Vers un vaccin anti-prions ?
Des chercheurs suisses et italiens seraient parvenus à immuniser des cellules de souris contre des prions pathogènes. Bien que ces découvertes ne puissent déboucher directement sur des applications médicales, elles ouvrent la voie à l'élaboration d'un vaccin contre la nouvelle variante de maladie de Creutzfeld-Jakob (nvMCJ).
Les rongeurs comme les hommes possèdent dans leur organisme des prions inoffensifs. Difficilement détectables, ces minuscules protéines n'entraînent pas de réaction de défense de la part de l'organisme. Le problème, c'est que le système immunitaire ne réagit pas non plus, face aux prions pathogènes. Cette indifférence représente un véritable casse-tête pour la mise au point d'un vaccin.
Un optimisme mesuré
Les prions pathogènes sont à l'origine de maladies telles que l'encéphalopathie spongiforme bovine (ESB ou maladie de la vache folle), la tremblante du mouton et surtout leurs formes humaines comme la nouvelle variante de maladie de Creutzfeld-Jakob (nvMCJ).
L'idée de pouvoir traiter l'ESB de manière médicamenteuse est très longtemps restée plus qu'hypothétique. Malgré l'espoir suscité par le traitement à base de quinacrine, un antipaludéen et de chlorpromazine, développé par le prix Nobel Stanley Prusiner, aucun médicament ne semble à ce jour avoir fait ses preuves. Cependant, de récentes avancées plaident en faveur d'une intervention immunologique en traitement curatif et préventif. Cette perspective a les faveurs des chercheurs suisses de l'Hôpital de Zurich 1.
Des anticorps très prometteurs
En octobre 2001, l'équipe suisse 2 a modifié génétiquement des souris pour qu'elles produisent des anticorps "anti-prions". Cet anticorps a été développé par la société Prionics. Ils leur ont ensuite injecté la tremblante du mouton. Mimant ainsi les mécanismes propres à une vaccination, ces anticorps n'ont détruit que les prions anormaux.
"Les anticorps empêchent des protéines prion saines, qui sont aussi présentes dans le corps humain, de passer à un stade pathogène. Nous espérons que cette découverte est un premier pas vers le développement d'un vaccin contre Creutzfeldt-Jakob, ESB et autres maladies à prions" explique docteur Bruno Oesch, le fondateur de Zurich Prionics.
Un vaccin préventif et curatif ?
Publiée dans la prestigieuse revue Science, cette nouvelle avancée démontre que notre système immunitaire est capable de combattre les prions, condition indispensable à l'élaboration d'un futur vaccin.
Elle confirme les résultats obtenus par le Pr. Weissmann 3 en laboratoire sur des cultures de cellules. En juillet 2001, il avait pu prouver que l'anticorps de la société Prionics était capable de bloquer et même de traiter les infections à prions sur des cultures in vitro.
Ce vaccin préventif arrive trop tard pour la sixième victime de la nvMCJ recensée en France. Sans comparaison avec les chiffres anglais (121 cas dont 111 personnes décédées), ce nouveau cas a été signalé par le Réseau national de surveillance des maladies de Creutzfeld-Jakob. Ces chiffres datent de début 2002.
1 - Nat Rev Neurosci 2001 Oct ;2(10) :745-9 2 - Science, vol.294, Issue 5540, 178-182, October 5, 2001 3 - Proc Natl Acad Sci USA 2001 Jul 31 ;98(16) :9295-9
Sur le site de l´Institut de Veille Sanitaire (InVS), il est possible de consulter la mise à jour du nombre de cas de maladie de Creutzfled-Jakob .
Bilan annuel de la MCJ au Royaume-Uni , rendu public en juin 2001 est disponible en ligne.