Parler sans honte de l'incontinence
Bien qu'elle touche plus de trois millions de personnes, l'incontinence pourrait bien constituer la dernière maladie taboue. Objet de non-dits honteux ou de silences coupables, les fuites urinaires ramènent à des images péjoratives. Pourtant, ce trouble ne doit pas être considéré comme une fatalité, des solutions existent.
Le 1er juillet 1998, l'Organisation mondiale de la santéorganisait la première consultation internationale surl'incontinence. A cette occasion déjà, lesspécialistes avaient rappelé “qu'il y a plus de 200millions de cas d'incontinence urinaire dans le monde et la vie deces personnes, qui trop souvent souffrent en silence d'un troublequi leur gâche l'existence, en est profondémentperturbée“ (1).
Psychanalyse de l'incontinence
Président de la première consultation internationalesur l'incontinence et chirurgien en urologie au Bristol UrologicalInstitute (Southmead Hospital), le Dr Abrams déclarait ainsique “Maintenant que l'on évoque ouvertement leproblème de l'impuissance, la question de l'incontinencereste le seul véritable tabou du 20e siècle“.
Dans le cadre d'une conférence de presse organiséepar les laboratoires Madaus (2), le Dr Gisèle Harrus-Revidi,psychanalyste et directeur de la recherche àl'université Paris VII évoquait la symbolique desmictions “Si l'urine est l'objet d'attendrissement chez lebébé, considéré comme un signe de vie,elle devient horrible chez le vieillard. Le contrôle dusphincter est un des éléments qui nousdifférencie de l'animal et l'incontinence est vécuecomme une régression, qui de plus renvoie àl'inconscient collectif du “pipi dans la culotte“ et son lotd'interdits parentaux“.
Enfin, la psychanalyste souligne que dans nossociétés modernes, un corps en bonne santé estun corps sec, les différentes composantes del'humidité sont des ennemis à proscrire (sueur,pertes vaginales, etc.).
Un tabou qui a la vie dure
Résultats : ceux qui souffrent d'incontinence se sententseuls et ont tendance à sombrer dans une certainefatalité. Malgré la mise au point de traitements deplus en plus efficaces, le vécu de millions de femmes esttel que deux malades sur trois n'osent pas consulter3 et viventleur incontinence comme une dégradation honteuse qu'il fautà tout prix cacher. La première consultation d'unpatient pour des troubles vésicaux peut n'intervenir que 5à 7 ans après l'apparition des premierssymptômes !
Mais grâce à l'effort des associations de patients etdes sociétés savantes, la situation sembledésormais changer. Selon l'Association Françaised'urologie, seuls 10 % des patients incontinents osaient consulteril y a dix ans, ils sont désormais 25 à 30 % (3).Cette évolution est sans aucun doute positive mais il resteencore beaucoup à faire. La dédramatisation del'incontinence passera forcément par l'information et unesensibilisation du grand public aux nouveaux traitements quipermettent aux incontinents de ne plus négliger leur viesociale et personnelle.
Des conséquences dramatiques sur la qualité devie
Dans la très grande majorité des cas, il est possiblede traiter l'incontinence ou du moins de diminuerconsidérablement la gêne qu'elle peut causer. L'impactpsychosocial de l'incontinence a été l'objet dedifférentes études. Et beaucoup s'accordent surl'impact considérable de l'incontinence sur laqualité de vie des malades. Sur ce plan, c'estl'incontinence liée à une hyperactivitévésicale (à l'origine d'envie pressante) qui est plusdélétère que l'incontinence liéeà l'effort (4,5). Moins facilement contrôlables, cesfuites urinaires causent plus d'anxiété. Des liensentre dépression et impériosités ontmême été mis à jour (6).
Aujourd'hui, l'incontinence ne doit plus êtreconsidérée comme une fatalité, des solutionsexistent : rééducation, médicaments ouchirurgie. Vous n'êtes pas seul(e), des millions de personnessouffrent du même trouble qui leur gâche la vie. Lepremier pas vers la guérison est d'en parler à votremédecin.
David Bême
1 - Communiqué de presse OMS/49 - 1er juillet 1998 -Organisation mondiale de la santé
2 - Conférence de presse “Comprendre le tabou del'incontinence urinaire pour mieux le briser“ organisée parles laboratoires Madaus- 9 octobre 2003
3 - AFU - Semaine nationale de sensibilisation de l'incontinenceurinaire
4 - BMJ 1987 ;295 :528-529
5 - BJU Int.2003 Nov ;92(7) :731-5
6 - Neurourol Urodyn.2003 ;22(6) :563-8 Contacts Association d'Aide aux Personnes Incontinentes (AAPI)
5 avenue du Maréchal Juin
92100 Boulogne Tél : 01 46 99 18 99
Fax : 01 46 99 18 85 E-mail : [email protected]
Site web : http://www.aapi.asso.fr Femmes pour toujours Association française pour l'information sur laménopause et ses traitements Tél. : 01 43 74 36 92
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