Mélanome : le régime méditerranéen pour booster l’immunothérapie ?
Selon une étude menée au Royaume-Uni et aux Pays-Bas, un régime méditerranéen peut améliorer la réponse d’un traitement basé sur de l’immunothérapie dans le cadre d’un mélanome, un cancer agressif de la peau. Qu’en est-il vraiment ? Les réponses du Dr Ivan Pourmir, oncologue à l’hôpital européen Georges Pompidou, à Paris.
Le mélanome est un type de cancer de la peau grave, que l’on soigne par immunothérapie, une thérapie ciblée basée sur l’activation du système immunitaire du patient.
Selon les résultats de ce travail, présenté lors d’une conférence organisée par la United European Gastroenterology, les chercheurs révèlent qu’un régime méditerranéen riche en fibres, en acides gras mono-insaturés et en polyphénols a été associé à de meilleurs taux de réponse immunothérapeutique et à une meilleure survie sans progression à 12 mois chez les personnes atteintes de mélanome avancé (délai durant lequel la maladie ne progresse pas).
Etude des habitudes alimentaires
Pour arriver à cette conclusion, les chercheurs ont inclus 91 volontaires touchés par un mélanome avancé et traitées par des médicaments inhibiteurs du point de contrôle immunitaire dans un étude.
Ce traitement agit en bloquant les points de contrôle du système immunitaire d'une personne, ce qui force ensuite les cellules T du corps à attaquer les cancers. Les participants n’ont pas été soumis à un régime particulier mais ont été interrogé sur ce qu’ils mangeaient, par un questionnaire détaillé, tout en surveillant la progression de leur maladie.
La viande rouge à éviter
D’autres éléments ont été conclu par les scientifiques : la probabilité de développer des effets secondaires liés au système immunitaire induits par les médicaments, tels que la colite, est réduite par la consommation de graines entières et de légumineuses. En revanche, la viande rouge transformée est associée à une probabilité plus élevée d’effets secondaires liés au système immunitaire.
Une étude à faible niveau de preuves
Le Dr Ivan Pourmir, médecin oncologue à l’hôpital Européen Georges-Pompidou, donne son point de vue sur ce travail : " Il est désormais bien établi que le microbiote intestinal influence l'efficacité de l'immunothérapie sur un certain nombre de cancers, notamment le mélanome, mais aussi le cancer du poumon par exemple. Les travaux de l'institut Gustave Roussy en France ont été sur ce sujet fondateurs. Il reste à déterminer plus précisément quelles sont les bonnes et mauvaises bactéries, par quel mécanisme elles influencent le système immunitaire, et comment modifier leurs proportions".
Pour l'oncologue, "cette étude suggère que des éléments du régime méditerranéen agissent favorablement par l'intermédiaire des bactéries intestinales. Mais on ne peut pas exclure que l'association qui a été retrouvée se fasse par un autre mécanisme, ou bien qu'il s'agisse d'une coïncidence avec d'autres facteurs. Il faut tout de même relativiser car c'est une étude de faible niveau de preuve, elle est menée sur un petit nombre de patients et est rétrospective. C'est-à-dire que les patients n'ont pas été divisés en deux groupes en fonction de leur régime avant de commencer immunothérapie ou bien assignés à une diète particulière".
Enfin, selon le Dr Pourmir, "si ces résultats se confirment sur des études de plus fort niveau de preuve ce sera une excellente nouvelle car cela permettra d'augmenter l'efficacité des immunothérapies existantes sans ajouter la toxicité de traitements supplémentaires. Cependant il est difficile de trouver des financements pour de telles études car cela est moins rentable que de vendre de nouveaux médicaments pour l'industrie pharmaceutique. Par contre les industriels sont intéressés par le développement de médicaments qui miment les effets de certains régimes alimentaires ".
- Entretien avec le Dr Ivan Pourmir, le 11 octobre 2022
- United European Gastroenterology Week 2022 Congress
