Autisme : quelles sont les causes évoquées en l'état actuel des connaissances ?

Validation médicale : 30 mars 2018

Jesus Cardenas médecin, ancien directeur médical

Autisme : quelles sont les causes possibles ?

Les causes potentielles de l'autisme sont multiples. Facteurs psychologiques, génétiques, environnementaux... si les origines exactes de ce trouble restent à découvrir, plusieurs pistes sont évoquées par les chercheurs. Tour d'horizon et décryptage des dernières avancées.

TSA ou syndrome autistique : définition et symptômes

Mal connu, et souvent mal expliqué, le trouble du spectre autistique reste difficile à identifier. Si certaines formes sont diagnostiquées dès le plus jeune âge, d'autres le sont une fois adulte.

Définition du spectre autistique : un trouble, pas une maladie !

L'autisme fait couler beaucoup d'encre, et sans surprise, au vu de l'essor considérable des demandes de diagnostics ces dernières années. Pour revenir aux bases, l'autisme fait partie des troubles du neurodéveloppement (TND), aussi appelé TSA (trouble du spectre autistique). La distinction entre les termes utilisés par les professionnels de santé dépend essentiellement de l'intensité des manifestations comportementales et de l'impact sur le développement des personnes concernées. Il existe ainsi autant de formes d'autisme ... que de personnes ayant des traits autistiques !

Signes de l'autisme selon sa forme chez les bébés et enfants

Les signes permettant d'alerter les parents d'un potentiel TSA chez les enfants sont parfois assez subtiles, rendant complexe le diagnostic. Bien que des outils de dépistage existent, il est souvent posé après l'âge de 3 ans.

L'autisme infantile est généralement plus vite identifié lorsque le trouble se manifeste par un déficit.

Voici les manifestations fréquentes d'un TSA :

• Absence de gestes ou de babillages avant 1 an et aucune prononciation de mots avant 18 mois ;
• Trouble ou perte soudaine du langage ;
• Peu de réactions aux sourires et regards par l'enfant, pas de réponse au prénom.

Bien que ces signes ne soient pas suffisants, il pourra être intéressant de solliciter l'avis d'un médecin psychiatre ou de se rendre dans le CRA (Centre Ressources Autisme) le plus proche.

Comportements évocateurs de trouble autistique chez l'adolescent et l'adulte

Puisque de nombreux enfants n'ont pas été diagnostiqués plus jeunes, certains adultes, constatant des difficultés variées dans leur quotidien, leur manière de communiquer ou de comportement dans les interactions sociales, décident de solliciter un avis médical.

Depuis la dernière révision du DSM-5, il est établi que les signes d'un TSA (inclus dans la rubrique des troubles du développement) se présentent par :

• Des difficultés persistantes de communication et d’interaction sociale ;
• Des types de comportements d'activités ou d’intérêts restreints et répétitifs, présents depuis l'enfance, à condition que ces troubles "limitent et altérent le fonctionnement quotidien".

Dans le DSM-5, les anciens termes "trouble autistique", "syndrome d'Asperger", "trouble désintégratif de l'enfance" ou "trouble envahissant du développement" ont été remplacés par un terme plus global, "trouble du spectre autistique".

Cependant, ces indices ne suffisent pas pour déclarer un TSA, et plusieurs tests standardisés et bilans réalisés par des professionnels de santé experts sont nécessaires.

• Pour en savoir plus : la détection des troubles du spectre de l'autisme

Quand se déclenche l'autisme ou trouble du spectre autistique ?

Comme évoqué précédemment, un TSA peut être identifié dès les premiers mois de vie de l'enfant, tout comme plus tardivement. Puisqu'il s'agit d'un trouble aux intensités variables, l'évidence de sa manifestation l'est tout autant.

Les formes les plus envahissantes sont généralement repérées par les parents chez les enfants avant l'âge de 3 ans.

Quelles seraient les principales causes de l'autisme ?

L'état des connaissances ne permet pas encore de comprendre précisément toutes les causes de l’autisme, et il est important de rappeler que, contrairement à certaines idées reçues et rumeurs, "les caractéristiques psychologiques des parents n’entrent pas en compte dans la survenue de l’autisme". Les scientifiques et chercheurs sont unanimes sur ce point.

Le trouble du spectre autistique fait l'objet de recherches, et différents facteurs sont évoqués :

• La composante génétique : selon les scientifiques, la probabilité qu'un second enfant autiste naisse dans une famille déjà concernée est de 3%, ce qui est environ 60 fois plus élevé que dans la population générale. Il ressort des études qu'il arrive qu'une mutation génétique puisse apparaître de novo chez l'enfant (sans être présente chez les parents), et dans d'autres cas qu'il y ait une combinaison de plusieurs modifications dans les gènes ;
• Le développement cérébral et le développement du comportement : l'autisme est défini par la communauté scientifique comme un trouble neuro-comportemental précoce ;
• Les facteurs environnementaux : l'environnement intervient à un stade précoce du développement, il s'agit d'une des pistes avancées par les chercheurs (affection durant la grossesse, virus, neuro-inflammation - au niveau du cerveau - etc) ;
• La prise de traitement médicamenteux durant la grossesse (Dépakine).

Toutefois, l'Institut Pasteur rappelle que "ni les vaccins, ni la maladie cœliaque, ni les caractéristiques psychologiques des parents ne sont facteurs de risques d'autisme chez les enfants".

Que penser de la théorie du parent qui donne l'autisme ?

Cette hypothèse basée sur la théorie des "gènes" de l'autisme, a été décriée à de nombreuses reprises, comme ne faisant pas partie des facteurs de risque connus.

Ceci étant, une étude parue en 2023 (Sharing parental genomes by siblings concordant or discordant for autism) révèle que le patrimoine génétique du père serait davantage impliqué dans le TSA d'un enfant que celui de sa mère.

Mais ces travaux n'ont pu établir cette corrélation que dans les familles où deux enfants au moins étaient concernés par un TSA. Cette étude portait sur les gènes de 6 000 familles. Un facteur de risque à explorer tout de même en vue de nouveaux traitements.

Pourquoi lit-on qu'il y aurait plus d'autisme ?

Depuis quelques années, les articles de presse et médias se sont emparés du sujet : et pour cause, le nombre de personnes autistes seraient, selon ces derniers, en plein essor.

Pourtant, au vu des facteurs de risques connus par la recherche, rien ne semble justifier la probabilité que les TSA soient plus présents qu'avant.

Pourtant, les demandes de diagnostic de troubles du développement explosent. Plusieurs pistes sont à évoquer à ce sujet :

• La reconnaissance du handicap tel que prévu en France présente un intérêt pour certaines personnes, facilité par des médecins parfois conciliants selon certains auteurs ;
• Le besoin de bénéficier d'une étiquette est parfois plus confortable pour certaines personnes, s'appuyant sur des "traits autistiques" comme justification à un sentiment de différence persistant ou des difficultés sociales plutôt que d'envisager une remise en question profonde et un travail psychologique ;
• Des diagnostics de l'autisme parfois trop hâtifs, réalisés par des médecins et professionnels qui trop conciliants selon certains auteurs.

Spectre de l'autisme : la piste des hormones

En l'état des statistiques connues, l'autisme semble toucher plus fréquemment les garçons que les filles (3 ou 4 pour une, selon le Ministère de la santé). C'est pourquoi certains scientifiques ont poussé l'hypothèse du facteur hormonal chez les personnes autistes.

L'hypothèse suivante est d'ailleurs parfois évoquée : une "masculinisation" du cerveau, liée à une action de la testostérone et du chromosome Y. Selon cette hypothèse, ces différentes actions inhiberaient les potentiels de communication (échanges visuels et parole). Ce qui se traduirait par l'enferment dans son monde de l'autiste.

Selon les chercheurs, l'action nocive des hormones pourrait se déclencher dès le stade foetal (lorsqu'elles sont sécrétées par la mère) ou plus tard lors du développement de l'enfant. Si cette hypothèse se confirmait, il serait alors possible de dépister un excès d'hormones mâles lors de la grossesse voire de traiter l'enfant.

Une étude très complète en la matière sur le ratio du TSA lié au sexe a été publiée en 2017, sur la base des données de plus de 50 études dans le monde. Cette analyse estime qu'il y aura environ 4,2 garçons autistes pour une fille.

Pour autant, une autre raison évoquée serait le biais de diagnostic, ainsi qu'une tendance des femmes autistes à "masquer" de manière volontaire leurs difficultés relationnelles ou sociales, et à adopter une forme d'adaptation constante, entravant le diagnostic des traits autistiques.

Autisme : le mercure innocenté ?

Une autre hypothèse sur les facteurs de risque de l'autisme concerne un métal : le mercure. En effet, celui-ci est connu pour provoquer des troubles neurologiques à hautes doses. Mais l'exposition à des doses plus faibles chez l'enfant ne pourrait-elle entraîner des problèmes tels que l'autisme ?

Le principal accusé : un conservateur utilisé dans de nombreux vaccins, le Thiomersal. Celui-ci contient effectivement du mercure, or il était utilisé dans la fabrication des vaccins contre la diphtérie, le tétanos ou l'hépatite B.

Ce composé a été depuis retiré de la composition de la plupart des vaccins. Mais il semble avoir été innocenté : selon une étude danoise 1, le nombre de nouveaux cas d'autisme n'a pas diminué depuis le retrait de ce conservateur. La probabilité que le TSA soit lié à ce métal a été réfuté par la communauté scientifique.

Autisme : des causes physiologiques ?

Des chercheurs californiens 2 ont quant à eux cherché si des causes physiologiques et des mécanismes biologiques pouvaient être à l'origine de l'autisme / d'un trouble du spectre autistique.

Ils se sont penchés sur le périmètre crânien à la naissance et dans les premiers mois de la vie d'enfants ayant reçu un diagnostic. Ils ont ainsi observé que ces enfants avaient apparemment une tête un peu plus petite que la moyenne à la naissance, et qu'ensuite, leur cerveau connaissait une phase de développement accéléré par rapport à la normale, pour dépasser en taille celui des autres enfants dès la première année.

Certes, les auteurs n'ont pas identifié de lien de cause à effet entre ces observations et l'autisme. Mais cette corrélation reste pour l'instant un outil éventuel de dépistage de l'autisme.

Dans tous les cas, ces différentes recherches devraient permettre de mieux comprendre les mécanismes à l'origine de cette maladie. Et ce sont autant de pas vers des traitements médicamenteux possibles, une meilleur prise en charge des individus, des stratégies éducatives innovantes et in fine, une qualité de vie améliorée.