Surprotection parentale : quels sont les risques ?
Protéger son enfant est nécessaire pour lui donner un cadre sécuritaire. En revanche, le surprotéger d’une réalité perçue comme menaçante n’est pas sans risque. "Les parents peuvent le fragiliser ou au contraire en faire un enfant roi" affirme Didier Pleux, docteur en psychologie de développement. Zoom sur un nouveau phénomène éducatif.
Marine accompagne toujours sa fille de 13 ans à l’école, alors qu’il y a un bus. Georges fait un menu spécial à Marie 8 ans ; il ne lui donne que ce qu’il aime. Dès qu’Edouard 11 ans, se plaint d’un professeur, Paul demande un rendez-vous à l’école. Protéger son enfant pour qu’il avance en sécurité dans la vie est naturel et nécessaire. Toutefois, on assiste aujourd’hui à un phénomène : la surprotection des parents. "Elle se définit majoritairement par un évitement pour l’enfant du principe de réalité et des frustrations" explique Didier Pleux, docteur en psychologie du développement.
La surprotection : un évitement de la réalité
"Le monde extérieur est dangereux !". Un slogan qui pourrait bien être celui des parents "surprotecteurs". Leur principal objectif ? "Faire en sorte d’apporter un maximum de bien-être à leur progéniture pour atténuer cette réalité" a observé Didier Pleux. Si un enfant n’aime pas les légumes, ces "parents-poules" ne lui en donnent pas. Son instructeur de judo est trop sévère, ils le retirent de cette activité. Il se plaint d’un camarade de classe trop méchant, ils en parlent à un parent.
Face à des situations perçues et relayées comme difficiles, ces parents vont mettre en place des stratégies et des actions pour "surprotéger" leur enfant de la dure réalité. "Soucieux que leur enfant ne souffre pas des frustrations de la vie, ils privilégient son bonheur en le soustrayant à une confrontation avec les autres et leur environnement" explique notre expert.
Parents surprotecteurs : explications
Ce qui les anime, c'est le stress. C'est "majoritairement de l’anxiété !" répond Didier Pleux. Dans le climat d’insécurité actuel, entre crise économique et violences, ses parents inquiets n’ont de cesse de tendre un filet de protection pour leurs enfants.
Sur le plan de la scolarité par exemple, un secteur particulièrement sensible, ils mettent en place des tas de stratégies pour qu’ils réussissent. "Certains vont même jusqu’à faire les devoirs de leurs enfants" ajoute Didier Pleux.
Les risques bien réels de surprotéger votre enfant
En cherchant à lui éviter les nombreux aléas de la vie, les "parents surprotecteurs" le fragilisent, avec différents troubles à la clé.
Des difficultés d’adaptation
Faire l’apologie d’un monde sans aspérités n’est pas sans risque. En dehors de son royaume familial, l’enfant n’a pas de mode d’emploi. "Il va sans cesse se plaindre des relations avec les autres, perçus comme « méchants » et de son environnement qui ne convient pas, sans jamais prendre ses responsabilités dans les difficultés qu’il rencontre" développe notre expert. C’est toujours l’élément extérieur qui est en cause.
Un "enfant roi"
En évitant ainsi les frustrations à l’enfant, les parents posent l’exacerbation du principe de plaisir en priorité. "Baigné dans une réalité où prime l’assouvissement du plaisir immédiat, l’enfant vit comme bon lui semble. Ses parents étant en charge d’accommoder le réel en fonction de ses demandes", ajoute Didier Pleux. Ces derniers deviennent assujettis au désir de l’enfant qui les instrumentalise. Son égo magnifié, il se campe en "enfant roi", véritable tyran pour son entourage.
Les conseils pour trouver le bon équilibre
"L’éducation repose sur l’apprentissage de l’autonomie. L’acceptation du principe de réalité et des frustrations en fait partie" énonce Didier Pleux. Les messages d’amour et de valorisation ne doivent en aucun cas évacuer l’épreuve du réel, qui implique des contraintes, des limites, des émotions négatives.
Au registre des outils d’autonomie, l’application d’une juste autorité arrive en bonne place : "Elle permet une médiation de l’enfant avec le réel et entraîne une notion d’apprentissage". Par ailleurs, notre expert rappelle que "le conflit fait exister "l’autre" (le parent, le camarade de classe, le professeur) et l’environnement. Sans cette friction, il y a l’idée que le monde doit s’adapter à lui".
Et c’est bien là le problème, notre époque peine à trouver un juste milieu entre l’autoritarisme d’hier et le laxisme d’aujourd’hui. La tentation d’être sympa et toujours conciliant pour gagner l’amour de ses enfants domine.
En effet, poser un cadre et des limites peut entrainer des paroles du type : "Je ne vous aime plus et vous êtes méchants". Or poser ce cadre est structurant pour l’enfant, il détermine justement la frontière entre protection et surprotection. Si les standards éducatifs ont changé, trouver le juste milieu s’avère une priorité, pour les enfants comme pour les parents.