Syndrome de Cyriax, si mal connu

Publié le  , mis à jour le 
en collaboration avec Quentin Courthéoux (chiropracteur)

Syndrome de Cyriax

Peu connu du grand public mais aussi des professionnels de santé, le syndrome de Cyriax est une affection du thorax liée à une subluxation du cartilage de certaines côtes. Comment reconnaître cette maladie ? Sur quoi repose son diagnostic ? Et quelle est la prise en charge indiquée pour récupérer la mobilité de cette articulation ? Pour le savoir, Doctissimo a interrogé Quentin Courthéoux, chiropracteur à Boulogne-Billancourt (Hauts-de-Seine).

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Qu'est-ce que le syndrome de Cyriax ? Définition

Le syndrome de Cyriax doit son nom au chirurgien orthopédiste anglais qui le décrit pour la première fois en 1919. Également appelé syndrome de la côte claquante, de la côte douloureuse ou de la côte glissante (« slipping rib syndrome » en anglais), le syndrome de Cyriax correspond à une subluxation du cartilage costal des extrémités antérieures de l’une des côtes 8, 9 ou 10 qui emprisonne le nerf intercostal sus-jacent, explique Quentin Courthéoux.

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Rappel d’anatomie des côtes

Pour comprendre le syndrome de Cyriax, il faut connaître l’anatomie du thorax. Celui-ci est composé de 12 paires de côtes - soit 24 côtes - qui s'articulent avec les vertèbres thoraciques en arrière et le sternum en avant. À l’exception de la première et de la dernière côte qui ne touchent qu'une seule vertèbre, toutes les côtes sont positionnées entre les corps de deux vertèbres et s'articulent avec elles.

On distingue 3 types de côtes selon la façon dont elles s'articulent avec le sternum :

  • Les vraies côtes : elles sont au nombre de 7 (de la 1ère à la 7ème) et possèdent chacune une articulation propre avec le sternum (articulation chrondrosternale) ;
  • Les fausses côtes : au nombre de 3 (de la 8ème à la 10ème), elles sont reliées entre elles par un cartilage, qui lui-même est relié à la 7ème vraie côte. Les fausses côtes ne sont donc pas articulées directement avec le sternum, mais indirectement : on parle d’articulation interchondrale ;
  • Les 2 dernières côtes, appelées côtes flottantes, sont des côtes assez courtes qui ne s'articulent pas avec le sternum, ni de manière directe ni de manière indirecte. Elles ne s'articulent donc qu'avec les vertèbres thoraciques.
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Physiopathologie du syndrome de Cyriax

"Chacune des fausses côtes s’articule avec la côte supérieure via un bout de cartilage : c’est au niveau de cette articulation dite costo-chondrale que survient la subluxation (autrement dit une luxation incomplète, ndlr) dans le syndrome de Cyriax", explique le chiropracteur. La côte devient alors hypermobile et sa pointe, en glissant sous la côte supérieure, peut irriter le nerf intercostal et provoquer une douleur. C’est aussi ce glissement qui peut provoquer un bruit de craquement ou de claquement.

Dans les deux tiers des cas, l’atteinte est unilatérale droite ; une atteinte bilatérale est exceptionnelle (1% des cas). De même, le syndrome de Cyriax concerne la plupart du temps une seule côte, le plus souvent la 10ème, mais il arrive que deux des fausses côtes voire les trois soient touchées (4% de double atteinte, 1% de triple atteinte).

Les femmes davantage touchées que les hommes

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Cette affection assez rare peut survenir à tout âge, mais elle touche plutôt les adultes âgés de 50 ans en moyenne1. Dans sa pratique, le chiropracteur boulonnais reçoit autant de femmes que d’hommes souffrant du syndrome de Cyriax. Mais d’après les études, les femmes seraient davantage touchées que les hommes, du fait de leur hyperlaxité d’origine hormonale. D’après des estimations, ce syndrome représenterait environ 5% des consultations de soins primaires pour des douleurs musculosquelettiques thoraciques2 et 5% des consultations en gastro-entérologie pour douleurs chroniques3.

Quelles sont les causes du syndrome de Cyriax ?

Ce syndrome peut être dû à une anomalie congénitale de la paroi thoracique, à une destruction du tissu fibreux ou du cartilage qui composent l’articulation costale, ou à une hypermobilité des cartilages costaux des fausses côtes dont on ignore la cause.

Les facteurs de risque

Le syndrome de Cyriax fait systématiquement suite à un traumatisme direct ou indirect, unique ou répété.

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Traumatismes directs uniques 

Coup de poing, chute, accident de voiture… Tout choc violent des fausses côtes sur un élément dur peut être la cause d’une subluxation costale. Certains sports sont particulièrement à risque : sports de contact (hockey, rugby, football...), sports de combat (boxe, karaté...), sports de glisse où les chutes sont fréquentes (skateboard, ski, cyclisme…).

Traumatismes directs répétés 

Le port régulier de charges lourdes appuyées contre le rebord costal ou le travail posté avec un appui fort sur le rebord costal induisent des traumatismes directs moins violents mais leur répétition peut entraîner un syndrome de la côte glissante.

Traumatismes indirects

Les causes indirectes sont surtout liées à un déploiement excessif ou inhabituel d’énergie. Ainsi, le transport d’un objet trop lourd, la traction d’une charge pesante ou un effort musculaire violent inhabituel (accoucher ou pousser une voiture en s’aidant de ses côtes par exemple) peuvent entraîner la survenue du syndrome de Cyriax. "Ces traumatismes indirects sont secondaires à des contractions musculaires divergentes exercées sur le rebord costal", peut-on lire dans une étude parue en 2018 dans une revue médicale française4.

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Comment savoir si on a ce syndrome ?

La douleur, principal symptôme du syndrome de Cyriax

Le principal symptôme du syndrome de Cyriax est une douleur mécanique dans la partie inférieure de la poitrine ou dans la partie supérieure de l'abdomen. "Cette douleur peut être très vive lors de l’apparition du syndrome de Cyriax, mais elle est généralement de courte durée. Avec le temps, son intensité s’atténue et se transforme davantage en une forte gêne", rapporte Quentin Courthéoux. S'étirer, tousser, éternuer, se pencher, s'asseoir, se relever, marcher, respirer profondément, soulever des charges lourdes : toute posture ou mouvement impliquant la cage thoracique et/ou sollicitant les muscles abdominaux exacerbe généralement la douleur.

Une douleur irradiante, souvent trompeuse

Certains patients décrivent une douleur irradiant dans le dos vers la pointe de l’omoplate, et parfois même dans les bras, le cou. D’autres au niveau de certains organes abdominaux. "Il arrive en effet que des personnes souffrant d’un syndrome de Cyriax ressentent des douleurs dans des régions où se situent l’œsophage, l’estomac ou la vésicule biliaire, autant de localisations qui font penser à des douleurs viscérales projetées, ce qui peut retarder le diagnostic", complète le chiropracteur. La littérature rapporte dans environ un tiers des cas des douleurs de l’épigastre, du flanc droit, de la fosse iliaque droite voire des douleurs diffuses à tout l’abdomen.

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Un claquement parfois présent

Une sensation de clic, de claquement ou de glissement peut également être présente, mais ce n’est pas systématique.

Comment diagnostiquer un syndrome de Cyriax ?

En cas de douleur brutale après un choc au niveau du thorax, il est conseillé de consulter un médecin généraliste. La littérature montre toutefois que ce syndrome reste assez méconnu des praticiens et que certains symptômes, en particulier les symptômes digestifs, peuvent être à l’origine d’une longue errance diagnostique.

L'examen clinique

Après un interrogatoire de son patient sur les circonstances du traumatisme ayant entraîné la douleur, le médecin procède à son examen clinique : celui-ci comprend la palpation de la côte douloureuse et la manœuvre du crochetage, un geste qui consiste à introduire les doigts placés en crochet sous le rebord de la côte douloureuse et d’exercer une traction antérieure afin de reproduire la douleur. La mise en évidence d’un point douloureux au niveau du bourrelet costochondral, majoré à l’inspiration profonde et par la manœuvre du crochetage, oriente vers le diagnostic d’un syndrome de Cyriax.

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Les examens d’imagerie inutiles

Les examens d’imagerie (radiographie, IRM, scanner) ne permettent pas de diagnostiquer un syndrome de Cyriax. Car soit ils ne permettent pas de visualiser les tissus mous et donc le cartilage costal abîmé, soit ils sont réalisés en position allongée, entraînant un redressement de la colonne vertébrale et le retour de la côte impliquée à son emplacement normal.

Diagnostics différentiels

Le diagnostic du syndrome de Cyriax est avant tout un diagnostic d’élimination de diverses pathologies viscérales : cholécystite, œsophagite, ulcère gastrique, pancréatite… Il faut également le distinguer de la xyphoïdalgie, une douleur au niveau du sternum déclenchée par une pression sur l’appendice xyphoïde, ou encore du syndrome de Tietze. Ce dernier correspond à une inflammation douloureuse des articulations chondrocostales supérieures et sternoclaviculaires. "Ce syndrome touche la cage thoracique plus haut, à la jonction des côtes et du sternum, précise Quentin Courthéoux. Plus douloureux que le syndrome de Cyriax, le syndrome de Tietze entraîne uniquement une douleur thoracique, pas abdominale".

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L’examen clinique doit par conséquent être bien mené pour éviter une errance diagnostique préjudiciable à la mise en place rapide d’une prise en charge adaptée.

Traitement : comment soigner un syndrome de Cyriax et soulager la douleur ?

Le traitement d’un syndrome de Cyriax dépend de la sévérité de la douleur. Dans 15% des cas, celle-ci disparaît spontanément au bout de deux à trois semaines. Il repose avant tout sur des approches conservatives qui visent à soulager le patient. En l’absence d’efficacité, des approches plus invasives, comme l'infiltration et la chirurgie, peuvent être envisagées.

Prise en charge conservative

Traitement antalgique

Le premier conseil est de se reposer et d’éviter tout effort et tout mouvement susceptible de déclencher la douleur. L’application de glace ou de chaleur sur la zone douloureuse peut également être efficace dans l’immédiat. Les médecins recommandent également l’application de crèmes ou de gels antalgiques, et la prise d’antidouleur (paracétamol et/ou anti-inflammatoires non stéroïdiens).

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Médecines complémentaires : ostéopathie, chiropraxie

Les thérapies manuelles comme la chiropraxie et l’ostéopathie, qui proposent des manipulations douces, ont également leur place dans le traitement du syndrome de Cyriax, confirme Quentin Courthéoux. "En chiropraxie, le thérapeute va s’appliquer à relâcher les tensions musculaires qui pèsent sur l’articulation subluxée. Pour cela, il va travailler à l’autre bout de la côte sur les articulations costovertébrales voisines de l’articulation subluxée, au niveau des abdominaux et au niveau du muscle Serratus antérieur (également connu sous le nom de muscle dentelé antérieur ou muscle costoscapulaire de Chaussie, ce muscle est situé sous le bras, il part de l’omoplate jusqu’à la 10ème côte et assure la rotation de l’omoplate, ndlr)". Lorsque la survenue du syndrome de Cyriax est récente, une seule séance suffit à soulager la douleur ; si les symptômes sont installés depuis longtemps en revanche, plusieurs séances seront nécessaires pour stabiliser l’articulation et obtenir un soulagement durable.

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Approches invasives

L'infiltration

Si la douleur persiste, une infiltration locale à base de lidocaïne associée ou non à un corticostéroïde (on parle de bloc nerveux intercostal) peut être proposée. Elle doit être réalisée par un anesthésiste en milieu médical. Son efficacité confirme le diagnostic. Si le blocage du nerf intercostal ne soulage pas les symptômes, il est nécessaire d'envisager une fracture manquée, une déchirure musculaire ou une autre cause à l’origine de la douleur.

La chirurgie, en ultime recours

L’échec du traitement médical peut conduire au traitement chirurgical qui consiste en la résection des 5 à 8 derniers centimètres du cartilage luxé, mais ceci reste exceptionnel.


Sources

Quentin Courthéoux, chiropracteur à Boulogne-Billancourt (Hauts-de-Seine)

1 - Douleurs abdominales d’origine rhumatologique - Association française de formation médicale continue en hépato-gastro-entérologie - https://www.fmcgastro.org/texte-postu/postu-2019-paris/douleurs-abdominales-dorigine-rhumatologique/

2 - Gress K, Charipova K, Kassem H, Berger AA, Cornett EM, Hasoon J, Schwartz R, Kaye AD, Viswanath O, Urits I. A Comprehensive Review of Slipping Rib Syndrome: Treatment and Management. Psychopharmacol Bull. 2020 Oct 15;50(4 Suppl 1):189-196. PMID: 33633425; PMCID: PMC7901126.

3 - Scott EM, Scott BB. Painful rib syndrome--a review of 76 cases. Gut. 1993 Jul;34(7):1006-8. doi: 10.1136/gut.34.7.1006. PMID: 8344569; PMCID: PMC1374244.

4 - F Nuccio, P Arlet, L Astudillo. Le syndrome de Cyriax. Rev Fr Med Hosp Polyval 2018;2(4):23-25.

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