La prise en charge des maladies mentales à l’hôpital
Du trouble anxieux sévère, à la dépression en passant par la schizophrénie ou l’addiction, plus de 2 millions de personnes sont hospitalisées chaque année en France pour troubles psychiatriques. Avec ou sans consentement, l’objectif est d’apporter au patient l’accès aux soins les mieux adaptés à son cas.
La loi relative à l’hospitalisation pour maladies psychiatriques
Les conditions de prise en charge d'une personne souffrant de troubles mentaux sont différentes selon que la personne est soignée avec son consentement, à la demande d'un tiers ou sur décision d'un préfet.
L’hospitalisation avec consentement du patient
On parle aussi de soins psychiatriques libres. Elle correspond à 87 % des hospitalisations.
Le patient se présente volontairement dans le service psychiatrique en urgence, sur rendez-vous, ou pour une ré-hospitalisation programmée. Sa prise en charge se déroule alors comme pour une prise en charge classique dans tout autre établissement de santé. Il lui est proposé d’abord de passer un examen clinique complet pour évaluer son état de santé, puis décider ensuite des examens complémentaires à faire et définir d’un protocole thérapeutique. "Il existe environ 800 à 900 services de psychiatrie en France, explique le Professeur Pierre-Michel Llorca, chef de service du pôle de Psychiatrie adulte au CHU de Clermont Ferrand. L’accueil est extrêmement variable d’un hôpital à un autre. Tout dépend de l’organisation et des moyens dont dispose l’établissement. Il existe des disparités régionales également…"1.
Le déroulement de l’hospitalisation
Elle peut-être de quelques heures à une longue durée en fonction de l’état clinique du sujet et de sa pathologie. Les médecins ont parfois besoin de plus de temps pour préciser le diagnostic, améliorer le traitement, pratiquer des examens supplémentaires… "L’intérêt de l’hospitalisation, c’est de pouvoir réaliser une étroite observation du patient et d’évaluer sa réponse au traitement, explique Pierre-Michel Llorca. On peut ainsi au fil des heures et des jours réajuster les posologies par exemple. La durée moyenne de séjour est environ de 3 semaines, mais varie selon les pathologies et les modalités d’organisation… le temps de vérifier l’efficacité du traitement mis en œuvre".
Et après l’hospitalisation ?
Une fois le traitement mis en place, le patient peut quitter l’hôpital pour poursuivre la prise en charge ambulatoire qui associe la plupart du temps, consultations spécialisées régulières et traitement médicamenteux et/ou psychothérapeutique.
Admission en psychiatrie à la demande d’un tiers
Le patient, en raison de sa pathologie psychiatrique, n’est pas en mesure de donner son consentement au soin. Dans ce cas, la demande d’hospitalisation émane le plus souvent d’un tiers (famille, ami, environnement professionnel…). Pour que l’admission en soin psychiatrique à la demande d’un tiers soit prononcée par le directeur de l’établissement, la demande manuscrite du tiers doit s’accompagner de 2 certificats médicaux établis par exemple par le médecin généraliste ou le psychiatre traitant, dont au moins un ne doit pas travailler dans l’établissement d’accueil, attestant de l’existence d’un trouble qui empêche la personne de donner son consentement à des soins nécessaires. A noter que très peu d’établissements psychiatriques privés à but non lucratif en France sont en mesure d’accueillir les hospitalisations sans consentement.
Le déroulement de l’hospitalisation
Hospitalisé au sein d’un service de psychiatrie, le patient fait l’objet d’une surveillance constante et rapprochée. L’hospitalisation sous contrainte peut durer très peu de temps mais son maintien dépend de l’évolution de l’état du patient et son consentement aux soins. Elle nécessite une série de certificats médicaux réévaluant l’état du patient dans les 24 heures et 72 heures puis régulièrement de manière à évaluer s’il est nécessaire de maintenir la mesure de contrainte. "L’examen clinique est parfois difficile mais ce n’est pas la règle, assure notre spécialiste. Ce n’est pas parce que quelqu’un ne veut pas se faire soigner qu’il va forcement être agressif. Mais légalement, nous pouvons le retenir contre sa volonté si cela est nécessaire, dans des locaux prévus à cet effet".
Et après l’hospitalisation ?
Le traitement est poursuivi soit librement (si l’état du patient a évolué), soit sous la forme d’un programme de soins qui permet de contraindre le patient à venir régulièrement en consultation (ou dans toute autre modalité d’hospitalisation à temps partiel) au sein de l’établissement.
Admission en soin psychiatrique à la demande d’un représentant de l’Etat
Elle ne représente qu’un faible pourcentage de patients (1 à 3 %) et a lieu lorsqu’existe une mise en danger de l’ordre public et de la sécurité des personnes. La personne est jugée comme potentiellement agressive, perturbatrice. "Quelqu’un qui déambule nu sur la voie publique ou qui y manipule des armes représente potentiellement une mise en danger de l’ordre public et de la sécurité des personnes", souligne notre spécialiste.
Le déroulement de l’hospitalisation
La personne est placée sous l’autorité de l’Etat avec un avis médical, ce qui justifie l’intervention des forces de l’ordre. Puis conduite au service des urgences cette fois-ci. "Ce passage par un service disposant d’un plateau technique médical est indispensable, car il est important d’écarter les autres causes médicales avant d’orienter le patient en psychiatrie. Un comportement anormal peut-être la conséquence d’un traumatisme crânien par exemple".
Si son état est consécutif à un trouble psychiatrique, le patient sera orienté vers le service psychiatrique de l’établissement pour un examen clinique et la mise en place des traitements. "Les modalités sont plus contraignantes et tous les établissements n’accueillent pas ce type de patients", précise le Pr Llorca.
Souvent compte tenu du contexte, l’hospitalisation est parfois plus longue car les manifestations sont parfois plus intenses et résistantes aux traitements et sur le plan légal, il faut attendre l’avis du préfet (par arrêté préfectoral), seule personne à pouvoir décider de la sortie du patient ou du maintien de son hospitalisation.
Et après l’hospitalisation ?
Une fois l’état clinique amélioré, le traitement peut se poursuivre soit librement, soit sous la forme d’un programme de soins qui contraint le patient à venir régulièrement en consultation (ou dans toute autre modalité d’hospitalisation à temps partiel) au sein de l’établissement.
Au final, si le cas ne revêt pas un caractère urgent, parlez-en à votre médecin traitant ou votre psychiatre. Il pourra signer les certificats nécessaires à une éventuelle hospitalisation et organiser sans précipitation l’arrivée du patient à l’hôpital. Ce qui est moins traumatisant et épargne l’attente interminable aux urgences.
Dans le rapport "Prévention des maladies psychiatriques : pour en finir avec le retard français" paru le 10 octobre 2014, l’Institut Montaigne et la Fondation FondaMental en appellent au volontarisme politique pour réinscrire la psychiatrie au cœur d’une politique de prévention et font des recommandations autour de 4 grands leviers d’action.
Pour en savoir plus sur les recommandations : - Lire notre article " Santé mentale : en finir avec l’incroyable retard français" - Consulter le rapport de l’Institut Montaigne - Consulter la page de La fondation FondaMental