Flatulences excessives : causes, traitements, comment les éviter ?
En l’absence de symptômes associés, l’excès de flatulences ne traduit aucune maladie et n’a pas le moindre caractère de gravité. Évacuer beaucoup de gaz n’a donc aucune conséquence si ce n’est la gêne sociale que l’émission de pets peut entraîner. Pour y remédier, certaines règles d’hygiène de vie s’imposent. Le point avec le Dr Philippe Godeberge, gastro-entérologue et hépatologue à Paris.
Flatulences, gaz, pets, éructations, ballonnements : la définition
Il s'agit tout simplement d'une accumulation excessive de gaz dans l'estomac et/ou l'intestin, ce qui provoque des ballonnements et une évacuation de ces gaz par la bouche (éructation) ou l'anus (pet).
Il existe un certains nombre de mots associés à ce phénomène : les bruits intestinaux que l’on entend chez les personnes ballonnées sont des "borborygmes" ou "gargouillements" ; l’éructation (le fait de roter) est souvent appelée "aérophagie" et l’émission de gaz par l’anus est caractérisée par le terme "pets" ou "gaz intestinaux".
Les flatulences présentent généralement une odeur désagréable quand le corps l’évacue sciemment ou non.
Flatulences excessives... ou gêne excessive ?
Pets, gaz, flatulences… Quel que soit le nom qu’on leur donne, ces émissions de gaz parfois malodorant sont un processus parfaitement physiologique. Constituées d’un mélange d’hydrogène, de méthane et dioxyde de carbone, elles résultent de la fermentation, par les bactéries présentes dans le côlon, des résidus alimentaires non absorbés.
Leur production peut être jugée excessive par certains, mais il s’agit là d’une "impression purement subjective, qui dépend de l’idée que ces personnes se font de la production "normale" de gaz intestinaux", souligne le Dr Godeberge.
D'ailleurs, une personne en bonne santé pète en moyenne entre 13 et 21 fois par jour, ce qui représente 0,5 à 1,5 litre d’air.
"La plupart du temps, les gens ne s’en rendent pas compte, car l’évacuation de ces gaz a lieu dans des circonstances appropriées : ils sont seuls, aux toilettes, en pleine nature… Ce n’est que lorsque l’envie de péter survient à des moments inopportuns et que l’on est obligé de se retenir ou, au contraire, dans l’incapacité de se retenir, qu’elle est mal vécue".
Plus que l’excès de gaz / flatulences, ce serait donc leur évacuation qui poserait problème. D’ailleurs, les plaintes pour flatulences excessives émanent davantage des femmes que des hommes, traduisant une gêne sociale typiquement féminine, souligne le gastro-entérologue.
Les causes des flatulences excessives
Présence d'une bactérie
Le volume des flatulences dépend essentiellement de deux choses, interdépendantes : la composition du microbiote intestinal et l’alimentation.
"Certains profils de microbiote intestinal ont une propension à produire davantage de gaz que d’autres. Or, on sait que la nature des microorganismes qui composent cet écosystème (notamment les bactéries), est modulée par divers facteurs : l’alimentation, les antibiotiques, les antécédents de maladie intestinale (en particulier la diarrhée du voyageur), le stress... ", explique le gastro-entérologue.
La production excessive de flatulences peut s’accompagner d’une sensation de ballonnement au niveau de l'intestin. Elle n’en est pourtant pas nécessairement la cause, même si l’évacuation des gaz intestinaux soulage temporairement le ventre en diminuant la tension abdominale. Une étude* a en effet révélé que les personnes souffrant de ballonnements ne produisent pas davantage de gaz que les autres, mais les expulsent plus souvent. En cause, la présence d’une bactérie, Bilophila wadsworthia, productrice d’un gaz irritant qui augmente la sensibilité intestinale. Ce n’est donc pas la quantité de flatulences qui est à l’origine de l’inconfort, mais leur nature.
A contrario, "on peut aggraver la sensation de ballonnement à force de s’empêcher d’évacuer les gaz", souligne le Dr Godeberge.
Incontinence aux gaz intestinaux
Dans d'autres situations, ce qui est en cause n'est pas la quantité de gaz intestinaux, mais l'impossibilité de contrôler leur évacuation. La perte involontaire des flatulences, appelée incontinence au gaz, est loin d'être exceptionnelle. Cette baisse ou perte du contrôle s'observe notamment quand la région anale ou périnéale est altérée ; soit de façon transitoire, comme après un accouchement ou une intervention chirurgicale ; soit de façon permanente à cause de l'âge ou d'une maladie neurologique.
La constipation
Autre cause possible de flatulences : la constipation. En effet, l’accumulation des selles dans le gros intestin prolonge et accentue le processus de fermentation à l’origine de la production de gaz intestinaux.
Quelle maladie provoque beaucoup de gaz intestinaux ?
Plus rarement, les flatulences excessives peuvent être le signe d’une mauvaise absorption intestinale des aliments (le passage des substances que nous ingérons à travers les parois de l'intestin), liée à certaines maladies : Sibo (une maladie intestinale méconnue caractérisée par une pullulation bactérienne de l'intestin grêle), intolérance au lactose ou maladie cœliaque notamment. Une consultation chez un médecin, associant un interrogatoire minutieux et un examen clinique, permettra d’orienter le diagnostic de ces flatulences excessives.
Flatulences excessives : quand s'inquiéter ?
Il n’y a aucune raison de s’alarmer en cas de flatulences jugées excessives. Quand elles sont associées à des douleurs abdominales, une sensation de ballonnement ou des modifications du transit, on fait probablement face à une colopathie fonctionnelle ou à un syndrome de l'intestin irritable (un trouble du tube digestif qui provoque des douleurs abdominales, une constipation ou une diarrhée).
Il est bon de vérifier cette hypothèse lors d'une consultation ; celle-ci devient en revanche impérative en cas de signes de gravité :
- fièvre,
- présence de sang lors de l'évacuation des selles,
- perte de poids.
Comment vider son ventre des gaz ? Quels traitements pour lutter contre les flatulences ?
Certains aliments sont bien connus pour leur pouvoir fermentescible :
- le chou,
- les oignons,
- l’ail,
- l’échalote,
- les artichauts,
- les légumineuses (haricots blancs, rouges, flageolets...).
Sans oublier les féculents (pommes de terre, pâtes, blé, maïs, céréales - à l’exception du riz), riches en glucides, et tous les aliments riches en protéines. Limiter la production de gaz intestinaux passe donc avant tout par une révision de son alimentation et de ses repas (sur conseil de son médecin).
"Pas question d’interdire ces aliments, mais d’en limiter la quantité ingérée. On peut aussi revoir la façon de les consommer, en privilégiant les légumes cuits aux crudités, de les cuisiner, en les blanchissant, etc. La façon de les manger est tout aussi importante : la mastication est la première étape de la digestion, il est donc important de manger et de boire lentement, de façon à améliorer l’absorption intestinale et diminuer la production de gaz", recommande le Dr Godeberge.
Il est également vivement conseillé de réduire sa consommation de boissons gazeuses, surtout celles qui sont riches en fructose, et de chewing-gums sans sucres, pourvoyeurs de sorbitol. Le microbiote intestinal étant très résilient (autrement dit il a naturellement tendance à retrouver sa composition d’origine), ces modifications alimentaires doivent être entreprises sur le long terme.
Le Dr Godeberge met en garde contre les analyses du microbiote ou la recherche des "intolérances alimentaires" par une analyse de sang. Ces examens coûteux et non remboursés ne débouchent sur aucune stratégie thérapeutique.
Il rappelle que la greffe fécale (ou transplantation de microbiote fécal) n’est pas un traitement reconnu contre les flatulences excessives. La prise d’antibiotiques, en diminuant la concentration bactérienne du tube digestif, peut certes s’avérer efficace, mais pose des problèmes de santé sur le long terme.
En revanche, de manière ponctuelle et pour une durée qui n’excède pas une semaine, les médicaments à base de charbon permettent de "passer un cap, même s’ils ne traitent pas la cause des flatulences excessives".
Face à une médecine quelque peu démunie, seule une bonne hygiène de vie associant une alimentation adaptée et la pratique régulière d’une activité physique doit donc être privilégiée pour venir à bout des pets intempestifs !