La fracture du genou, une blessure grave qui peut être évitée

Amélie Pelletier Journaliste

Qu'est-ce qu'une fracture du genou ?

Pour comprendre ce qu’est une fracture du genou, petit rappel d’anatomie de cette articulation essentielle de la jambe.

Les os du genou

Le genou est une articulation complexe composée de plusieurs structures importantes qui travaillent ensemble pour permettre une grande amplitude de mouvement tout en supportant le poids du corps :

• Le fémur : cet os de la cuisse forme la partie supérieure de l'articulation du genou ;
• Le tibia : cet os de la jambe forme la partie inférieure de l'articulation ;
• La rotule (ou patella) : ce petit os en forme de disque protège l'articulation du genou et facilite l'extension de la jambe ;
• Du cartilage : ce tissu lisse recouvre les extrémités des os et permet aux surfaces articulaires de glisser les unes sur les autres sans friction ;
• Des ligaments : ils servent à maintenir les os ensemble et à assurer la stabilité du genou ;
• Deux ménisques : ces deux structures en forme de croissant situées entre le fémur et le tibia agissent comme des amortisseurs et stabilisent l'articulation.

Les différents types de fracture du genou

Il existe plusieurs types de fractures du genou, chacune ayant des caractéristiques spécifiques en fonction de la localisation et de la gravité de la blessure.

La fracture de la rotule

Également appelée fracture patellaire, la fracture de la rotule peut se produire lors d'un impact direct sur l'avant du genou, notamment lors d'une chute ou à la suite d'un coup très violent au genou. Les accidents de la route mais aussi les simples chutes chez des personnes âgées - notamment des femmes - souffrant d'ostéoporose et ayant une faible densité minérale osseuse (DMO) sont généralement en cause dans les fractures de la rotule.

La fracture du plateau tibial

Cette fracture affecte la partie supérieure du tibia, où l'os rencontre le fémur. Elle est souvent causée par un choc violent sur le genou, comme lors d'un accident de voiture. Elle est également relativement fréquente chez les skieurs, ajoute le Dr Ieronim Ovidiu Crisan, chirurgien orthopédiste aux Hôpitaux du Léman. "Une chute à ski est une cause relativement fréquente de fracture du plateau tibial chez les jeunes adultes. Elle résulte d'un mécanisme indirect associant une torsion du genou sans que le ski déchausse".

La fracture du condyle fémoral

Il s'agit d'une fracture qui concerne l'extrémité inférieure du fémur. Elle est moins fréquente que les autres types de fractures du genou et survient généralement lors de traumatismes dits à haute énergie, lors des accidents de la voie publique notamment.

Fracture du genou déplacée ou non déplacée ?

La plupart du temps, une fracture du genou est dite "déplacée", c'est-à-dire que les os de la jambe ne sont plus dans leur axe habituel, entraînant une déformation de cette dernière. La fracture est ainsi visible à l'œil nu.

Il arrive néanmoins que la fracture du genou soit "non déplacée", et donc non visible sans examen d'imagerie ; il peut arriver que le médecin passe, dans ce cas, à côté du diagnostic de fracture, souligne le Dr Crisan.

Comment peut-on se casser le genou ?

Les fractures du genou sont causées soit par un traumatisme direct, soit par un traumatisme indirect. Les causes les plus fréquentes sont les accidents de la voie publique (AVP), suivis des chutes ou des chocs directs sur le genou.

Les accidents de la route

Ce sont l'une des principales causes de fractures du genou, en particulier de fractures du plateau tibial, chez l'adulte jeune. Étant plus impliqués que les femmes dans les accidents de la route, les hommes sont plus nombreux que ces dernières à se casser le genou de cette façon.

Une chute sur le genou

Tomber sur un genou plié peut entraîner une fracture, en particulier chez les personnes âgées ou celles ayant une faible densité osseuse.

Un choc sur le genou

Les sports comme le football, le rugby ou le hockey, qui impliquent des chocs violents, augmentent le risque de fracture du genou.

L'ostéoporose

En affaiblissant les os, cette maladie augmente le risque de fracture lors d'un impact. Le genou n'échappe pas à cette règle et les os qui le composent peuvent se casser lors d'une simple chute de la hauteur de la personne.

Quels sont les signes d'une fracture du genou ?

Une fracture du genou entraîne divers symptômes, en tête desquels figure la douleur. "Vive, lancinante, elle est difficilement supportable et peut provoquer un malaise vagal : on parle de douleur "chocogène"", indique le Dr Crisan. On observe fréquemment un œdème du genou, autrement dit un gonflement de l'articulation, qui traduit un épanchement. En cas de saignement interne, des ecchymoses peuvent apparaître autour du genou. S'il s'agit d'une fracture déplacée, une déformation axiale de la jambe, témoignant d'un déplacement des os, est visible. Enfin, un genou cassé entraîne une impotence fonctionnelle : la personne est incapable de bouger sa jambe, de plier ou d'étendre son genou.

Comment pose-t-on le diagnostic d'une fracture du genou ?

Le diagnostic d'une fracture du genou commence par un examen clinique approfondi, suivi d'examens d'imagerie pour confirmer ce diagnostic et déterminer la gravité de la gravure. "L'examen d'imagerie qui permet un diagnostic de certitude reste la radiographie", informe le Dr Crisan. Si une radio est souvent suffisante pour identifier une fracture osseuse et déterminer si les fragments osseux sont déplacés, il arrive qu'un examen supplémentaire soit nécessaire pour fournir des images plus détaillées. "Un scanner s'avère souvent utile en cas de fractures complexes, en particulier celles du plateau tibial, confirme le chirurgien orthopédique. La tomodensitométrie (TDM) permet par exemple de voir précisément s'il y a un enfoncement du plateau tibial et, le cas échéant, de mesurer cet enfoncement. Cela permet de préparer au mieux l'intervention chirurgicale".

Un examen d'imagerie par résonance magnétique (IRM) peut, par ailleurs, être prescrit pour évaluer les dommages aux tissus mous, tels que les ligaments ou les ménisques, qui peuvent être associés à une fracture osseuse.

Que faire en cas de fracture du genou ?

Peut-on marcher avec un genou cassé ?

La douleur provoquée par une fracture du genou est si intense qu'elle rend tout mouvement de jambe, et a fortiori la marche, impossible.

Comment soigner une fracture du genou ?

Le traitement d'une fracture du genou dépend de la gravité de la fracture, de son emplacement et de l'état de santé général du patient. Les options de traitement incluent des approches non chirurgicales, en particulier pour soulager la douleur, une intervention chirurgicale et de la kinésithérapie.

Traitement non chirurgical

La prise en charge vise en premier lieu à soulager la douleur liée à la fracture. Outre l'application d'une poche de glace, le médecin prescrit en général des antalgiques de palier 1 (paracétamol, anti-inflammatoires non stéroïdiens - AINS) et, si la douleur ne passe pas, des antalgiques de palier 2 (morphine, tramadol). Il peut, si nécessaire, pratiquer une ponction pour évacuer l'hémarthrose (épanchement de sang à l'intérieur de l'articulation) le cas échéant. Enfin, dans certains cas, lorsque le patient est pris en charge aux urgences, l'anesthésiste peut réaliser un bloc nerveux : ce geste technique consiste à injecter un produit anesthésiant autour d'un nerf afin de bloquer la transmission de la douleur. En cas de genou cassé, le plus courant est le bloc fémoral ou le bloc du canal des adducteurs.

En plus de soulager la douleur, la prise en charge consiste à immobiliser le genou cassé avec une attelle ou un plâtre pour permettre à l'os de guérir naturellement. En cas de fracture déplacée, une réduction fermée, autrement dit une remise dans l'axe des fragments osseux, sera réalisée au préalable.

Opération du genou

L'intervention chirurgicale, si elle est nécessaire, doit être réalisée dans les 24 heures qui suivent l'accident ayant conduit à la fracture du genou, rappelle le Dr Crisan. "Il s'agit d'une intervention souvent complexe et délicate. Dans les fractures graves, les chirurgiens pratiquent une ostéosynthèse par plaque vissée ; cette technique consiste à réaligner et stabiliser les fragments osseux à l'aide de plaques, de vis et de broches. Cette fixation interne est réalisée sous arthroscopie lorsque la fracture est peu déplacée, ou à ciel ouvert lorsqu'elle l'est davantage. Il est possible de retirer les éléments nécessaires à la stabilisation s'ils gênent le patient, mais pas avant 18 mois au moins". Plus le montage est stable, plus les séances de kinésithérapie doivent être débutées précocement, idéalement le lendemain de l'opération.

Rééducation et kinésithérapie

La rééducation après une fracture du genou est un processus crucial pour retrouver la mobilité et la fonction de cette articulation. "C'est très important de mobiliser rapidement l'articulation du genou : cela permet de diminuer la douleur et de prévenir la raideur et l'algoneurodystrophie", confirme le Dr Crisan. Le programme de rééducation dépend du type de fracture et du traitement, mais il comprend généralement des exercices doux pour améliorer la mobilité et prévenir la raideur articulaire, et du renforcement musculaire autour du genou pour soutenir l'articulation et prévenir les futures blessures. Il faut compter entre 3 et 6 mois de rééducation. La reprise des activités peut être envisagée avant, entre 6 et 12 semaines après l'intervention chirurgicale. Le chirurgien orthopédiste préconise d'opter pour des sports tels que le cyclisme ou la natation, où le genou n'a pas à supporter le poids du corps ; il conseille également de pratiquer son activité physique sous la supervision d'un professionnel de santé pour éviter les récidives.

Complications et pronostic

Le pronostic dépend de la gravité de la fracture, de la rapidité et de l'efficacité du traitement, ainsi que de l'engagement du patient dans la rééducation. La plupart des patients peuvent espérer une récupération complète, bien que cela puisse prendre plusieurs mois.

Il arrive néanmoins, dans environ 20% des cas, que les fractures du genou entraînent des complications : perte de mobilité, raideur articulaire ou arthrose post-traumatique sont les principales séquelles. L'arthrose post-traumatique correspond à une usure prématurée de l'articulation qui provoque une douleur chronique et une réduction de la mobilité ; elle survient généralement au bout de 10 à 20 ans. Les autres complications possibles (infections, thrombose veineuse profonde), sont communes à toute chirurgie.

Peut-on prévenir une fracture du genou ?

Prévenir une fracture du genou implique de minimiser les risques et de renforcer les structures qui soutiennent l'articulation. Voici quelques conseils de prévention :

• Renforcer ses muscles : des muscles forts autour du genou, en particulier les quadriceps et les ischio-jambiers, aident à stabiliser l'articulation.
• Porter des protections : lors de la pratique de sports à haut risque, le port de genouillères peut réduire le risque de blessures.
• Limiter le risque de chutes : pour les personnes âgées, aménager son domicile pour éviter les chutes et améliorer son équilibre peuvent prévenir les fractures.
• Traiter son ostéoporose : pour les personnes à risque (femmes de plus de 50 ans), le traitement de l'ostéoporose avec des médicaments et des suppléments de calcium et de vitamine D peut renforcer les os.
• Enfin, lutter le surpoids et/ou l'obésité, et limiter le risque de maladies systémiques (notamment le diabète), en adoptant une alimentation équilibrée et en pratiquant régulièrement des activités physiques, participent à la prévention des fractures du genou.

La fracture du genou est une blessure sérieuse qui nécessite une prise en charge rapide et appropriée pour éviter des complications à long terme. Grâce à un traitement adéquat et à une rééducation rigoureuse, la majorité des patients peuvent retrouver une fonction normale. Cependant, la prévention reste la meilleure stratégie pour éviter les fractures, en particulier chez les individus à risque élevé. En adoptant un mode de vie sain, en renforçant les muscles autour du genou et en prenant des précautions appropriées, il est possible de protéger cette articulation essentielle.