est souvent difficile de faire des ajustements".
Au-delà de cette remarque, le médecin trouve "utile" le fait de mettre en évidence ce lien entre le thymus, organe actif de la naissance à la fin de l’adolescence, et l’immunité. "Le thymus joue un rôle important dans la maturation des lymphocytes T, particulièrement de la naissance à la fin de l’adolescence. Après son rôle décline, il devient plus petit et moins actif, mais cette étude semble montrer que son rôle reste important même après cette période de la vie".