Huiles essentielles et allergies saisonnières
Vous souffrez d’allergies saisonnières ? Les huiles essentielles, prises en prévention ou en traitement, peuvent vous aider. Le Dr Laure Martinat, médecin au CHU de Poitiers, naturopathe, diplômée en phytothérapie et aromathérapie nous explique comment les utiliser.
Chaque année, à la même période, vous souffrez d’allergie saisonnière. Celle-ci est principalement liée aux pollens des arbres (souvent de la famille des bétulacées : bouleau, noisetier, aulne, de janvier à mai), des graminées (fin du printemps et été) et des herbacées (tout l’été). Certaines moisissures sont parfois également classées dans ces allergies saisonnières, qui dépendent donc du cycle de reproduction des plantes, lorsque leurs pollens sont libérés dans l’air à une certaine période de l’année. Toutefois, avec le réchauffement climatique, la périodicité peut varier.
Ces allergies saisonnières peuvent durer plusieurs semaines d’où des symptômes persistants. "Les manifestations classiques et fréquentes sont la rhinite allergique (nez qui coule et qui “ pique ”, éternuements), la conjonctivite allergique (yeux larmoyants, rouges, avec démangeaisons et/ou picotements), déclenchement de crise d’asthme chez les personnes souffrant d’asthme allergique, urticaire. Une fois la saison des pollens passée, les symptômes disparaissent", explique la Docteure Laure Martinat, médecin, interne en Anesthésie-Réanimation au CHU de Poitiers, naturopathe, diplômée en phytothérapie et aromathérapie et auteure de "Fleurs de Bach : Le Guide de Référence" (éditions Trédaniel).
Anti-inflammatoire, antihistaminique et décongestionnante
Les huiles essentielles (HE) peuvent alors être bénéfiques pour atténuer la réaction allergique, calmer la réaction inflammatoire et l’emballement du système immunitaire. "Le caractère anti-inflammatoire et calmant va tempérer l’action du système immunitaire, le mettre un peu au repos. Le caractère antihistaminique va permettre de diminuer la libération de l’histamine. L’histamine joue un rôle majeur car elle est libérée dans l’organisme à la suite du contact avec l’allergène et est alors responsable des symptômes. Si on diminue le taux d’histamine libérée, on diminue alors les symptômes. C’est d’ailleurs pour cela qu’en médecine, on prescrit en cas de rhinite allergique des médicaments dits “antihistaminiques”. Le caractère décongestionnant permet de lutter contre l’œdème, la congestion des muqueuses notamment respiratoire en cas d’allergie aux pollens", précise la médecin.
Les HE peuvent avoir à la fois une action préventive (avec des doses plus faibles) et curative.
Quelques HE à utiliser en cas d’allergie saisonnière
Diverses HE possèdent des qualités intéressantes dans le cadre des allergies saisonnières. Le Dr Martinat recommande ainsi :
- L’huile essentielle de camomille allemande (Matricaria recutita), anti-inflammatoire et anti-histaminique grâce à sa forte concentration en chamazulène.
Contre-indications : femme enceinte, allaitante, enfant avant 6 ans, antécédents de cancers hormono-dépendants (action hormon-like). Pas d’exposition au soleil dans les 8 heures suivant l’application car elle est photosensibilisante (présence de coumarines).
- L’huile essentielle de katafray (Cedrelopsis grevei), anti-histaminique et anti-inflammatoire en raison de la présence de sesquiterpènes.
Contre-indications : voie orale, enfant avant 12 ans, femme enceinte et allaitante.
- L’huile essentielle d’eucalyptus radié (Eucalyptus radiata), anti-inflammatoire et décongestionnante des voies respiratoires grâce à sa teneur en 1,8 cinéole.
- L’huile essentielle de lavande officinale (Lavandula officinalis) : sa richesse en linalol et en acétate de linalyle lui confère des vertus calmantes et antispasmodiques puissantes.
Contre-indications : femme enceinte avant 3 mois, enfant avant 3 mois.
- L’huile essentielle de camomille romaine (Chamaemelum nobile) calmante, apaisante mais aussi anti-inflammatoire par la présence de différents esters monoterpéniques.
Contre-indications : femme enceinte avant 3 mois, enfant avant 3 mois, épilepsie.
D’une manière générale, ces HE sont déconseillées en cas d’allergie connue à l’un des constituants, d’asthme, d’épilepsie, de peau lésée en cas d’application locale.
Quant à l’HE de tanaisie annuelle, en cas d’allergie aux pollens, malgré ses puissantes propriétés anti-histaminiques, l’experte précise qu’"elle est aussi irritante pour les voies aériennes donc je l’évite en cas d’allergie saisonnière où les signes respiratoires sont prédominants. En outre, elle est vraiment délicate d’emploi. Donc à éviter en automédication et à réserver sur les conseils d’un médecin aromathérapeute".
Ces HE peuvent être prises par voie cutanée. Pour renforcer leur action, il est possible de les diluer dans l’huile végétale de nigelle dont les propriétés anti-inflammatoires et anti-histaminiques ont été démontrées. Pour les peaux les plus sensibles, en application locale ou sur la muqueuse nasale, on se tourne vers le macérât huileux de calendula qui offre une excellente tolérance.
On peut aussi utiliser la diffusion notamment en cas d’atteinte respiratoire. La voie orale est également possible mais plus délicate d’emploi.
Une formulation en prévention des allergies saisonnières
Pour prévenir les allergies saisonnières, le Dr Martinat conseille de verser dans un flacon en verre teinté (avec bouchon compte-gouttes) :
- 5 ml d’HE de camomille romaine ;
- 15 ml d’huile végétale de nigelle QSP.
Agiter pour bien mélanger. La cure doit débuter 15 jours avant le début de la saison des pollens. Prendre 2 gouttes matin et soir sur un comprimé neutre ou dans une petite cuillère de miel. Poursuivre pendant 1 mois, puis 1 semaine sur deux, le temps de la saison d’exposition à l’allergène responsable des symptômes.
Une formulation de diffusion à utiliser en prévention ou en traitement
Autre solution pour une diffusion cette fois, mélanger dans un flacon en verre teinté avec bouchon compte-gouttes :
- 2 ml d’HE d’eucalyptus radié ;
- 2 ml d’HE de camomille romaine ;
- 2 ml d’HE de lavande officinale.
Puis, verser 20 gouttes du mélange dans le diffuseur et laisser diffuser 15 minutes deux fois par jour.
Formulation en traitement par application cutanée
Verser dans un flacon en verre teinté muni d’un bouchon compte-gouttes :
- 2 ml d’HE de katafray ;
- 1 ml d’HE de camomille romaine ;
- 2 ml d’HE de camomille allemande ;
- 1 ml d’HE d’eucalyptus radié ;
- 50 ml de macérât huileux de calendula QSP.
En période de symptômes gênants et importants, appliquer 10 gouttes du mélange 3 fois par jour sur le thorax en massant bien jusqu’à pénétration complète. A renouveler pendant 3 à 5 jours.
Formulation en traitement et en prévention en cas de rhinite allergique
Dans un flacon en verre teinté muni d’un bouchon compte-gouttes, mélanger :
- 50 ml de macérât huileux de calendula QSP ;
- 1 ml d’HE de camomille allemande.
On prélève 4 gouttes du mélange sur son auriculaire et on applique directement la préparation en massant bien l’intérieur de chaque narine. A répéter 2 à 3 fois par jour en cas de symptômes invalidants pendant quelques jours ou en prévention pendant la période à risque.
Ces formulations sont réservées à l’adulte (huiles essentielles et posologies adaptées à l’adulte).
HE : une action puissante, mais incomplète
Selon le Dr Laure Martinat, la prise en charge des allergies saisonnières ne peut reposer uniquement sur les huiles essentielles malgré leur puissance thérapeutique. Il faut travailler de façon globale et en profondeur sur le terrain pour l’équilibrer.
Pour cela, il faut penser par exemple à la gemmothérapie avec "le macérât de bourgeons de cassis (Ribes nigrum) qui est LE bourgeon anti-inflammatoire par excellence de par ses vertus cortison-like. Je lui associe le macérât de bourgeons de charme (Carpinus betulus) qui présente des vertus antispasmodiques, décongestionnantes et cicatrisantes notamment des muqueuses respiratoires et ORL, un atout en cas de rhinite allergique. Plus le macérât de bourgeons de hêtre (Fagus sylvatica) pour ses vertus anti-histaminique. J’ajoute enfin le macérât de jeunes pousses de romarin (Rosmarinus officinalis) pour ses vertus drainantes et détoxifiantes hépatiques", déclare l’experte.
Là aussi, il y a des contre-indications chez la femme enceinte, allaitante, les enfants de moins de 5 ans, et en cas d’allergie connue à l’un des constituants.
Cette action peut être complétée par un rééquilibrage de la flore intestinale qui joue un rôle majeur dans le bon fonctionnement du système immunitaire. Cela passe par des corrections alimentaires, la consommation de fibres prébiotiques qui nourrissent la flore, le réensemencement de la flore par une cure de probiotiques et son entretien par la consommation régulière de produits lactofermentés.
Des bons gestes pour lutter contre les allergies saisonnières
Par ailleurs, pour limiter les symptômes allergiques, évitez les substances irritantes, allergisantes notamment dans le choix de vos produits ménagers (privilégiez, par exemple, le vinaigre blanc). Côté hygiène, rincez-vous toujours à l’eau (douche sans savon) lorsque vous rentrez chez vous, y compris les cheveux, pour éliminer les pollens qui se déposent tout au long de la journée. Changez de vêtements tous les jours et aérez votre maison quotidiennement très tôt le matin ou tard le soir, quand la concentration de pollen dans l’air est la moins importante. Enfin, rincez-vous le nez deux fois par jour avec une solution isotonique à base d’eau de mer.
Ces mesures peuvent permettre de diminuer, voire même de se passer des médicaments antihistaminiques. Toutefois, en cas de traitement prescrit par un médecin, il faut impérativement lui demander son avis si l’on souhaite modifier son traitement de fond.
Même s'il s'agit-là d'une médecine naturelle, l'aromathérapie n'en comporte pas moins des effets secondaires. Alors ne faites pas trop vite rimer naturel et inoffensif, les huiles essentiels sont des produits très concentrés et le conseil d’un professionnel de santé est toujours nécessaire. Pour en avoir plus, lire aussi l'article : Précautions d'emploi et contre-indications des huiles essentielles.