L’autisme détectable au stade fœtal grâce à des IRM
Pour toutes les maladies, plus le diagnostic est précoce et plus la prise en charge, médicale ou pluridisciplinaire, est optimisée. C’est également le cas pour le trouble du spectre de l’autisme (TSA), comme le souligne le chercheur Alpen Ortug, également auteur principal de l’étude, "Une détection plus précoce signifie un meilleur traitement". C’est pourquoi lui et son équipe ont souhaité vérifier qu’il était possible d’identifier ce trouble dès le plus jeune âge, même avant la naissance.
Des outils diagnostiques utiles qu'à partir de 18 mois
Le trouble du spectre autistique concernerait 1 enfant sur 68 en Amérique. D’après le dispositif français Autisme info service, le TSA, anciennement connu sous la dénomination TED, pour Troubles Envahissants du Développement, se caractérise par un ensemble de troubles neurobiologiques agissant sur le développement des personnes dites “autistes”. Le TSA a un impact sur les interactions sociales et communicatives du patient, mais aussi sur leur conscience émotionnelle, leur perception ainsi que sur leur comportement et leurs activités.
Actuellement, les différents outils permettant de diagnostiquer l’autisme ne peuvent le faire que vers l’âge de 18 mois. La détection du trouble autistique reste difficile du fait que les causes restent encore mystérieuses, même si la communauté scientifique s’accorde à dire que des facteurs génétiques et environnementaux pourraient favoriser sa survenue.
À ce jour comme le disait la Haute Autorité de Santé, les enfants autistes sont diagnostiqués trop tardivement, en moyenne entre 3 et 5 ans. Si le diagnostic peut théoriquement être posé dès 18 mois, la situation est complexe en raison notamment d’inégalités d’accès au diagnostic sur le territoire et d’un manque de visibilité pour les familles qui ne savent pas à quels professionnels s’adresser.
Toutefois, une étude réalisée par Alpen Ortug de la Harvard Medical School et présentée au congrès médical de Pennsylvanie, révèle la possibilité d’identifier le TSA in-utéro. En effet, les conclusions de l’étude suggèrent qu’un marqueur biologique visible à travers une Imagerie par Résonance Magnétique (IRM) réalisé en prénatal, peut laisser présager de l’éventuelle émergence d’un TSA plus tard dans la vie de l’enfant.
Des différences notables in-utero au niveau cérébral
Les chercheurs ont analysé des images cérébrales données par IRM de 39 foetus, qui avaient été prises à 25 semaines de gestation environ, au Boston Children’s Hospital. D’après leurs observations :
- 9 des enfants ont été diagnostiqués plus tard avec un TSA ;
- 20 étaient neurotypiques (fonctionnement neurologique considéré comme normal) ;
- 10 n’avaient pas de TSA, mais d’autres troubles de santé, retrouvés aussi chez les enfants porteurs de TSA.
Dans un second temps, les experts ont méthodiquement décortiqué les différentes scintigraphies, grâce à une technique de segmentation des régions cérébrales entre les différents groupes. Ils ont noté des différences significatives dans le groupe TSA, notamment au niveau du lobe insulaire du cerveau. Or, le cortex insulaire ou insula pourrait jouer un rôle, entre autres, dans la perception de soi-même et des autres, mais aussi dans la gestion des émotions, la prise de décision et dans le comportement social. Les imageries du groupe TSA ont démontré que ce lobe insulaire était plus volumineux que dans les autres groupes.
Par ailleurs, les chercheurs ont remarqué, dans le groupe TSA, que les enfants possédaient une amygdale et une commissure hippocampiques plus grandes que chez les enfants sans TSA, mais souffrant d’autres problèmes sanitaires. Pour rappel, l'hippocampe cérébral a des fonctions essentielles pour la mémoire.
Quelle aplication en pratique ?
Ces résultats démontrent la possibilité d’identifier certains marqueurs du TSA dans l’utérus et au stade prénatal. Pour le Dr Alpen Ortung, du Massachusetts General Hospital : “Étant donné que de nombreux facteurs génétiques et environnementaux pourraient affecter l'émergence des TSA à partir des stades fœtaux, il est idéal d'identifier la première signature d'anomalies cérébrales chez les futurs patients autistes” à partir des stades foetaux. Et d’ajouter qu’il s’agit “de la première tentative de segmentation semi-automatique des régions cérébrales au stade prénatal chez les patients qui reçoivent un diagnostic d'autisme plus tard et [permettant] de comparer différents groupes de témoins".
Ces données sur un petit nombre de foetus devront être confirmés. En pratique, on imagine mal un dépistage in utero des troubles du spectre autistique chez les femmes enceintes (à moins qu'on puisse bien identifier des risques importants de survenue de ce trouble chez l'enfant). Mais cette découverte pourrait contribuer à déceler des facteurs génétiques ou environnementaux qui pourraient expliquer la survenue de ce trouble et notamment son augmentation : de 1 cas pour 5 000 en population générale en 1975, nous sommes passés à 1 pour 100 aujourd’hui.