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  • Cancer du sein métastatique : un médicament prometteur pourrait limiter le recours à la chimiothérapie

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    David Bême
    David Bême Rédacteur en chef

    Un anticorps conjugué pourrait aider les femmes attteintes de cancers hormonodépendants métastatiques.

    Face aux cancers hormono-dépendants avancés, les options peuvent à terme se limiter à des chimiothérapies peu efficaces et non dénuées d'effets secondaires. Mais un traitement d'un nouveau type, un anticorps conjugué, se révèle efficace

    Cancers métastatiques hormono-dépendants : quelles options ?

    Face aux cancers du sein hormonodépendants (le splus fréquents), une hormonothérapie peut être prescrite pour bloquer cette stimulation. Souvent, cette hormonothérapie est même proposée pendant 5 à 10 ans après les traitements de chirurgie, de chimiothérapie et/ou de radiothérapie, afin de réduire les risques de récidive causée par certaines cellules cancéreuses qui auraient échappé à ces premières lignes de traitements.

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    Mais si le cancer est détecté à un stade métastatique (avec propagation du cancer à d’autres organes) ou s’il le devient après plusieurs traitements par hormonothérapie. D’autres traitements doivent prendre le relais : des inhibiteurs de CDK4/6, des thérapies ciblées avant de recourir à des chimiothérapies à l’efficacité limitée et aux effets secondaires importants.

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    Mais une nouvelle étude présentée dans le cadre du congrès mondial sur le cancer (ASCO 2024) pourrait donner aux médecins une nouvelle arme contre ces cancers redoutables.

    Les anticorps conjugués, stars de l'ASCO 2024

    Cette arme est un anticorps conjugué, une thérapeutique qui est la "star" de ce congrès 2024 dont les résultats pourraient changer la prise en charge du cancer du poumon, du lymphome et d’autres tumeurs. Le principe est celui d’un missile ciblé qui combine les atouts des thérapies ciblées et de la chimiothérapie : l’anticorps conjugué va être capable de cibler spécifiquement certaines cellules cancéreuses et de lui administrer directement un composé de chimiothérapie. Théoriquement donc une action très ciblée, très efficace avec moins d’effets secondaires.

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    L’originalité de l’étude présentée en session plénière à l’ASCO est qu’elle évalue l’utilisation d’un médicament, le trastuzumab deruxtecan (ou Enhertu ®) normalement destiné aux cellules cancéreuses qui expriment à leur surface des quantités accrues du récepteur 2 du facteur de croissance épidermique humain (HER2). Mais ce médicament a été administré à des femmes dont les cellules cancéreuses exprimaient HER2 de manière faible ou très faible (HER-low et HER2-ultralow). · Environ 60 à 75 % des cancers du sein sont HR+ et environ 55 % sont HER2-low.

    Une efficacité même sur des tumeurs exprimant peu HER2

    Au total, 866 participantes atteintes d'un cancer du sein métastatique de type HER2-low (713 participants) ou HER2-ultralow (153 participants) ont été recrutées. Toutes avaient reçu au moins une hormonothérapie, et presque tous les participants (90,4 %) avaient également reçu un traitement ciblé avec un inhibiteur de CDK4/6. Les participants ont été répartis au hasard pour recevoir soit du trastuzumab déruxtécan (436 participants), soit une chimiothérapie au choix de leur médecin (430 participants).

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    Résultats :

    • Pour les patientes atteintes d'un cancer HER2-low, le délai après que la maladie ne progresse de nouveau (survie médiane sans progression) était de 13,2 mois pour celles ayant reçu du trastuzumab deruxtecan contre 8,1 mois pour celles ayant reçu une chimiothérapie. Des résultats similaires ont été observés dans le petit groupe de patients atteints d’un cancer HER2-ultra faible.
    • Dans l’ensemble, les patientes atteints d’un cancer HER2-low qui ont reçu du trastuzumab deruxtecan avaient 38 % moins de risques que leur cancer se développe ou se propage par rapport à celles qui ont reçu une chimiothérapie.
    • Parmi les patientes atteintes d'un cancer HER2-low, la proportion de celles qui ont vu leur tumeur régresser (taux de réponse objective - ORR) était de 56,5 % avec du trastuzumab deruxtecan contre 32,3 % pour celles ayant reçu une chimiothérapie. Et en cas de cancer HER2-ultralow, cette proportion a plus que doublé (61,8 % contre 26,3 %, respectivement).
    • Les participantes ayant reçu du trastuzumab déruxtécan ont pu recevoir leur traitement plus longtemps sans ressentir d'effets secondaires graves, avec une durée médiane de traitement de 11 mois contre 5,6 mois pour ceux ayant reçu une chimiothérapie. Ce qui ne veut pas dire pour autant que le traitement est dénué d’effets secondaires : les effets secondaires graves étaient plus fréquents dans le groupe trastuzumab déruxtécan, avec environ 41 % des participants ayant subi un effet secondaire grave contre environ 31 % de ceux ayant reçu une chimiothérapie, avec plus de nausées et plus de risque de maladie pulmonaire interstitielle (MPI), un effet secondaire grave connu du trastuzumab deruxtecan.
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    Les chercheurs vont continuer à suivre les patients pour savoir si ces résultats positifs se traduisent par un gain en matière de survie.

    Vers une nouvelle classification des tumeurs ?

    "Ces résultats représentent également un changement potentiel dans la façon dont nous classons et traitons le cancer du sein métastatique, car nous pourrions demain utiliser le trastuzumab deruxtecan plus tôt dans le traitement du cancer du sein métastatique hormonodépendant et étendre son utilisation à de nouvelles patientes atteintes d'un cancer du sein métastatique qui n’ont pas pu bénéficier d'un thérapie ciblée après une thérapie endocrinienne", a déclaré le Pr. Giuseppe Curigliano, de l’Université de Milan et Institut européen d'oncologie.

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    La spécificité de ces anticorps conjugué, ici le trastuzumab deruxtecan mais aussi le datopotamab deruxtecan (un anti-TROP2 ciblant une autre protéine présentée dans cette même indication lors du congrès européen ESMO 2023) offre des armes nouvelles aux médecins.

    Dans le même temps, ces médicaments bouleversent en partie la classification des cancers, sachant que la présence même limitée de certaines cibles au niveau des cellules cancéreuses serait suffisante pour y recourir.

    Aujourd’hui, la toxicité parfois graves de ces composés ne permet pas de les donner d’emblée à toutes les patientes mais on peut penser que d’autres techniques de classification permettront demain de mieux identifier celles qui en bénéficieraient le plus. La biopsie liquide, avec la recherche de cellules tumorales circulantes (CTC), pourrait être une bonne option, comme l’ont déjà suggéré plusieurs études.

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    Sources
    • Les anticorps conjugués ou ADC (pour antibody-drug conjugates) sont des chimiothérapies couplées à des anticorps dirigés contre une protéine présente à la surface des tumeurs. Cet "attelage" permet de délivrer la chimiothérapie au coeur de la tumeur.
    • Trastuzumab deruxtecan (T-DXd) vs physician’s choice of chemotherapy (TPC) in patients (pts) with hormone receptor-positive (HR+), human epidermal growth factor receptor 2 (HER2)-low or HER2-ultralow metastatic breast cancer (mBC) with prior endocrine therapy (ET): Primary results from DESTINY-Breast06 (DB-06). - Abstract LBA1000 - Asco 2024 https://doi.org/10.1200/JCO.2024.42.17_suppl.LBA1000
    • Bardia A, et al. Datopotamab deruxtecan (Dato-DXd) vs chemotherapy in previously-treated inoperable or metastatic hormone receptor-positive, HER2-negative (HR+/HER2–) breast cancer (BC): Primary results from the randomised phase III TROPION-Breast01 trial. ESMO Congress 2023, Abstract LBA11 https://doi.org/10.1016/j.annonc.2023.10.015
    • Modi S, Jacot W, Yamashita T, Sohn J, Vidal M, Tokunaga E, Tsurutani J, Ueno NT, Prat A, Chae YS, Lee KS, Niikura N, Park YH, Xu B, Wang X, Gil-Gil M, Li W, Pierga JY, Im SA, Moore HCF, Rugo HS, Yerushalmi R, Zagouri F, Gombos A, Kim SB, Liu Q, Luo T, Saura C, Schmid P, Sun T, Gambhire D, Yung L, Wang Y, Singh J, Vitazka P, Meinhardt G, Harbeck N, Cameron DA; DESTINY-Breast04 Trial Investigators. Trastuzumab Deruxtecan in Previously Treated HER2-Low Advanced Breast Cancer. N Engl J Med. 2022 Jul 7;387(1):9-20. doi: 10.1056/NEJMoa2203690. Epub 2022 Jun 5. PMID: 35665782; PMCID: PMC10561652.
    • Bidard FC, Jacot W, Kiavue N, Dureau S, Kadi A, Brain E, Bachelot T, Bourgeois H, Gonçalves A, Ladoire S, Naman H, Dalenc F, Gligorov J, Espié M, Emile G, Ferrero JM, Loirat D, Frank S, Cabel L, Diéras V, Cayrefourcq L, Simondi C, Berger F, Alix-Panabières C, Pierga JY. Efficacy of Circulating Tumor Cell Count-Driven vs Clinician-Driven First-line Therapy Choice in Hormone Receptor-Positive, ERBB2-Negative Metastatic Breast Cancer: The STIC CTC Randomized Clinical Trial. JAMA Oncol. 2021 Jan 1;7(1):34-41. doi: 10.1001/jamaoncol.2020.5660. PMID: 33151266; PMCID: PMC7645742.
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