Ce site macabre, facilitant des pactes de suicide, responsable de 130 décès au Royaume-Uni
Profiter de la vulnérabilité de certaines personnes pour leur faire commettre l'irréparable : voici le credo d'un site web, spécialisé en "rencontres suicidaires".
Trouver un partenaire de suicide grâce aux services d'un site Internet ? S'il pourrait s'agir d'une mauvaise blague, ce site Web morbide a pourtant existé et "aidé" de nombreux individus à se suicider collectivement. Celui-ci serait même responsable de près de 130 décès, rien qu'au Royaume-Uni.
Un site macabre où les internautes organisaient leur "suicide collectif"
Selon une enquête de la BBC, plus de 700 Britanniques auraient interagi sur ce site Web et plus de 500 commentaires auraient été publiés par des utilisateurs du monde entier.
Un succès, qui réside dans le concept - plutôt macabre - de cette page web : celle-ci mettait en relation les différents membres de forums, désireux de dénicher la perle rare (ou plutôt noire). Autrement dit, un "parternaire de suicide".
C'est ainsi qu'un homme de 28 ans originaire des Midlands s'est suicidé aux côtés d'une femme écossaise rencontrée sur le site. Une autre femme, encore, s'est suicidée avec un parfait inconnu, rencontré sur le forum. Tous deux avaient perdu la vie, allongés côte à côté.
Mais les services offerts par le site ne s'arrêtent pas là : des utilisateurs partagaient également des instructions sur la façon de se suicider et encouragaient les autres à faire de même. Enfin, il était possible de trouver un partenaire de suicide à côté de chez soi, dans sa région, ou à l'étranger.
Face à ces dérives, les autorités britanniques ont décidé de fermer le site web - déjà responsable de 130 décès au Royaume-Uni.
Une bonne chose, selon notre psychologue, Amélie Boukhobza, qui juge la démarche de ce site "totalement immoral".
"L'existence d'un tel site Internet, c’est non seulement troublant mais aussi extrêmement dangereux, puisqu’il est lié à des centaines de décès déjà ! Il soulève quand même des questions urgentes sur la responsabilité de ces plateformes et sur la nécessité d'une intervention légale et éthique. Il faut interdire ces sites. Décider de mettre fin à ses jours est une décision profondément individuelle, prise dans un état de détresse extrême. Encourager ou faciliter cette démarche par le biais d'un site Internet n'est pas seulement irresponsable, c'est totalement immoral", déplore l'experte.
Une incitation à l'autodestruction
Le suicide, par nature, est un acte de déliaison totale — comme une chaîne de vélo qui déraille.
"Rien ne va plus, et tout lien avec le monde extérieur semble perdu. Donc cet acte ne se partage pas, ne s’encourage pas ! Un site qui permet de trouver un "partenaire de suicide" ne fait qu'alimenter ce sentiment de désespoir et de perte de sens. C'est une forme d'incitation à l'autodestruction, comparable à l'influence coercitive d'une secte encourageant des suicides collectifs", prévient la psychologue.
Résultat : en permettant à des personnes en détresse de se trouver mutuellement, ces sites ne font "qu'aggraver leur isolement".
"En incitant quelqu'un à se joindre à ce chemin, on encourage un acte qui, sans cette influence extérieure, n'aurait peut-être jamais eu lieu. Un tel site devient alors un catalyseur de tragédies, une incitation à l’acte irréversible. C'est une forme perverse de manipulation où l'individualité du choix est effacée au profit d'une décision influencée, partagée, mais pas nécessairement désirée par tous les participants", alerte Amélie Boukhobza.
L'experte rappelle à ce titre que le suicide est un vrai état de crise "qui requiert un accompagnement individuel et sensible". "Les personnes qui envisagent de mettre fin à leurs jours ont besoin de soutien, d'écoute et d'empathie, pas d'un encouragement vers la mort. Inciter quelqu'un à se suicider parce qu’on en est soi-même à ce point de désespoir, c'est nier à l'autre la possibilité de trouver une autre voie, de s'accrocher à l'espoir", poursuit-elle.
Par conséquent, autoriser l'existence de tels sites pose une "grave question de responsabilité sociétale".
"Plutôt que de normaliser ou de faciliter l'idée de se donner la mort, il est crucial d'orienter ceux qui sont en détresse vers des services d'aide, des lignes de soutien, des thérapeutes, et des groupes de soutien capables de fournir l'aide et la compréhension nécessaires pour naviguer à travers ces moments de crise", détaille encore la praticienne, avant de conclure : "Putôt que d'encourager la fin, il faudrait trouver à offrir des moyens d'entrevoir un avenir, même quand tout semble perdu. La prévention du suicide doit rester une priorité de santé publique, un engagement à protéger les plus vulnérables parmi nous".