Glyphosate : l’herbicide ne serait pas cancérigène, selon une agence européenne
Retour du glyphosate sur le devant de la scène : l’herbicide controversé n’est pas cancérigène, selon l’Agence européenne des produits chimiques (Echa). Tollé des associations de lutte contre les pesticides de synthèse qui dénoncent un “déni de science”.
Deux positions discordantes
En finira-t-on un jour avec ce produit ? Quoi qu’il en soit, nouveau rebondissement dans la saga du glyphosate, suite à l’avis rendu fin mai par l’Agence européenne des produits chimiques (Echa) qui affirme que l’herbicide n’est pas cancérigène. Dans un communiqué, le comité des risques de l’agence a en effet conclu une nouvelle fois “que la classification du glyphosate en tant que cancérigène n’est pas justifiée”. L’Echa maintient en effet sa position prise en 2017.
Le glyphosate reste toutefois classifié comme toxique pour les organismes aquatiques et comme pouvant entraîner des dommages oculaires graves.
Cette nouvelle expertise a suscité un tollé au sein des associations de défense de l’environnement, dont Générations Futures et Pesticides Action Network. Pour mémoire, le glyphosate a été classé comme cancérigène probable pour les humains en 2015 par le Centre international de recherche sur le cancer (CICR), un organisme qui dépend de l’Organisation mondiale de la santé (OMS). Et depuis plus de cinq ans, affirment les associations, les preuves scientifiques de la génotoxicité et du potentiel cancérigène de l’herbicide se sont encore renforcées.
Un système d’évaluation à revoir
Question : comment expliquer une pareille divergence ? “Les agences réglementaires, dont l'Echa, sont piégées et enfermées dans un système d'évaluation basé uniquement sur des études réalisées selon les normes OCDE. Tout ce qui n'est pas OCDE est jugé non fiable. En conséquence, seules les études de l'industrie sont prises en compte, explique Pauline Cervan, chargée de mission scientifique et réglementaire à Générations Futures. En restant enfermé dans ce dogme, on est forcément dans le déni de science.”
L’Echa passerait ainsi à côté de nombreux effets toxiques qui ne sont pas ou mal couverts par les normes OCDE.
Pour Pauline Cervan, “le système global d'évaluation est à revoir. La science réglementaire montre ici ses limites et son éloignement de la science.”
Un mauvais signal ?
Cette expertise de l’Echa peut-elle ouvrir la porte à un possible renouvellement de l’autorisation du glyphosate au sein de l'Union européenne ? L’autorisation actuelle a été étendue en 2017 pour cinq ans supplémentaires. Elle expire le 15 décembre prochain, si tant est que l’autorité européenne de la sécurité alimentaire (EFSA) ait rendu son avis à cette date. Si tel n’est pas le cas, l’autorisation sera automatiquement prolongée jusqu’à la fin du processus d’évaluation.
Pour Pauline Cervan, le renouvellement de l'autorisation n'est pas forcément garanti, en dépit de la position prise par l’Echa. “L'EFSA n'a toujours pas donné son avis et prend visiblement la question plus au sérieux. En effet, elle prévoit un an de plus pour rendre son rapport. L'EFSA peut donc encore émettre un avis négatif en jugeant qu'il existe trop d'incertitudes, en prenant en compte le fait par exemple que les populations sont largement exposées au glyphosate. Mais bien sûr, cette expertise est un mauvais signal".