Des dizaines d’hôpitaux déjà en tension avant l'hiver: quelles solutions ? L'ordonnance du Dr Kierzek

Sihem Boultif Journaliste santé

Dans les colonnes de Ouest France, le ministre de la santé démissionnaire Fréderic Valletoux revient sur les difficultés de l’hôpital public en France. S’il affirme qu’une "cinquantaine d’établissements" seraient en tension, il ne précise pas le nombre d’établissements ayant dû fermer leurs portes totalement ou partiellement cet été. Il préfère voir le verre à moitié plein, arguant que "c’est un peu mieux que l’été dernier" et que "les tensions ne sont pas aussi fortes qu’au cours de celui de 2022".

Un "mur de la honte" devant les urgences du CHU de Brest

Face à cette situation, les soignants du CHU de Brest ont voulu marquer les esprits. Ce mercredi 21 août, ils ont dressé un "mur de la honte" comme ils l’ont baptisé, composé de dizaines de feuilles récapitulant les patients âgés et leur temps d’attente passé aux urgences, sur un brancard.

On peut par exemple lire qu’un patient de 78 ans a passé 34 heures sur un brancard, avant qu’il ne soit pris en charge. Ces chiffres, avancés par la CGT, ont rapidement été contestés par la direction du CHU de Brest, qui affirme que cela ne signifie pas "une absence de prise en soins des patients".

Pour le Dr Gérald Kierzek, médecin urgentiste et directeur médical de Doctissimo, "la direction essaye de déminer mais aucune communication de crise ne peut nier la réalité de conditions d'accueil et de soins indignes en France en 2024".

De quoi souffrent les hôpitaux publics aujourd’hui ?

Alors que nous ne traversons aucune grande épidémie de type Covid-19 ou bronchiolite, certains hôpitaux français sont en souffrance. Dans le territoire de Belfort, l’hôpital vient de déclencher le plan blanc pour la cinquième fois depuis 2023. Normalement destinés à pallier des situations exceptionnelles, ces mesures deviennent la routine. Comment l’expliquer ? "Encore une fois, nous vivons une crise structurelle des hôpitaux, avec des regroupements hospitaliers ayant conduit à des fermetures de lits et de services mettant en tension les établisements quasiment 365 jours/an" s’indigne le Dr Gérald Kierzek.

"Les dernières mesures comme la loi Rist ont aggravé la situation avec des fermetures de services faute de personnels et nous sommes dans un véritable cercle vicieux : les hôpitaux en tension entraînent un épuisement du personnel, qui démissionne en série ou se met en arrêts maladie, ce qui génère encore plus de tensions !".

Quelles sont les solutions à cette situation ?

Pour l’urgentiste, les différentes épidémies ne sont que les symptômes de la situation et non les causes. "La solution est de recréer des structures de proximité à taille humaine, véritables intermédiaires entre la médecine de premier recours (les médecins géneralistes, les centres de santé...) et les hôpitaux de référence ultra spécialisés".

Pour notre expert, l'évolution démographique, avec le vieillissement de la population et des pathologies - notamment chroniques - fragilisant les patients, rendent cette marche arrière sur les économies de santé plus que nécessaire : elle est urgente et indispensable.