Maladies à prion : définition, symptômes, transmission, principales maladies à prions

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maladies à prion

Que sont les maladies à prion ? Comment se transmettent-elles ? Quels sont les symptômes et l'évolution de la maladie à prion ? Quel type d'accompagnement, de suivi est proposé aux patients ? On fait le point avec Benoit Schneider, directeur de recherche au CNRS, professeur à l'école polytechnique et responsable d'une équipe de recherche sur les maladies neurodégénératives aminoïdes.

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Qu'est-ce qu'une maladie à prion ?

"Une maladie à prion est une maladie neurodégénérative transmissible et infectieuse", introduit Benoit Schneider, directeur de recherche au CNRS, professeur à l'école polytechnique et responsable d'une équipe de recherche sur les maladies neurodégénératives aminoïdes, dont les maladies à prion. "Il s'agit d'une maladie grave puisqu'on a affaire à un agent pathogène qui peut se propager et être transmis de l'animal à l'homme, par exemple", souligne-t-il.

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En effet, à la différence des autres maladies neurodégénératives type Alzheimer ou Parkinson, "les maladies à prion sont vraiment uniques dans le sens où l'on a des maladies existantes chez l'animal et chez l'homme", distingue-t-il. "Les maladies à prion sont des maladies très rares, en termes de prévalence, elles ne concernent qu'1 individu sur 10 millions", précise-t-il encore.

Quelles sont les maladies à prion ?

Voici les différents types de maladies à prion que l'on peut trouver chez l'animal ou/et chez l'homme :

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Les maladies à prion chez l'animal : Tremblante du mouton, encéphalopathie, dépérissement chronique

Les maladies à prion chez l'homme : Creutzfeldt-Jakob, insomnie fatale familiale, syndrome de Gerstmann-Sträussler-Scheinker, Kuru

Du côté des maladies à prion humaines, "la maladie la plus fréquente est la maladie de Creutzfeldt-Jacob ainsi que le variant de la maladie de Creutzfeldt-Jacob (variant de l'encéphalopathie spongiforme bovine) et qui résulte directement d'une contamination de l'agent de la vache folle à l'homme", explique Benoit Schneider. "On a des exemples prouvant qu'à la fin des années 90 et au début des années 2000, la maladie de la vache folle a été propagée, transmise chez l'homme", note-t-il. Autrement dit, la maladie de la vache folle a induit une pathologie chez l'homme. Autres maladies à prion chez l'homme : l'insomnie fatale familiale et le syndrome de Gerstmann-Sträussler-Scheinker.

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Ainsi, dans les maladies à prion, on a des maladies animales, on a des maladies chez l'homme, une transmission animal-homme existante, tout comme une transmission homme-homme existe également. Et pour cause, on recense une quatrième maladie à prion chez l'homme qu'on appelle la maladie de Kuru. "Cette maladie concernait une tribu de Papouasie/Nouvelle-guinée dite la tribu des forêts et qui pratiquait des rites anthropophages lors de leurs processus mortuaires", explique notre expert. En effet, "les vivants consommaient les viscères du défunt (son cerveau par exemple). Ce faisant, on entretenait la propagation des prions depuis le défunt. Les individus s'auto-contaminaient en consommant de la matière infectée par les prions pathogènes".

Que sont les prions et où se trouvent-ils ?

Les prions, c'est une protéine qui est anormalement structurée. "Cette protéine a changé de forme par rapport à la forme normale dite endogène que l'on appelle protéine prion cellulaire (PrPc)", informe le spécialiste des maladies neurodégénératives aminoïdes. "On va ainsi distinguer deux protéines : la protéine prion cellulaire qui est une protéine physiologique présente dans tous les tissus de l'organisme, exprimée à des niveaux variables selon les tissus, mais on a globalement un peu plus de protéine prion cellulaire dans le système nerveux". Comme il l'explique, il s'agit-là d'une forme non pathologique et qui joue un rôle physiologique dans l'organisme. Naturellement, on a tous une forme de prions, non pathologiques, qui est présente dans toutes nos cellules.

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Sauf que, poursuit-il, "cette protéine est capable de changer de forme et d'acquérir, ce qu'on appelle la forme scrapie (PrPS) en référence à la tremblante du mouton et qui devient l'élément pathologique du système nerveux central". Ces prions pathogènes, bien évidemment, on n'en a pas ou très peu et ils sont éliminés par l'organisme. Excepté en cas d'infection par les prions, comme cela a pu se produire avec l'épidémie de la vache folle. "On s'était alors retrouvé avec un contaminant - la PrPSC - capable d'entrer en contact avec la forme cellulaire et, de faire changer de forme la PrPc pour devenir prion pathogène", analyse-t-il. Selon Benoit Schneider, "on a eu alors affaire à un élément de conversion et d'amplification des prions pathogènes. A partir de là, les prions s'accumulent, se propagent dans le cerveau faisant apparaître des lésions, car les neurones sont attaqués et détruits par ces prions pathogènes".

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Symptômes de la maladie de Creutzfeldt-Jacob et des autres maladies à prion :

Ce sont d'abord les premiers symptômes cliniques qui apparaissent chez les patients atteints d'une maladie à prion. On constate, en premier lieu, "une phase dépressive, des signes d'anxiété qui débutent précocement", observe le Dr. Schneider. Ces symptômes ne sont pas spécifiques de cette maladie, puisqu'on peut les retrouver également dans la maladie d'Alzheimer. De même, une dépression peut évidemment affecter quelqu'un sans qu'il souffre d'une maladie dégénérative. "On note pareillement des troubles du comportement, des troubles cognitifs, des troubles de l'élocution et de la mémoire. S'ensuit une perte de l'équilibre et une désorientation du patient", liste-t-il tout en précisant que, la survenue de ces symptômes est assez rapide.

Diagnostic des maladies à prion : comment les détecter ?

Certains éléments diagnostiques peuvent être établis par quelques marqueurs présents dans le liquide céphalorachidien pour réaliser un diagnostic de la maladie à prion. "Une analyse sanguine pourrait également permettre de relever quelques anomalies, sans qu'elles soient strictement corrélées qu'aux maladies à prion", rapporte Benoit Schneider. "Des techniques d'imageries type IRM peuvent également permettre d'observer d'éventuelles anomalies de fonctionnement dans le système nerveux central", ajoute-t-il. Pour autant, "la seule preuve qu'il s'agit bien d'une maladie à prion est l'analyse post-mortem via une autopsie et une analyse biochimique du cerveau", complète-t-il. Néanmoins, "les recherches se sont améliorées, et pour certaines maladies à prion comme la maladie de Creutzfeldt-Jacob, on parvient à détecter les prions dans les fluides biologiques chez le patient, via des fluides d'amplification", conclut le Dr. Schneider.

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Transmission : comment se transmet le prion ?

Les maladies à prion peuvent donc se transmettre entre les animaux, mais aussi de l'animal à l'homme et entre les hommes lors d'une exposition aux prions. Mais, comment se propagent-t-elles, quel sont leurs modes de transmission ? Il y a eu, par exemple le scandale de l'hormone de croissance relate le responsable d'une équipe de recherche sur les maladies neurodégénératives aminoïdes : "Initialement, on préparait l'hormone de croissance à partir d'hypophyse de cadavres humains avant de la purifier pour traiter les individus atteints de nanisme d'origine hypophysaire. Or, les protocoles de purification n'étaient pas suffisants, si bien que certains individus traités à partir de certains lots de ces hormones de croissance, ont commencé à développer une maladie de Creutzfeldt-Jacob. L'analyse de ces lots a montré la présence de prions pathogènes (PrPSC)". Dans le cas de la vache folle, la maladie se transmet par l'alimentation via un animal contaminé au travers de la consommation de viande de bœuf. "Ces bovins, en amont des processus industriels, avaient été nourris avec des farines animales confectionnées à partir de carcasses d'animaux broyées contenant des prions pathogènes", indique le spécialiste. C'est ainsi que ces prions pathogènes ont été introduits chez la vache. Ensuite, l'homme consommant de la viande de bœuf contaminée a fait entrer la maladie dans la chaine alimentaire humaine. La contamination peut également se produire lors de pratiques chirurgicales considérées comme à risque. "C'est ce qu'on appelle les formes iatrogènes", décrypte Benoit Schneider : "Certains patients ayant reçu une greffe de dure-mère dans le cerveau ont été contaminés par des prions pathogènes".

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Pour autant, nuance-t-il, "la plupart des maladies à prions sont ce qu'on appelle les formes sporadiques, et on ne sait pas quelle est l'origine de ces maladies". C'est-à-dire qu'on ignore pourquoi elles apparaissent et pourquoi tel patient va développer une maladie de Creutzfeldt-Jacob. Enfin, explique-t-il, "il peut aussi y avoir des formes génétiques entraînant une ou plusieurs mutations dans le gène favorisant la conversion du prion dans une forme pathogène".

Les maladies à prions sont-elles transmissibles à tous les âges ?

Concernant les formes sporadiques, "ce sont plutôt des maladies qui touchent les personnes âgées de soixante ans et plus", constate le Dr. Schneider. En revanche, la contamination a pu avoir lieu plusieurs années avant, parfois même vingt ans plus tôt.

Dans le cas des formes infectieuses, type variant de la maladie de Creutzfeldt-Jacob, "cela peut toucher des individus beaucoup plus jeunes. En l'occurrence, des individus ayant consommé de la viande contaminée", rapporte-t-il. Là, c'est beaucoup plus rapide puisque, entre le moment de la contamination et le décès du patient, il s'écoule au maximum dix ans.

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Quelle est l'évolution de la maladie à prion ?

On peut avoir un temps d'incubation asymptomatique assez long dans les maladies à prion, cela peut prendre quelques mois, voire parfois des années. Cependant, "une fois que les premiers signes cliniques se manifestent, il se passe en général entre six mois et trois ans avant que le patient ne décède", informe Benoit Schneider.

Quel suivi, quel.s traitement.s pour les maladies à prion ?

En cas de symptômes, on consulte sans tarder son médecin généraliste. Au moindre doute, il enverra le patient chez un neurologue. Le spécialiste ne pourra pas certifier qu'il s'agira d'une maladie à prion, car les symptômes ne sont pas spécifiques des maladies à prion.

Peut-on soigner une maladie à prion ? Comment ?

"Il n'existe pas de traitement pour guérir d'une maladie à prion, le patient est pris en charge par les équipes cliniques", explique Benoit Schneider. À l'Institut du Cerveau, à la Pitié-Salpêtrière à Paris, se trouve la centre national de référence sur les prions qui peut aiguiller le patient sur son parcours clinique. Sur le site de cette cellule nationale de référence des encéphalopathies spongiformes subaiguës (ESS), c'est-à-dire les maladies de Creutzfeldt-Jakob encore appelées maladies à prions ou encéphalopathies spongiformes subaiguës transmissibles (ESST) se trouvent les diverses aides que la Cellule de Référence peut apporter aux patients. Et notamment, une prise en charge pour améliorer la fin de vie des patients via un traitement médical pour soulager leurs douleurs et les accompagner au mieux.

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Où en sommes-nous de la recherche et des essais cliniques sur les prions ?

"Il y a des essais cliniques en cours basés sur l'extinction d'expression ou la neutralisation de la protéine prion cellulaire pour enrayer le cercle vicieux de production, accumulation de prions pathogènes", indique néanmoins le Dr. Schneider. En France, la recherche sur les prions a été freinée en 2021 par l'instauration du moratoire sur les prions, comme l'explique l'Inserm dans un communiqué. Cette suspension fut liée au fait qu'il y a eu deux accidents dans des laboratoires académiques entraînant le décès de plusieurs individus suite à une contamination ayant eu lieu dix à quinze ans auparavant. Beaucoup de laboratoires se sont alors retrouvés à l'arrêt en juillet 2021.

"Depuis lors, on a beaucoup de mal à redémarrer une activité de recherche sur les prions", admet Benoit Schneider. Mais, au-delà de ça, selon le responsable d'une équipe de recherche sur les maladies neurodégénératives aminoïdes "même si peu de patients sont concernés, les maladies à prions constituent un excellent système de modèle pour d'autres maladies neurodégénératives". En effet, détaille-t-il, "on se rend compte que les maladies d'Alzheimer ou de Parkinson emprunte des mécanismes communs de neurodégénérescence avec d'autres agents qui - sans en être un - ont un comportement prion spécifique de la maladie d'Alzheimer ou de la maladie de Parkinson". Dans la littérature scientifique, on parle de prion-like. C'est pourquoi, conclut Benoit Schneider, "étudier les maladies à prion pourrait éclairer sur d'autres maladies neurodégénératives et aider à trouver des mécanismes communs et donc, d'identifier des cibles, des options thérapeutiques potentiellement communes qui permettraient d'agir sur un spectre large de maladies neurodégénératives".

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Sources
  • Entretien avec Benoit Schneider, directeur de recherche au CNRS, professeur à l'école polytechnique et responsable d'une équipe de recherche sur les maladies neurodégénératives aminoïdes.
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