Procrastination : définition, causes et solutions
La procrastination, c'est le fait de toujours repousser au lendemain des choses importantes, de toujours trouver mieux à faire que les dossiers urgents ou les activités pour lesquelles on s'était engagé. Tout le monde procrastine plus ou moins, mais parfois cela devient un véritable handicap dans la vie professionnelle et personnelle. Le point avec Cécile Defrance, psychologue comportementaliste sur ce problème et les moyens d'en sortir.
Définition
La proscratination est, selon le dictionnaire Larousse, défini comme une "tendance à ajourner, à remettre systématiquement au lendemain".
Soyons honnête, nous avons tous toujours les meilleures raisons du monde de repousser des échéances dans notre vie. "Oui Docteur, je vais me mettre au sport… demain" "Le rapport que je devais rendre hier ? Juste au moment de m'y mettre, je me suis dit qu'il fallait d'abord ranger le bureau... et ça m'a pris tout mon temps…"
Pourquoi procrastinons-nous ?
Notre quotidien est souvent un enchaînement de priorités à gérer. "Tout le monde procrastine, sans que l'on soit obligé de changer de comportement : regardez Gaston Lagaffe" ironise Cécile Defrance, psychologue comportementaliste. Mais si les personnages de bandes-dessinées s'en sortent bien, dans la vraie vie la procrastination peut parfois nous faire perdre notre travail, passer à côté de l'âme soeur ou même menacer notre santé.
Travail, tâches ménagères... Les domaines concernés
- Dans le milieu professionnel
Dans sa vie professionnelle, la procrastination est une véritable habitude. Mais attendre le dernier moment pour travailler dans l'urgence, ça ne veut pas forcément dire procrastiner ! En effet, on peut avoir besoin du stress de l'urgence pour être efficace. Tant que l'on tient ses deadlines et que l'on atteint ses objectifs, il n'y a pas de problème. La vraie procrastination est celle qui va avoir des conséquences négatives, un impact professionnel important.
- Dans le quotidien
La procrastination va prendre la forme de difficultés à effectuer les tâches de la vie courante : "je changerai les draps la semaine prochaine"… Le fait de rater l'échéance des les impôts est classique : "Je connais des gens qui tous les ans paient 10 % de pénalités… moi-même je renvoie la déclaration toujours au dernier moment !" souligne Cécile Defrance.
- Dans la vie affective et personnelle
La procrastination met des freins à la vie personnelle. Si on a un projet de vie, le fait de le remettre continuellement à plus tard, risque de ne jamais le voir aboutir. C'est ainsi que la procrastination peut un obstacle à la vie quotidienne... et à l'épanouissement tout simplement.
Les étapes de la procrastination
La procrastination suit souvent le même schéma, avec des étapes définies :
- Vous devez faire quelque chose, qui ne vous attire pas plus que cela, mais dont vous retirerez un bénéfice ;
- Vous reportez une première fois sans raison valable (il fait beau aujourd'hui, je commencerai demain) ;
- Vous constatez le problème car vous n'avez pas fait ce que vous aviez à faire ;
- Vous continuez à reporter malgré tout ;
- Vous vous en voulez mais vous trouvez a posteriori des excuses ;
- Vous reportez encore ;
- Vous finissez par faire la tâche.. ou parfois vous ne terminez jamais ;
- Dans tous les cas, vous vous sentez coupable et vous vous jurez de ne plus procrastiner ;
- Vous recommencez.
Les causes
Si vraiment la procrastination est un véritable handicap, que vous ne supportez plus, vous pouvez commencer par aller voir un psychologue, qui va non seulement évaluer votre trouble. Différentes échelles vont permettre de vous rendre compte de tout ce que vous repoussez quotidiennement, et des mécanismes en cause.
- Le manque de temps et la mauvaise organisation
Par exemple, certains disent qu'ils n'ont pas le temps de tout faire, qu'ils sont débordés. On peut alors leur proposer un relevé de temps. Et souvent on se rend compte que le problème est surtout lié à une perception erronée des durées, toujours minimisées. Pour Cécile Defrance, "il y a en effet un décalage entre le temps évalué et la réalité. La personne pense qu'elle en a pour une demi-heure à se rendre à une réunion, qui ne durera pas plus d'une heure… alors trajets et réunion lui prennent deux fois plus. Elle aura beau essayer de planifier sa journée, elle ne pourra jamais tenir les délais et sera toujours obligée de repousser. Là le travail est de recaler la perception du temps."
- La peur de l'échec
La peur de l'échec est une des causes principales de la procrastination. Le procrastinateur a souvent peur de ne pas être à la hauteur, et c'est pour cela il n'arrête pas de repousser sa réalisation. Toutefois, assez fréquemment, il n'admet pas qu'il a peur d'échouer. Les personnes qui ont une tendance à la procrastination sont en effet des perfectionnistes. Souvent, elles procrastinent parce qu'elles ont peur de ne pas pouvoir exécuter une tâche comme il faut. Ces personnes sont rarement satisfaites de leur travail ou de leur vie, et pensent toujours qu'elles pourraient "faire mieux".
- La peur de perdre le contrôle
Une autre cause qui peut être à l'origine de la procrastination est la peur de perdre le contrôle. Le procrastinateur a envie d'avoir le pouvoir décisionnel sur les tâches à accomplir : c'est lui qui doit pouvoir décider comment et quand s'en occuper.
- Le manque de motivation
Le manque de motivation peut aussi expliquer la procrastination. Si on ne voit pas l'utilité d'une tâche, ou que l'on n'anticipe pas de plaisir immédiat, il est moins aisé de passer à l'action !
- Un trouble sous-jacent ?
Parfois, des difficultés de concentration peuvent être la cause d'une tendance à la procrastination. Plus particulièrement, la procrastination - et les difficultés d'organisation au sens large - est fréquente chez les personnes qui souffrent de TDA/H, Trouble de déficit attentionnel avec ou sans hyperactivité.
Comment en finir avec la procrastination ?
Mais dans d'autres cas, la cause n'est pas la perception erronée du temps. Il peut s'agir d'échéances trop floues, qui en restant vagues n'incitent pas à agir…. Jusqu'à ce qu'elles soient passées ! Le travail du psy est alors d'aider à poser toujours des échéances précises pour les différents objectifs.
Le psychologue peut aider aussi à démasquer les "jokers", c'est-à-dire les activités qui sont toujours valables et qui permettent d'éviter la tâche. "Par exemple, vous devez écrire un article, et en vous mettant à votre bureau, vous vous dites que vous ne pouvez pas travailler dans un désordre pareil et vous rangez pendant le reste de la journée au lieu d'écrire" souligne Cécile Defrance. La télévision est un bon joker.
Pour sortir de la procrastination, il faut également agir sur la motivation, et notamment travailler sur les "pensées dysfonctionnelles" : en clair les idées reçues qui vont bloquer l'action : "ils vont me trouver nul", "je ne suis pas du matin…"
Attention, parfois la procrastination chronique peut masquer une dépression. Dans ce cas, on a tellement envie de ne rien faire que l'on remet tout à demain. Une prise en charge adaptée est alors indispensable.
Culpabilité, insatisfaction, stress, déprime... peuvent être les symptômes de la procrastination.
Bien dans son corps, bien dans sa tête !
Les solutions de notre spécialiste
Quelques trucs peuvent aider à se sortir de la procrastination :
- Se fixer des échéances claires ;
- Ne pas sous estimer le temps nécessaire aux différentes tâches ;
- Se donner des objectifs réalistes : "Méfiez-vous des éléphants lointains, souligne Cécile Defrance. Ils ont l'air de tout petits points gris à l'horizon jusqu'à ce qu'on soit juste devant !" ;
- Dans tous les cas, fixez-vous une règle : pas plus d'un seul report ;
- Ecrire des "to do list" : les tâches incluent doivent être fractionnées, avec un indice de "temps" à respecter. En fait, la meilleure to do list est un planning.
- Anticipez les obstacles.
En pratique, vous pouvez essayer de vous donner des plages horaires de 5 minutes pour faire une tache, en arrêtant tout le reste. Et vous pouvez la reconduire. Autre technique : découpez votre tâche en toutes petites unités plus faciles à réaliser.
Par exemple, pour ranger la chambre : commencez par ranger l'armoire du fond un jour, puis la commode le lendemain…. L'important c'est d'initier l'action. "N'hésitez pas à vous faire aider par l'entourage et n'oubliez pas de récompenser chaque petite victoire" souligne la psychologue. Et n'oubliez pas, "il sera trop tard demain" !
Demain je commence le sport !
La psychologue comportementaliste Cécile Defrance s'occupe de problèmes de procrastination très particuliers : elle prend en charge des patients souffrant d'obésité au sein du réseau Romdes (Réseau Obésité Multidisciplinaire De l'Essonne et Seine-et-Marne). Et lors de la prise en charge médicale, difficile parfois de faire changer les mauvaises habitudes, et notamment la sédentarité. Dès qu'il s'agit de proposer une activité physique, il devient souvent difficile de motiver les troupes "Si on propose d'aller à la piscine, ils vont dire qu'ils n'ont pas de maillots de bains à leur taille, qu'ils ont peur du regard des autres…". Réussir à vaincre les résistances est donc un travail de longue haleine… mais qui finit par payer !