Cristaux dans l’oreille interne : comment lutter contre les vertiges ?

Ariane Langlois Journaliste spécialisée en santé et psychologie

Vous vous êtes levé(e) brusquement et votre tête tourne, le vertige vous saisit ? Peut-être souffrez-vous d’un déséquilibre de l’oreille interne, dus à des cristaux qui se sont déplacés… Rassurez-vous, même si cela est désagréable, il s'agit d'un trouble bénin ! Découvrez les symptômes, les causes possibles, les tests et les options de traitement.

Définition de l'otolithe ou cristaux dans les oreilles

Problème de l'oreille interne

Otolithes, statolithes, otoconies, statoconies ou "poussières d'oreille", les cristaux d’oreille peuvent porter plusieurs noms. "Ces micro-cristaux de carbonate de calcium – Mesurant 3 à 19 μm, donc non visibles à l’œil nu - sont situés dans le système vestibulaire de l’oreille interne, plus précisément dans la membrane otoniale, sur les cellules ciliées de l’oreille interne", décrit le Dr Nils Morel, médecin Oto-Rhino-Laryngologue (ORL) et chirurgien cervico-facial.

Tête qui tourne : quel mécanisme ?

Reposant sur la membrane sensorielle des organes otolithiques (utricule et saccule), ils permettent - grâce à leur contact avec les cils des cellules sensorielles - à l’oreille d’envoyer des signaux au cerveau, de façon à ce que celui-ci puisse reconnaître la position de la tête et se repérer dans l’espace. Ces informations, transmises par nos capteurs proprioceptifs (corps, yeux, oreilles) participent à l’équilibre général de tout le corps. Or, il arrive que ces cristaux d’oreille se détachent des membranes de l’oreille interne et se déplacent, dans le liquide des canaux semi-circulaires, entraînant une désorientation, un déséquilibre et donc, une sensation de vertiges. "Le vestibule de l'oreille interne est composé de trois canaux semi-circulaires, dénués de cristaux. Lorsque ces canaux se détachent de la masse gélatineuse à laquelle ils sont attachés dans les organes otolithiques, ils se mettent à flotter et migrent le long d’un canal semi-circulaire : cela crée un manque de cohérence dans les signaux reçus au niveau du cerveau. Celui-ci n'arrive plus à comprendre les informations, ce qui entraîne un déséquilibre".

Vertiges positionnels paroxystiques bénins

Caractéristiques, consécutifs au changement brusque de position de la tête, ces vertiges portent le nom de vertiges positionnels paroxystiques bénins ou VPPB et sont très courants : 50% des consultations pour causes de vertiges sont dues à ce phénomène. Quatre millions de personnes en France, principalement des seniors (notamment les femmes de plus de 55 ans), en souffrent. Sans danger, ils peuvent toutefois être particulièrement handicapants chez les personnes âgées en perte d’autonomie. Attention, il ne faut pas les confondre avec la névrite vestibulaire (qui résulte d’une inflammation du nerf vestibulaire situé dans l’oreille) ou encore avec les vertiges dus à la maladie de Ménière (augmentation de la pression dans le labyrinthe de l’oreille).

Reconnaître les cristaux dans l'oreille : quels symptômes ?

Ces vertiges positionnels paroxystiques bénins (ou VPPB) se distinguent des étourdissements classiques, ils sont assez reconnaissables car très particuliers. Intenses, ils se manifestent de façon soudaine et brusque, sans aucun signe annonciateur. "La personne a la sensation désagréable d’être sur un bateau ou sur un manège. La tête tourne fortement et encore plus lorsque l’on change de position, en passant par exemple d’une position debout à une position assise ou allongée (c’est pour cela que l’on dit que le vertige est "positionnel"), ou en se tournant du flanc droit au flanc gauche et inversement. Un mouvement trop rapide de la tête, tout particulièrement quand celle-ci est orientée en bascule arrière (quand on lève la tête pour changer une ampoule, par exemple), peut également les déclencher", poursuit le spécialiste.

Ces vertiges ne provoquent pas de douleur ou de perte auditive, ils sont transitoires (et durent moins deux minutes), mais peuvent être accompagnés – dans les cas les plus intenses – de mouvements involontaires et saccadés des yeux (nystagmus, visible à l’œil nu), d’une sensation de tête lourde, de nausées et vomissements de sueurs et de migraines. En général, ils ont tendance à s’accentuer avec l’avancée de l’âge. Ces crises peuvent enfin durer une journée ou plusieurs semaines (se répétant tous les jours), disparaître aussi rapidement qu’elles sont venues et récidiver plus tard.

Cause des vertiges : qu'est-ce qui provoque les cristaux dans les oreilles ?

Quels facteurs de risque ?

A ce jour, on ne connaît pas précisément les causes de ce trouble qui touche à la fois les enfants et les adultes. Le vieillissement général semble toutefois être un facteur aggravant : il semblerait en effet que ces vertiges proviennent de modifications métaboliques survenant généralement après 50 ans. Ils sont notamment fréquents chez les femmes, après la ménopause. "On sait aussi qu’ils peuvent être favorisés par un choc, qu’il s’agisse d’un coup sur la tête ou d’un traumatisme crânien (sport, décompression violente suite à un voyage en avion…) ou une infection de l'oreille."

Sans présence de preuves scientifiques, d'autres facteurs pourraient aggraver la situation. Ce serait le cas du stress chronique et mal contrôlé. Le stress induit en effet un stress musculaire dans tout l'organisme. Par ailleurs, le stress pourrait augmenter la sensibilité à l'équilibre et aux vertiges. Ainsi, le stress exacerberait les symptômes des vertiges positionnels paroxystiques bénins. Une bonne gestion de son stress contribuerait donc à réduire la fréquence et la gravité des symptômes chez les personnes souffrant d'un déplacement de cristaux dans les oreilles.

Conséquences : stress, peur de tomber

"Mais beaucoup de personnes développent ces vertiges de façon spontanée, sans que l’on sache vraiment pourquoi", note le Dr Nils Morel. Bénins et donc sans danger pour la santé, ces vertiges peuvent toutefois se révéler désagréables et handicapants au quotidien, altérant le fonctionnement général de l’équilibre du corps. Un stress, dû à la peur de chuter et de se faire mal, peut aussi s’installer au fil du temps. Les cristaux dans les oreilles provoquent souvent de la fatigue, étant donné que ces symptômes sont fatigants, et stressants. Cette fatigue peut aussi bien être mentale que physique. Il est alors préférable de se rendre chez un médecin ORL pour diagnostiquer l'affection et ainsi pouvoir mettre en place des solutions efficaces pour soulager rapidement le patient.

Diagnostic : comment savoir si ces vertiges proviennent bien de l’oreille interne ?

Pour un diagnostic précis, en cas de suspicion d'un problème d'oreille interne, il est nécessaire de consulter son médecin généraliste ou directement un médecin oto-rhino-laryngologiste (ORL). Le diagnostic des cristaux pathologiques dans l’oreille est essentiellement clinique : il repose sur un interrogatoire, suivi d’un examen clinique permettant de déterminer les réactions oculaires du patient, mais aussi l'intensité, la fréquence et l'ancienneté des symptômes. Un test vestibulaire permet de vérifier la fonctionnalité de l’oreille interne versant équilibre. Une évaluation de l'audition à l'aide d'un audiomètre, effectuée par le médecin ORL, viennent souvent compléter l’ensemble des tests. "Dans certains cas particuliers, un scanner ou une IRM (imagerie par résonance magnétique) peuvent être proposés en tant qu'examens complémentaires, mais pas lorsque le VPPB est typique", complète le spécialiste.

Crise : quel exercice pour remettre les cristaux dans les oreilles ?

Pour calmer la crise, ayez le réflexe de vous allonger dès les premiers signes de malaise. Surélevez la nuque et le haut du dos avec deux coussins, en relâchant la tête légèrement vers l’arrière. Tournez la tête et maintenez-la vers la droite quelques secondes, puis répétez l’opération à gauche. Redressez-vous ensuite lentement en position assise. "L’autre particularité de ce vertige, c’est qu’il est épuisable et de moins en moins fort. Au bout de quelques vertiges, ceux-ci diminuent : le patient est alors tranquille pour plusieurs heures", remarque le spécialiste.

Traitement : comment se débarrasser des cristaux dans les oreilles ?

Repos

"L’évolution est presque toujours spontanément favorable en moins de trois mois", rassure le Dr Nils Morel. Une simple mise au repos du patient, assortie de mesures simples (éviter les changements de position trop brusques au lever le matin, bien s’hydrater, réduire la consommation de sel, éviter la rétention d’eau, qui provoquerait parfois des perturbations dans l’oreille interne…), peut ainsi suffire à obtenir une amélioration des symptômes.

Manipulation et rééducation vestibulaire

En cas d problèmes de cristaux, des séances de rééducation cérébrale/vestibulaire, effectuées chez un kinésithérapeute sont recommandées. Sont également conseillées des gestes de manipulation simples et de pratiques régulières permettent en effet au cerveau de se reprogrammer. Après ces manœuvres libératoires, les mouvements de tête rapides sont proscrits et la position de sommeil doit être adaptée, de façon à fixer les cristaux à leur nouvelle place.

Solutions naturelles

Les remèdes naturels peuvent aider à réduire l’intensité des symptômes. En homéopathie, Phosphorus et Conium maculatum 5CH sont les granules recommandés en cas de vertiges. La phythotérapie et l’aromathérapie témoignent également de bons résultats sur les vertiges : valériane, passiflore et aubépine, à prendre en infusion ou en gélules, peuvent ainsi aider.

Quel médicament ?

Si vraiment cela ne passe pas, un traitement médicamenteux (anti-vertigineux ou anti-nauséeux) peut être prescrit par votre médecin. Malheureusement, ces crises de vertiges peuvent récidiver. En cas de crises trop violentes, l'administration de médicaments par voie intratympanique peut être envisagée.

Comment remettre en place seul les cristaux de l'oreille interne ?

Le patient peut soulager lui-même ses symptômes en réalisant lui-même des manœuvres libératoires. Si cela s’avère difficile, il est conseillé de reprendre rendez-vous chez le médecin ORL ou chez le kinésithérapeute. Une manœuvre mal exécutée peut en effet entraîner d’autres problèmes.

Comment remettre en place les cristaux d’oreille ?

Il existe en effet des manœuvres spécifiques dites "manœuvres libératoires", permettant de redistribuer les cristaux de l’oreille interne, réalisées par les médecins ORL, les kinésithérapeutes ou les médecins généralistes formés. "Ces enchaînements de mouvements permettent de faire bouger les cristaux pathologiques, de les déplacer et de les ramener vers leur zone naturelle dans l'oreille interne, explique le spécialiste. Elles répartissent les cristaux autrement mais ne les éliminent pas car il est naturel d'avoir des cristaux dans une zone particulière de l'oreille interne. Autrement dit, ces épisodes de vertiges peuvent revenir, si le patient fait des mouvements brutaux".

Parmi ces manœuvres de basculement, on peut citer la manœuvre libératoire de Semont, de Toupet, de Foster ou encore la manœuvre d'Epley. Cette dernière, conçue par le docteur John Epley en 1980, est la plus utilisée. Il s’agit d’une méthode douce qui consiste à effectuer plusieurs mouvements censés déplacer les cristaux et les acheminer, grâce à la gravité, vers une zone moins à risque pour l’équilibre. Quant à la manœuvre de Semont, il s’agit, comme pour la manœuvre d'Epley, de ramener les cristaux au bon endroit : "Lors de chacune de ces manœuvres, on observe un nystagmus qui s'inverse à un moment de la manœuvre donné : ceci est bon signe, cela signifie que le mouvement a été effectué correctement". Pour y parvenir, le patient doit adopté plusieurs postures, assisté par son médecin ou un kinésithérapeute. A savoir : il est courant de ressentir des vertiges tout le long de la manœuvre.

En général, la manœuvre est efficace dans 90% des cas et les effets très rapides. Une seule séance peut ainsi suffire à disperser ou éloigner les micro-cristaux du canal semi-circulaire, et donc à être débarrassé des symptômes. Il est toutefois possible de répéter la séance deux ou trois fois si besoin. Elle n’empêche toutefois pas les récidives, qui peuvent survenir dans les six mois ou plusieurs années plus tard et seront traitées de la même façon.