IVG : la fermeture de plusieurs centres publics inquiète
Le centre d'IVG de l'hôpital Tenon, à Paris, doit bientôt fermer ses portes, après 3 autres centres en Ile-de-France. Le Planning Familial dénonce “une atteinte grave à l'obligation légale d'organisation de l'offre de soins en matière d'avortement à l'hôpital public“, prolongeant le point de vue intitulé “Non, ma fille, tu n'iras plus avorter à l'hôpital public !“ publié dans les colonnes du journal Le Monde ce jour.
La diminution de l'offre de soins publics (suppressions de services, de lits, de postes à l'hôpital public) a des conséquences de plus en plus visibles : attente interminable aux urgences, délais de plusieurs mois pour les consultations hospitalières, sous-effectifs dans les services hospitaliers ralentissant leur fonctionnement, etc. De même, les centres d'IVG (Interruption Volontaire de Grossesse) autonomes ferment un par un, en Ile-de-France (bientôt 4 fermetures de centres avec Tenon, actuellement occupé par une trentaine de militants), ou encore à Lyon. Cela risque notamment d'allonger considérablement les délais de recours à l'IVG dans les mois qui viennent et de compliquer les démarches, aux détriments de la santé des femmes concernées.
De plus, “pendant que le service public de santé se saborde, le privé se désengage progressivement de la pratique des IVG, jugée peu rentable“, comme le soulignent dans le journal Le Monde Maud Gelly, Béatrice Fougeyrollas et Emmanuelle Lhomme, médecins au centre d'IVG de l'hôpital de Colombes (Hauts-de-Seine), et Maya Surduts et Nora Tenenbaum, militantes de la Coordination des associations pour le droit à l'avortement et à la contraception. Elles ajoutent que l'intégration de l'activité IVG dans les services de gynécologie-obstétrique la dénature, privant les femmes des soins d'équipes dédiées et motivées par ce droit des femmes, conquis de haute lutte dans les années 70 (et toujours contesté aux Etats-Unis ou en Irlande, par exemple).
Ces professionnelles de santé ainsi que le Planning familial et des dizaines d'associations soutiennent l'appel à manifestation du CNDF (Collectif National pour les Droits des Femmes) et de Femmes Solidaires le 17 octobre à Paris (14h30 Bastille), “pour les droits des femmes, pour leur liberté, pour leur autonomie, pour la défense de l'hôpital public et de ses structures IVG autonomes (en termes de personnel, de budget et de direction), et pour la création d'autres structures dédiées à l'IVG dans les hôpitaux où elles n'existent pas.“
Bien sûr, comme le rappelle Jean-Marie Le Guen, le président du conseil d'administration de l'AP-HP, le nombre d'IVG réalisé stagne, voire augmente dans les hôpitaux publics. Donc si l'AP-HP doit tenir compte des revendications et rassurer sur le maintien d'un service de proximité, la prévention doit également être renforcée, notamment l'information sur les modalités de contraception : trop de femmes, notamment jeunes, ne connaissent que la pilule, moyen efficace mais contraignant au quotidien. Or le patch (hebdomadaire), l'anneau (mensuel) ou l'implant et le stérilet (pluri-annuels) offrent d'autres possibilités, encore trop méconnues, sous-utilisées et parfois non remboursées.
Au-delà du nécessaire maintien des structures de proximité avec des délais d'attente raisonnables, l'information du grand public et la formation des médecins sont donc peut-être également à repenser, afin de permettre aux jeunes filles et femmes d'aujourd'hui de mieux se protéger, et de préserver ce droit humain fondamental qu'est l'avortement.
Jean-Philippe Rivière
Sources :
- “Le droit des femmes menacé par des restructurations de centres d'IVG autonomes“, communiqué du presse du planning familial, 15 octobre 2009
- “Non, ma fille, tu n'iras plus avorter à l'hôpital public !“, Le Monde, 15 octobre 2009
- “Garantir le plein respect du droit à l'IVG dans les meilleures conditions médicales et humaines“, communiqué du presse de Jean-Marie Le Guen, 15 octobre 2009
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