Nouvel espoir d'un vaccin antisida (Février 2003)
Grâce à un vaccin, deux équipes de chercheurs français ont réussi à réveiller le système immunitaire de patients infectés par le virus du Sida (le VIH), permettant à certains d'interrompre leur traitement. Ces résultats très encourageants pourraient demain changer la prise en charge des séropositifs. Décryptage de cette première mondiale.
Dévoilés à Boston lors de la 10 e Conférence américaine sur les rétrovirus et les infections opportunistes, ces résultats français relancent les espoirs d'un vaccin destiné aux personnes déjà malades.
Le principe du vaccin thérapeutique
Pour mémoire, le système immunitaire des malades infectés par le VIH, inondés de virus, ne peut plus se défendre. Désormais, les traitements antirétroviraux peuvent faire baisser la quantité de virus dans le sang en dessous de seuil détectable. Dans ces conditions le système immunitaire est mis au repos, le virus n'étant plus là pour le stimuler.
Les chercheurs français ont proposé, sous la houlette de l'Agence Nationale de Recherche sur le Sida (ANRS), de booster le système immunitaire en l'exposant à un cocktail inoffensif ressemblant au VIH (fragments d'ADN capables de produire certaines protéines virales).
L'organisme réagit alors en produisant des anticorps dirigés spécifiquement contre ces particules étrangères et en mobilisant des cellules tueuses, les lymphocytes. En quantité et qualité suffisantes pour autoriser un arrêt des médicaments, au moins pendant un certain temps…
Une hypothèse de travail qui a d'emblée séduit les patients infectés par le VIH, qui supportent de plus en plus mal leurs médicaments, trop nombreux, aux multiples effets secondaires : le recrutement de volontaires infectés n'a jamais été aussi facile que pour ces essais de vaccinothérapie ! Précisons qu'il s'agit ici d'un vaccin thérapeutique, c'est-à-dire pour soigner des personnes déjà infectées, et non d'une vaccination au sens habituel, qui prévient une maladie.
Les résultats des premiers essais
Dans les deux essais présentés à Boston (70 patients dans le premier groupe et 48 dans le second), la vaccinothérapie a été capable d'induire une réponse immunitaire chez environ 60 % des personnes infectées. L'efficacité du vaccin se traduisait par un meilleur contrôle de la multiplication virale. Après 4 injections de vaccin et 3 mois d'interruption de traitement, la quantité de virus dans le sang (appelée la "charge virale") d'un patient vacciné sur 4 était toujours bien contrôlée, sans médicament. Et pour ceux qui présentaient une augmentation de la charge virale obligeant à une reprise du traitement, ce rebond était plus tardif.
Des résultats très encourageants, selon le coordinateur de l'un des essais, le Pr Christine Katlama (Hôpital de la Pitié-Salpêtrière à Paris). « Nous sommes au début d'une belle histoire thérapeutique, estime-t-elle, comme celle que nous avons connue à la découverte du premier médicament antirétroviral ».
Ces essais ont en tout cas montré qu'il était possible de rééduquer le système immunitaire de personnes infectées par le VIH : "Peut-être un jour ce système pourra-t-il relayer les médicaments antiviraux", espère le Pr. Yves Lévy (Hôpital Henri Mondor à Créteil) qui coordonne le second essai.
* Agence nationale de recherches sur le Sida, Tél. 01 53 94 60 00