Levothyrox : le préjudice corporel lié au changement de formule reconnu par la justice pour la première fois
Il s’agit d’une première dans l’affaire du Levothyrox, ce médicament dont le changement de formule en 2017 avait provoqué de nombreux effets secondaires chez des patients. Une patiente toulousaine a reçu une indemnisation du laboratoire Merck pour les souffrances corporelles et psychologiques endurées durant les six premiers mois de la commercialisation de la nouvelle formule.
Si le préjudice moral avait déjà été reconnu par la justice, pour défaut d’information sur la nouvelle formule, c’est la première fois qu’un tribunal reconnaît le préjudice corporel engendré par le changement de composition du médicament Levothyrox.
Pour rappel, fin mars 2017, la filiale française du laboratoire allemand Merck commercialise la nouvelle formule du Levothyrox (indiqué dans les troubles de la thyroïde). Celle-ci utilise le même principe actif que l’ancienne formule, la lévothyroxine, mais contient de nouveaux excipients. L’objectif étant de rendre sa concentration plus stable pour augmenter son efficacité. Mais rapidement, des patients se plaignent de nombreux effets secondaires (crampes, maux de tête, vertiges, perte de cheveux…) qu’ils associent à la prise de cette nouvelle formule.
Une indemnisation de quelques milliers d'euros
En octobre 2017, des patients saisissent la justice. En juin 2020, le laboratoire Merck est condamné à verser 1 000 euros à chacun des 3 300 plaignants pour préjudice moral lié à un défaut d’information sur la nouvelle formule. En revanche, le préjudice corporel lié aux nombreux effets secondaires de la nouvelle formule n’avait jusqu’à présent pas été reconnu par la justice française. C’est désormais chose faite ! Le 11 juillet 2023, le tribunal judiciaire de Toulouse a rendu un jugement en faveur d’une patiente : il a condamné le laboratoire Merck à indemniser la victime durant les six premiers mois de la commercialisation de la nouvelle formule, pour préjudice corporel. "Nous n'avions jamais réussi jusqu'à présent à obtenir l'indemnisation des souffrances endurées pendant les six mois durant lesquels il n'existait pas d'alternative thérapeutique à ce médicament. Des personnes ont souffert de crampes, de maux de tête, de prise de poids, de perte de cheveux... Grâce à une expertise de deux médecins endocrinologues, ma patiente qui ne prenait rien d'autre comme médicament que du Levothyrox, s'est vue reconnaître le préjudice corporel subi, avec une indemnisation de quelques milliers d'euros”, a déclaré l’avocate de la plaignante, maître Stella Bisseuil.
La patiente toulousaine aurait touché moins de 5 000 euros, une somme qu’elle juge insuffisante au regard du préjudice corporel enduré. Interrogée par le média France Bleu Occitanie, elle dit être “contente de ce jugement, de cette reconnaissance” mais aurait espéré une indemnisation plus élevée pour avoir souffert de “maux de tête, de ballonnements, de grosse fatigue, de prise de poids”, à cause d’un médicament.
Un cas qui pourrait faire jurisprudence
Maître Stella Bisseuil précise que le laboratoire Merck peut faire appel de cette décision. Au total, l’avocate défend une cinquantaine de plaignants de la région toulousaine. Elle a fait savoir que "chaque cas sera traité différemment, explique-t-elle, en fonction des effets subis", mais elle espère que "la reconnaissance de ce préjudice corporel finira par faire jurisprudence."