Diversification alimentaire de l’enfant : ces recommandations qui étonnent les parents
Régulièrement, de nouvelles recommandations alimentaires concernant les enfants sont mises à jour, pour lutter notamment contre le surpoids. Mais sont-elles bien comprises des parents ? Une enquête à fait le point.
La bonne santé d’un enfant passe en premier lieu par son assiette. C’est dans ce cadre que Santé Publique France prend à cœur de mettre à jour régulièrement ses recommandations auprès des parents pour un régime adapté, et ce, dès le plus jeune âge au travers de la diversification alimentaire. Le site mangerbouger.fr relaie les dernières campagnes et préconisations en la matière. L’enjeu est important : selon une étude réalisée en 2016, près de 19 % des filles et 14 % des garçons de 7 à 9 ans étaient en surpoids, dessinant une situation d’urgence. Mais toutes ces préconisations sont-elles entendues par les parents ? Une enquête qualitative a été réalisée auprès d’une quarantaine de parents représentatifs. Et de nombreux points ont encore besoin de faire leur chemin.
Des recommandations qui ne sont pas encore totalement intégrées
L’enquête a permis de révéler plusieurs cas de figure qui ont fait réagir visiblement les parents interrogés.
Ajouter de la matière grasse aux préparations maison
Martelé depuis des années, le message concernant la nécessité de diminuer l’apport en matières grasses, en sucre et en sel est aujourd’hui bien connu du grand public. Mais l’ajout de matières grasses dans les préparations maison ou dans les petits pots, qui n’en contiennent pas déjà, est bien conseillé pour assurer le bon développement des enfants. Ces lipides sont en grande partie apportés par le lait maternel ou infantile, mais doivent aussi être apportés par l’alimentation dès le début de la diversification.
Eviter le miel et des produits laitiers à base de lait cru
Bien que ces produits reflètent souvent un savoir-faire artisanal de nombreux parents sont étonnés de découvrir qu’ils ne sont pas conseillés aux enfants de moins de 3 ans. En effet, les risques microbiologiques liés à ces aliments sont trop présents pour le système immunitaire en construction de l’enfant.
Donner des aliments allergènes dès 4 mois
En effet, un bébé peut commencer à découvrir toutes les familles d’aliments entre 4 et 6 mois, y compris ceux qui peuvent provoquer une allergie. Pareil pour le gluten. Cela est même recommandé, car on sait aujourd’hui que plus les enfants les goûtent tôt, plus ils développent leur tolérance à ces aliments. A la question Faut-il donner des aliments allergènes aux enfants dès le début de la diversification alimentaire ?", la majorité des parents ont, pour la plupart, répondu par la négative.
Introduire les légumes secs
Contrairement aux idées reçues des parents interrogés, les légumes secs n’engendrent pas de problèmes digestifs et leur présence dans les assiettes des petits améliore la qualité nutritionnelle du repas, car ils sont riches en fibres et en protéines végétales.
Se passer des aliments "spécial jeune enfant"
Au cours de l’enquête les parents ont aussi découvert qu’ils pouvaient, dès 1 an, alterner lait de croissance et lait de vache entier UHT. Idem pour les préparations lactées spécialisées pour les petits qui peuvent être remplacées par des yaourts nature au lait entier, bien moins chers. La mention "spécial pour jeune enfant" relève du marketing, ce que peu de parents savent encore.
Enfin, l’enquête à pu mettre en évidence certaines injonctions, bien comprises des parents, mais qui relèvent pour eux d’une charge supplémentaire, et dont ils se passeraient bien. Ainsi, pour la majorité, troquer le petit déjeuner généralement trop sucré contre une version plus saine serait un sacrifice du plaisir à passer ensemble. Et le “fait maison” préconisé s’avère stigmatisant pour nombre d’entre eux qui n’ont ni le temps, ni le budget.
Des enquêtes indispensables pour se placer au côté des parents
Pour Corinne Delamaire, auteure et chargée d’expertise scientifique en santé publique impliquée dans ce projet, et qui s'explique dans les lignes de Sciences et avenir : "Ces enquêtes qualitatives sont indispensables avant de lancer des campagnes de prévention auprès de la population parce qu’elles permettent de réajuster le message en fonction des pratiques réelles des familles".
Ainsi, il ne s’agit pas simplement d’annoncer une nouvelle information. Lorsqu’une information est contre-intuitive pour les parents, comme celle sur les matières grasses, la preuve est donnée ici : un message d’explication scientifique est nécessaire pour accompagner la recommandation. De même, lorsque le message rencontre une forte résistance des parents, - c’est le cas ici pour les sucreries du goûter -, les experts doivent aussi changer leur discours pour éviter les notions d’interdiction ou d’obligation.
En revanche, selon l’experte, une éducation à la nutrition est plus que jamais utile dans un environnement où beaucoup de produits alimentaires peu chers ont une valeur nutritive faible, et que les personnes à faible revenu et avec un niveau de diplôme moins élevé sont également les plus touchées par des maladies comme l’obésité. La question pour une meilleure alimentation des enfants doit donc combiner à la fois le savoir scientifique, l’affectivité des personnes concernées et leur souci d’agir au mieux pour leurs enfants, et une réalité sociale : l’inégalité de revenus et de conditions de vie dans la société française.