Effet Pygmalion : définition, expérience, comment l'utiliser ?
L’effet Pygmalion résulte du regard positif qu’un individu porte sur un autre et qui va lui permettre de révéler le meilleur de lui-même. Comment ce mécanisme psychologique influence-t-il nos comportements à l’école, au travail, en amour ? Réponses avec Johanna Rozenblum, psychologue clinicienne.
Définition : qu'est-ce que l'effet Pygmalion ou effet Rosenthal et Jacobson ?
En psychologie sociale, l'effet Pygmalion, ou effet Rosenthal et Jacobson, est une prophétie autoréalisatrice selon laquelle le regard que l’on porte sur une personne participe à conditionner son comportement de façon positive ou négative. Ce mécanisme psychologique a été théorisé par les américains Robert Rosenthal, psychologue, et Leonore Jacobson, directrice d’école, dans les années 1960, à San Francisco, aux États-Unis, qui se sont livrés à une expérience sur les enfants.
Après avoir fait passer des tests de QI à des élèves de primaire, les chercheurs ont donné des résultats erronés à leurs enseignants afin qu’ils ne privilégient pas ceux qui avaient un plus haut potentiel. À la fin de l’année scolaire, le psychologue et la directrice d’école ont refait passer un test de QI aux élèves et ont constaté que ceux qui avaient le mieux progressé étaient les cinq que les enseignants pensaient être les meilleurs, et non ceux qui étaient classés comme les plus intelligents. Cette expérience a prouvé que c'est bel et bien l’intérêt que les enseignants ont porté à ces élèves-là qui leur a permis de progresser.
Au préalable, Rosenthal avait fait une première expérience en confiant des rats à deux groupes d'étudiants, en faisant croire au premier groupe qu'ils avaient des rats plus intelligents que la moyenne alors que la répartition s'était faite de manière aléatoire. Résultat, les rats du premier groupe ayant été encouragés par leurs "maîtres", convaincus d'avoir des rongeurs exceptionnels, ont traversé le labyrinthe plus rapidement.
Quel est le contraire de l'effet Pygmalion ?
L’effet Golem correspond au versant négatif de l’effet Pygmalion ou effet Rosenthal. À force d’entendre des jugements négatifs à son sujet, l’individu finit par y croire et par agir en fonction. Une attitude qui entraîne des performances moindres. Cet effet inverse ne fonctionne que si les paroles sont proférées par des personnes exerçant une certaine autorité sur le sujet (parents, professeurs, supérieur hiérarchique, conjoint) et peut sévir dans tous les domaines de la vie. A l'instar de l'effet Pygmalion, l'effet Golem modifie les perceptions et les objectifs d'un individu en fonction de son degré de croyance.
Pourquoi l'effet Golem peut-il être dévastateur ?
L’effet Golem peut littéralement détruire la confiance en soi d’un individu. Par exemple, si un parent ou un enseignant répète à un enfant qu’il est nul en maths, qu’il n’arrivera jamais à rien dans la vie et qu’il est timide, il va y croire et se conditionner en ce sens. Pourquoi ? Parce qu’il fait confiance à cette personne qui a de l’autorité sur lui et qu'il considère que son jugement est le bon. "Le regard, l’attention et la confiance sont primordiales pour le développement de l’enfant. Si le parent ne fait que véhiculer de la déception, de la peur et de l’irritabilité, l’enfant deviendra cet enfant-là. A l’inverse, s’il voit dans le regard de son référent de la confiance, de l’espoir, de l’encouragement et de la fierté, il deviendra aussi cet enfant. C’est la raison pour laquelle on parle de prophétie autoréalisatrice", commente Johanna Rozenblum. De la même façon, si un employé se fait rabaisser en permanence par son supérieur hiérarchique, il va intérioriser ce qu’il pense de lui et ses performances professionnelles seront moindres.
École : comment l'effet Pygmalion influence-t-il les performances des élèves dans l'éducation ?
L’effet Pygmalion ou Rosenthal démontre qu’au travers du regard d’un adulte, et notamment d’un adulte référent (parent, grand-parent, enseignant), l’enfant change de comportement pour répondre aux attentes de ses référents. "Ainsi, en lui montrant qu’on lui fait confiance, on lui permet de devenir la meilleure version de lui-même parce qu’il se sent encouragé, entouré, et en capacité d’affronter les difficultés sous le regard bienveillant de cet adulte référent. Plus on dit à des élèves qu’ils sont capables et intelligents, plus ils prendront confiance en eux et plus leurs résultats scolaires s’en ressentiront. A l'inverse, plus on a d'attentes démesurées et de jugements envers eux, moins leurs résultats seront satisfaisants", développe la psychologue clinicienne.
Quelles sont les conséquences de l'effet Pygmalion ?
Les conséquences de l’effet Pygmalion sont bénéfiques. "De manière générale, l’effet Pygmalion met en lumière le fait qu’en changeant notre regard sur l’autre, on peut lui donner de nouvelles compétences et de nouveaux outils de confiance, ce qui augmente ses chances de réussite. C’est ce que l’on appelle un conditionnement positif, en opposition à un conditionnement négatif qui viendrait laisser croire à un enfant qu’il n’est pas capable ou qu’il doit faire attention parce qu’il est en danger", argue la spécialiste.
Bien dans son corps, bien dans sa tête !
Application : comment utiliser l'effet Pygmalion en amour, au travail en management ?
Pour favoriser l’effet Pygmalion en amour, au travail ou à l’école, il convient d’encourager les autres, de leur faire confiance, de les complimenter régulièrement et de valoriser leurs qualités afin qu’ils puissent être convaincus de leurs propres capacités et révéler le meilleur d’eux-mêmes. L'effet Pygmalion a un réel effet sur la motivation et l'amélioration de l'humeur. Le simple fait de croire en la réussite de quelqu'un augmente considérablement ses chances de réussite. "Toutefois, l’effet Pygmalion au travail se heurte parfois à la perte d’estime de soi héritée de notre enfance. Si une personne arrive à l’âge adulte en ayant un syndrome de l’imposteur, une mésestime de soi et une faible confiance en soi, il va être difficile de s’élever dans les yeux d’un collègue de travail ou d’un manager compte tenu du poids du passé", tient à nuancer Johanna Rozenblum.