La pancréatite chronique touche chaque année 10 à 15 personnes sur 100 000, c'est donc une maladie relativement rare, mais pour autant très sérieuse. Elle affecte significativement la qualité de vie et l'espérance de vie des personnes qui en sont touchées. A quoi est-elle due ? Quels sont les premiers symptômes ? Comment la traiter ? Les réponses du Dr Olivier Spatzierer, gastro-entérologue à l'Hôpital Américain de Paris.

Définition de la pancréatite chronique

La pancréatite chronique est une inflammation prolongée et persistante du pancréas qui entraîne des lésions irréversibles de cet organe, appelés fibroses. Le pancréas se situe dans la partie supérieure de l'abdomen, et produit d'une part le suc pancréatique indispensable à la digestion des aliments, et d'autre part des hormones telles que l’insuline.

Les lésions de cet organe l'empêchent donc de travailler correctement, et provoquent des altérations de ses fonctions digestives et hormonales. "Dans 9 cas sur 10, la pancréatite chronique est due à une consommation excessive d'alcool, qui calcifie le pancréas et l'empêche de fonctionner correctement. On parle alors de pancréatite calcifiante" explique le Dr Spatzierer.

Est-ce grave ?

La pancréatite chronique est une maladie grave qui peut entraîner des complications importantes et affecter significativement la qualité de vie des personnes touchées. L'inflammation chronique endommage progressivement les cellules du pancréas responsables de la production d'enzymes digestives, entraînant une malabsorption des nutriments, une perte de poids et une malnutrition.

"Les personnes touchés par la pancréatite chronique ont une espérance de vie réduite et finissent par devenir très maigres" indique le gastro-entérologue. Cette maladie a plusieurs risque de complications : un diabète par destruction des cellules productrices d'insuline dans le pancréas, l'obstruction des canaux biliaire causant une jaunisse, un risque accru de cancer du pancréas...

Quelles en sont les causes ?

Dans la très grande majorité des cas (90%), la pancréatite chronique est une conséquence de la consommation excessive et prolongée d'alcool.

Plus rarement, des mutations génétiques (telles que la mucoviscidose) peuvent prédisposer certaines personnes à la pancréatite chronique ou des maladies auto-immunes peuvent causer l'attaque du pancréas par le système immunitaire, provoquant une inflammation chronique.

Une hypercalcémie peut entraîner des dépôts de calcium dans le pancréas, causant une inflammation et à terme une fibrose pancréatique.

Enfin, l'obstruction des canaux pancréatiques par des calculs biliaires, les tumeurs ou les anomalies congénitales peuvent bloquer les canaux du pancréas, entraînant une inflammation et une fibrose.

Le tabagisme et l'hypertriglycéridémie sont quant à eux des facteurs de risque de la pancréatite chronique.

Douleur du pancréas, selles huileuses, diarrhée : Quels sont les premiers signes symptômes d'une pancréatite chronique ?

Dans certains cas, la pancréatite chronique est asymptomatique et silencieuse, surtout dans les premiers stades de la maladie. Il arrive d'ailleurs qu'elle soit découverte de manière fortuite lors d'examens d'imagerie abdominale. La plupart du temps, des symptômes apparaissent au fur et à mesure que la maladie progresse et que les dommages au pancréas s'aggravent.

Le premier symptôme pour le patient, est généralement une douleur constante ou intermittente dans le haut de l'abdomen, qui peut irradier vers le dos. Elle peut être légère au début mais devient souvent intense et persistante. "La douleur est souvent soulagée en position allongée en chien de fusil" précise le spécialiste.

Des troubles digestifs, de type vomissements ou selles huileuses (stéatorrhée) due à la malabsorption des graisses sont fréquents. S'en suit une perte de poids, conséquence logique de la mauvaise absorption des nutriments énergétiques.

Prise de sang, échographie, scanner : Diagnostic de la pancréatique chronique

Le diagnostic de la pancréatite chronique est souvent complexe et nécessite une approche multidisciplinaire. L'histoire clinique du patient, ses symptômes et antécédents diagnostic donnent une première orientation et poussent à effectuer de premiers examens. "Une prise de sang est généralement proposée en premier, et permet de voir s'il y a une augmentation des enzymes pancréatiques, caractéristique de la maladie" indique le Dr Spatzierer.

Puis, plusieurs examens d'imagerie médicale peuvent être prescrit : une échographie abdominale voire une tomodensitométrie (scanner) pour visualiser des calcifications, des pseudokystes ou des anomalies des canaux pancréatique. Une IRM peut être utilisée pour évaluer plus précisément la structure du pancréas et les canaux pancréatiques.

Dans certains cas, une biopsie du tissu pancréatique peut être nécessaire pour confirmer le diagnostic et écarter d'autres maladies, comme le cancer du pancréas.

Traitement de la pancréatite chronique : Comment soigner son pancréas ?

"La pancréatite chronique ne se guérit pas, le traitement vise donc principalement à gérer les symptômes et à prévenir les complications : c'est un traitement dit symptomatique" explique le Dr Spatzierer.

Des médicaments analgésiques sont prescrits pour gérer la douleur et des enzymes pancréatiques par voie orale pour aider à la digestion.

"Arrêter l'alcool et le tabac est essentiel pour ne pas aggraver la maladie" insiste le spécialiste

Le patient doit être adressé à un endocrinologue pour la prise en charge du diabète : un traitement à l'insuline est souvent nécessaire pour gérer le diabète induit par la pancréatite.

Dans certains cas, une intervention chirurgicale sera nécessaire, pour drainer les pseudokystes, enlever des parties du pancréas, ou débloquer les canaux pancréatiques.

Alimentation : quel régime en cas de pancréatite chronique ?

L'alimentation joue un rôle important dans la gestion de la pancréatite chronique, pour réduire la stimulation du pancréas, soulager les symptômes, limiter les carences et la perte de poids. Le régime alimentaire doit être pauvre en graisses (50 g par jour maximum) pour réduire la sécrétion des enzymes pancréatiques.

On recommande de fractionner son alimentation, en faisant des petits repas fréquents pour éviter de surcharger le travail du pancréas : on peut ainsi faire 3 petits repas principaux et deux à trois collations.

Pour limiter les symptômes digestifs et prévenir les carences nutritionnelles, il est souhaitable de manger sainement, en privilégiant les aliments riches en fibre (fruits et légumes frais, céréales complètes), les protéines maigres, les graisses de bonne qualité (huiles végétales, poissons gras, graines et oléagineux) et en limitant les sucres raffinés et les graisses saturées.