Antidépresseurs et alcool : un mélange à proscrire
La consommation d’alcool est fortement déconseillée pendant un traitement sous antidépresseurs. Quels sont les risques d’une telle association ? Le Docteur Nicolas Neveu, psychiatre-psychothérapeute à Paris, nous éclaire sur la question.
Les antidépresseurs, prescrits par un médecin, doivent faire l’objet d’une observance et d’un suivi rigoureux. La prise d’alcool est alors fortement déconseillée, puisqu’elle risque d’accroître les éventuels effets indésirables des médicaments. La question du traitement de l’alcoolisme est pourtant cruciale, et la prise d’antidépresseurs a toute sa place dans la prise en charge de l’état alcoolique, comme nous l’explique le Docteur Nicolas Neveu, psychiatre-psychothérapeute.
Les effets secondaires des antidépresseurs
Comme le précise le spécialiste : "Les effets secondaires des antidépresseurs dépendent de leur classe médicamenteuse. Ils sont généralement très transitoires et dus à l’imprégnation sérotoninergique initiale". Par exemple, les antidépresseurs sérotoninergiques peuvent entraîner des bouffées de chaleur, de l’anxiété, de l’insomnie, des vertiges mais aussi des manifestations digestives comme des diarrhées ou de la constipation.
Les risques de cumuler alcool et antidépresseurs
La prise d’alcool peut justement amplifier ces effets secondaires tout en diminuant l’effet du médicament antidépresseur. Il existe également d’autres risques : "Conjugué à des antidépresseurs, l’alcool peut entraîner une somnolence, déjà favorisée par la prise d’alcool elle-même, mais aussi une augmentation du risque hépatique".
Il est donc primordial de bannir totalement la prise d’alcool pendant le traitement et d’observer strictement la posologie prescrite par le médecin psychiatre et ses recommandations. Le Docteur Neveu précise qu’il n’existe pas d’effet secondaire typique à une classe de molécule en particulier et que le risque est le même pour tous les médicaments antidépresseurs.
Alcool et dépression, quelle prise en charge ?
De nombreux alcooliques présentent un profil dépressif et doivent donc être soignés. "La comorbidité des deux troubles est très fréquente. Un psychiatre doit toujours rechercher une dépression chez un patient alcoolique et inversement".
La difficulté est encore plus grande pour ces patients que pour des individus qui ne boiraient qu’occasionnellement. Comme le précise le Docteur Neveux, ils sont aussi plus à risque de souffrir de dépression : "Alors que pour un homme ou une femme qui n’a pas un usage pathologique de l’alcool, le risque de souffrir d’un EDM (état dépressif majeur) au cours de sa vie est de 16 %, ce taux passe à 40 % pour les personnes alcooliques".
Le dialogue entre le médecin et son patient est alors fondamental puisqu’il sera nécessaire de trouver un traitement efficace sur la dépression mais aussi sur le problème d’alcool. C’est l’état initial du patient qui déterminera alors la manière dont il sera pris en charge. "Quelqu’un qui a des idées suicidaires verra sa dépression traitée en premier. A l’inverse, quelqu’un avec une hépatite alcoolique sera soigné en priorité pour son addiction à l’alcool".
En dehors de ces cas extrêmes, c’est le psychisme du patient, son état et sa disponibilité qui orienteront le traitement. "Parfois, l’alcool est une tentative de traiter la dépression, dans ce cas, on la traitera en premier. Mais il ne faut pas oublier que l’alcool a un effet dépressiogène réel et que le traitement de l’addiction est souvent une priorité. Si cela est possible, il faut traiter les deux problèmes simultanément".
L’importance du suivi psychologique
La prise en charge en psychothérapie est également fondamentale. "L’antidépresseur traite les émotions mais pas les causes de l’apparition des troubles thymiques. Ces causes sont généralement des schémas dysfonctionnels ou des dysfonctionnements interpersonnels. Une psychothérapie ayant démontré son efficacité dans la dépression (thérapie cognitive et comportementale ou thérapie interpersonnelle) est donc très souhaitable".