La viande française est-elle vraiment plus sûre ?
Depuis que le gouvernement français a autorisé l'importation de viande anglaise, il faudra bientôt choisir l'origine de votre steak... Faut-il préférer la provenance hexagonale ? Le label "Viande française" est-il une garantie de sécurité ? Doctissimo fait le point sur un sujet saignant.
Lorsque vous allez chez le boucher, vous vérifiez toujours l'origine des animaux ? Mais la viande bovine hexagonale mérite-t-elle notre confiance ?
Une surveillance équivalente ?
La viande anglaise est-elle moins bien contrôlée ? Non, répond a priori l'Agence française de sécurité sanitaire des aliments (AFSSA), dont l'avis est à l'origine de la levée de l'embargo. Car il est vrai qu'outre-Manche, les vérifications sont nombreuses. Elles sont même parfois plus strictes qu'en France ou dans d'autres pays européens. Un des seuls points sur lequel un bémol peut éventuellement être émis est le dépistage des cas d'encéphalite spongiforme lors de l'abattage, qui n'est pas systématique outre-manche.
| France | Grande Bretagne |
---|---|---|
Animaux de moins de 24 mois |
Surveillance clinique |
Surveillance clinique |
Animaux de 24 à 30 mois |
Dépistage systématique |
Surveillance clinique |
Plus de 30 mois |
Dépistage systématique |
Animaux non consommés |
Chez les animaux touchés, le prion devient détectable dans le système nerveux central à partir de 30 mois environ. Mais on a trouvé des cas positifs plus jeunes. C'est pourquoi les tests se font en France à partir de 24 mois. Les premiers signes de la maladie apparaissant quant à eux six mois après la détection, généralement à partir de 36 mois.
Plus de Naïfs en Angleterre ?
Indépendamment de ces contrôles, des mesures concernant l'alimentation des bovins et l'utilisation des farines animales ont été prises en France comme en Grande Bretagne. Plus touché, le gouvernement anglais a d'ailleurs pris des précautions beaucoup plus tôt. Mais malgré les différentes interdictions, des cas de maladie de la vache folle sont apparus après les différentes étapes de sécurisation. Ces cas, Nés Après l'Interdiction des Farines (NAIF) animales ont émergé des deux côtés de la Manche. Ceux-ci traduisent soit le non respect des mesures, soit l'existence de voies de transmission encore inconnues. Or l'Angleterre a vu un plus grand nombre de ces cas "Naïfs" :
| Date d'application de la mesure | Nombre de cas |
---|---|---|
NAIF après interdiction des farines animales dans l'alimentation des bovins |
Juillet 1990 |
641 |
Super NAIF Retrait des Matériaux à risque spécifié de la fabrication des farines |
Août 1996 |
32 |
Ultra NAIF Interdiction de l'emploi de farines animales à toutes les espèces |
Novembre 2000 |
0 |
| Date d'application de la mesure | Nombre de cas |
---|---|---|
NAIF après interdiction des farines animales dans l'alimentation des bovins |
Juillet 1988 |
29 120 |
Super NAIF Retrait des Matériaux à risque spécifié de la fabrication des farines |
Octobre 1990 |
14 588 |
Ultra NAIF Interdiction de l'emploi de farines animales à toutes les espèces |
Août 1996 |
18 |
Et l'abattage sélectif ?
En Grande-Bretagne, si l'on découvre un cas de vache folle dans un troupeau, on abat toutes les bêtes nées entre 89 et 93. De plus, la descendance des cas confirmés est, elle aussi, abattue. En France, l'abattage total du troupeau était pratiqué, ainsi que celui de tout bovin ayant été en contact avec l'animal malade. Mais depuis janvier 2002, seul les animaux nés avant le premier janvier 2002 sont éliminés. Les deux pays pratiquent ainsi un abattage sélectif. Ce n'est donc plus un critère qui pouvait donner un "avantage" à la viande française.
Des lacunes en France…
Indépendamment de toute comparaison entre la France et la Grande-Bretagne, il faut souligner certains dysfonctionnements dans les mesures de précaution hexagonales. Ainsi, l'enquête menée en 2001 par Comité d'experts sur les ESST (Encéphalopathies subaiguës spongiformes transmissibles) dans les abattoirs a montré plusieurs irrégularités. Ainsi, pour 10 % des carcasses, l'ablation de la moelle épinière (jugée à risque) était incomplète. Mais, depuis cette enquête, la technique d'aspiration a remplacé cette ablation. Certes, il conviendrait de savoir si ce procédé est réellement plus sûr.
De plus, les contrôles du Ministère de l'agriculture effectués en 2001 mettent en avant des lacunes. 1 900 000 bovins ont ainsi été contrôlés, dont 40 000 en abattoir. Or des infractions ont été relevées sur 12 % des animaux, ce qui correspondait à un quart des exploitations. Il s'agissait de problèmes d'identification des bovins, de tenue des registres ou de manques sur les documents d'accompagnement. En ce qui concerne le marquage à l'oreille des animaux, 47 % des exploitations étaient en infraction !
Mais il faut souligner que depuis 1999 a été mis en place une banque nationale des données d'identification. Son exploitation à partir de la fin 2002 devrait permettre de rendre le suivi beaucoup plus fiable.
L'étiquette pas nette…
Au niveau de l'étiquetage, il existe aussi des problèmes dans l'hexagone. La direction générale de la consommation, de la concurrence et de la répression des fraudes (DGCCRF) a ainsi effectué, entre le 20 décembre 2001 et le 20 février 2002, des contrôles auprès des bouchers et des grandes surfaces. Et les résultats ne sont pas en leur faveur. En effet, 1/3 des bouchers et 3 grandes surfaces sur 4 n'apposaient pas toutes les mentions obligatoires. La moitié des bouchers et 1/4 des grandes surfaces omettent les mentions volontaires : type, race, catégories d'animaux… Pourtant, une meilleure transparence et une information plus précise du consommateur sont indispensables en cette période de crise.
Anglaise ou Française, quelle viande choisir ?
Selon l'AFSSA, le risque éventuel est le même, le niveau de sécurisation étant équivalent entre les deux pays. Il faut néanmoins être sûr que les mesures prisent par chaque gouvernement sont respectées. Or en France des infractions et autres irrégularités ont été relevées. Mais l'Angleterre souffre quant à elle d'un manque de contrôles… A vous de choisir selon la confiance que vous accordez aux filières bovines de chaque pays.
Agence française de sécurité sanitaire des aliments (AFSSA) Information sur l´ESB du Ministère de l´agriculture