Paternité : qui sont les pères au foyer ?
Certains hommes deviennent pères au foyer et s'occupent de leur enfant. Tandis que d'autres assument la garde, en cas de séparation. Zoom sur une tendance.
A une époque où les bouleversements touchent aussi la paternité, les hommes se découvrent "une mère comme les autres", comme en témoigne Damien Lorton dans son livre 1. Comme 2 % des autres pères au foyer, c'est lui qui s'occupe de ces enfants. Si hier encore, le statut et le rôle du père étaient fortement empreints d'une image traditionnelle dans les mentalités ; aujourd'hui, les contours s'estompent ! Zoom sur un phénomène en progression.
Père au foyer : un nouveau modèle de paternalisme
"Dans la majorité des cas, cette évolution est conjoncturelle" prévient le pédopsychiatre Patrice Huerre, auteur de "Pères solos, pères singuliers". La crise et l'augmentation des divorces y sont pour beaucoup.
Il existe deux catégories de pères au foyer :
- ceux qui arrêtent de travailler (ou prennent un congé parental) pendant que leur conjointe travaille.
- ceux qui forment une famille monoparentale, plus conséquente. Le nombre d'hommes qui assument en solo la garde des enfants, représente entre 15 à 20 %, un chiffre en constante progression2.
Dans un cas comme dans l'autre, le choix n'en est pas toujours un. Rappelons que les gardes dites classiques attribuées au père sont obtenues en cas de démission ou abandon maternel. Tandis qu'un retour à la maison et donc aux enfants est souvent le fruit d'un licenciement. Reste que nombreux sont ceux qui y ont pris goût, rapport aussi à des conditions de travail de plus en plus pénibles. Pour d'autres couples, non mariés souvent, la garde des enfants peut s'établir autour d'un accord commun.
"N'oublions pas que cette émergence d'un nouveau modèle est possible également grâce aux femmes", poursuit le pédopsychiatre. Ces dernières s'autorisent à la fois à réussir et à ne pas se sentir dépossédée d'un rôle exclusif auprès des enfants. Laissant de fait une nouvelle place aux hommes.
Les hommes plus "maternels" ?
Ceux qui prennent la décision de devenir père au foyer, et y trouvent leur compte, ont développé une compétence autour d'un mode affectif différent. On a pu constater qu'une fois en charge des enfants, les hommes rechignent davantage à endosser le rôle d'un pater familias, compatible avec certains codes de virilité avérés. Ils revendiquent le droit à la tendresse, au contact physique, à l'écoute… Et la place de l'autorité ? Chaque médaille a son revers et il semblerait que les pères rencontrent les mêmes difficultés que les mères. A savoir, si proches de l'enfant, ils ont aussi du mal à faire preuve d'autorité, et doivent tenir bon.
Pour conclure, au même titre qu'une femme, il y autant de modes que de personnalités qui se révèlent pour prendre soin d'un enfant. D'après Patrice Huerre, "En réalité ce n'est pas tant la part maternelle de l'homme qui s'exprime, mais bien une nouvelle potentialité parentale".
Père au foyer : un nouvel enjeu pour les enfants ?
La question des changements de repères pour l'enfant se pose. Dans une nouvelle configuration de type "papa coud et maman cloue", la famille est vécue sur un mode de "démocratie apparente", comme l'appelle Patrice Huerre.
La fonction paternelle traditionnelle est alors redistribuée, et exercée par chacun des deux parents, en fonction des besoins et des situations. Le pédopsychiatre défend l'idée selon laquelle, chacun porte en lui la fonction d'autorité, d'affection et de protection, d'égale manière, l'un pouvant se substituer à l'autre. En d'autres termes : "Que l'on soit homme ou femme, chacun a un potentiel parental… C'est l'enfant qui fait le parent" résume ce dernier.
Dans la mesure où l'enfant trouve un investissement affectif stable et une réponse à ses besoins fondamentaux, il va s'attacher à l'un comme à l'autre.
Etre père au foyer, pas si facile...
Beaucoup de père au foyer tâtonnent dans l'obscurité à la recherche d'un mode d'emploi… encore inexistant. A les écouter, tout porte à croire qu'il existe un réel décalage entre leur expérience de vie et l'organisation de notre société. Ce qui n'a rien d'étonnant ! Ses bouleversements sociaux apparents remettent en question des schémas inconscients hérités depuis l'aube des temps. Ce qui peut prendre du temps, même si nous sommes capables, femmes, hommes, comme enfants, de booster nos facultés d'adaptation à de nouvelles représentations
Toutefois, il y a fort à parier que ce glissement d'une société où l'autorité était de type paternel, vers une autre de type parental, est bel et bien en cours. Et bien plus que le fait des hommes, c'est tous ensemble que nous y contribuons… En famille !